Nabil Badr, directeur adjoint de la Supervision bancaire, a présenté la vision de la Banque centrale pour structurer le marché secondaire des créances en souffrance (CES) au Maroc.
Par A. Hlimi
La réforme des CES marque une étape décisive pour le secteur bancaire marocain. Elle permettra aux banques de se concentrer sur leur cœur de métier, tout en offrant aux investisseurs une plateforme transparente et structurée. À terme, ce projet pourrait transformer les défis actuels en opportunités, renforçant ainsi la résilience et la compétitivité du système financier marocain. Ce projet, initié par Bank Al-Maghrib (BAM) avec l'appui technique de la Société financière internationale (SFI), vise à libérer les bilans des banques tout en offrant des opportunités nouvelles pour les investisseurs et les institutions financières.
Il arrive à un moment clé où les créances en souffrance ont connu une hausse continue, accompagnée d’un taux de sinistralité bancaire élevé, avec un doublement des encours en quelques années pour atteindre les 98 Mds de dirhams. En réponse, les provisions pour pertes ont augmenté, traduisant une gestion proactive mais coûteuse pour les banques. En comparaison avec les standards internationaux, notamment européens, le Royaume affiche des écarts significatifs en termes de structuration et d’efficacité du marché des CES.
Au Maroc, les processus de recouvrement des créances manquent de robustesse, limitant la performance des banques qui subissent de plein fouet l'effet sur leurs fonds propres. La mise en place d’un cadre réglementaire et prudentiel clair est essentielle pour soulager les impacts sur le secteur. L’étude de la SFI identifie plusieurs leviers de réforme :
• Prudence et transparence : Les banques devront fournir des informations granulaires sur les portefeuilles de créances non performantes, facilitant ainsi leur valorisation et leur cession.
• Optimisation judiciaire : Simplifier les procédures de notification et moderniser les ventes aux enchères sont des priorités, notamment via l’usage des technologies numériques.
• Réformes fiscales : L’harmonisation des déductibilités fiscales sur les provisions et pertes est cruciale pour encourager les transactions.
Les apports de la loi La réforme propose une série d’articles législatifs innovants pour sécuriser et simplifier le transfert des CES. D'abord, la cession des créances inclut désormais leurs accessoires (garanties, hypothèques), sans exigences supplémentaires de forme authentique. Elle intègre une dérogation au consentement du débiteur, simplifie les transferts, tout en respectant les droits des parties.
La Banque centrale souhaite également obtenir un nouveau régime fiscal et des clarifications en matière de réglementation des changes pour encourager les investisseurs étrangers. Un comité interinstitutionnel, sous l’égide du Secrétariat général du gouvernement, supervisera l’ensemble du processus. Ce comité veillera à l’adoption des amendements nécessaires dans les textes juridiques existants et à la proposition de nouveaux mécanismes adaptés au contexte marocain.