Miloudi Moukharik, secrétaire général de l’Union marocaine du travail (UMT)
Finances News Hebdo : Jusqu'à quel degré pouvons-nous croire que la santé et la sécurité au travail sont respectées par les chefs d'entreprises ?
Miloudi Moukharik : Malgré les difficultés que connaît le monde du travail, nous sommes heureux de constater que plusieurs entreprises ont pris conscience du facteur humain (notamment les multinationales, les sociétés bien structurées) en mettant en place des services d’hygiène et de sécurité.
Malheureusement, il y a d’autres entreprises, opérant dans des secteurs structurés, qui calculent la sécurité au travail en termes de coûts. Je donne un exemple simple : le Code du travail prévoit l’instauration de comités d’hygiène et de sécurité au sein de toutes les entreprises ayant 20 salariés et plus.
Les statistiques du ministère du Travail indiquent que 53% des sociétés n’ont pas instauré ces comités qui sont des comités paritaires et qui ne requièrent pas de coût. A cela s’ajoute le secteur informel qui est en dehors de tout contrôle et où les travailleurs sont très exposés aux risques. L’exemple frappant est celui des secteurs du bâtiment et du textile.
F.N.H. : Comment l’UMT contribuet-elle à l’instauration d’une réelle politique sociale dans notre pays ?
M. M. : Tout d’abord, nous sensibilisons nos délégués par des actions de formation sur la sécurité au travail. Tous nos délégués passent obligatoirement par des cycles de formation. Dans le cahier de revendications, en plus des revendications matérielles, il y a la lutte. Nous avons eu à mener des grèves pour instaurer des comités de sécurité et d’hygiène au sein des entreprises. En plus, nous organisons une Journée nationale d’hygiène et de sécurité ainsi que de grandes manifestations. Toutefois, ceci reste limité au sein du salariat syndicalisé. S’il n’y a pas de volonté politique de la part du gouvernement, nous allons continuer à surfer sur ces chiffres malheureux qu’enregistre notre pays.
F.N.H. : La sécurité sociale est l’une des composantes du dialogue social qui a échoué avec l’Exécutif sortant. Etes-vous optimiste par rapport à la relance du dialogue social durant le 2ème mandat de Benkirane ?
M. M. : On reprend les mêmes et on recommence, ce qui implique que nous aurons les mêmes résultats.
C’est peut-être prématuré de faire falloir des revendications, mais il faut que dans sa nouvelle configuration, le gouvernement prenne en compte la dimension du dialogue social avec les partenaires sociaux, soit à leur écoute et, surtout, satisfasse leurs revendications.
Toutefois, il semble qu’avec l’incapacité des partis politiques à se mettre d’accord pour former le nouvel Exécutif, nous allons vivre le même scénario et nous n’aurons d’autres choix que de continuer le combat.