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Exposition : L’art tout feu tout femme

Exposition : L’art tout feu tout femme

A l’occasion de la Journée internationale des droits de la femme et jusqu’au 27 mars, les cimaises de la séduisante galerie de l'immobilier Prestigia accueillent le group show qui, comme son intitulé - «L’art féminin en perspectives» - l’indique, rend hommage à la femme artiste et met en lumière son abondante créativité.

Par R. K. Houdaïfa

 

C’est une idée artistique étrange qui domine cette ère – peut-être conçue dans l’esprit fatigué d’un monde vieillissant, peutêtre influencée par l’univers aujourd’hui triomphant de la publicité, du marketing, de la mode ou de la communication ? -. Qu’importe, l’idée chemine, grandit, s’installe, poussée par les amateurs de nouveautés : le talent, dit-elle, appartient à la jeunesse utilisant des techniques récentes. On cherche donc les jeunes artistes correspondant à ce profil; on les promeut comme le show-biz lance des chanteurs, des groupes de rap; on leur conçoit une scène à la mesure du talent qu’on leur suppose.

Il n’est évidemment pas question ici de reprocher à qui que ce soit de parier sur la jeunesse ni de pratiquer un jeunisme imbécile, mais plutôt de se demander si ce que l’on nomme aujourd’hui les arts plastiques n’est pas en train de devenir un produit culturel comme un autre, assujetti à un devoir de rentabilité. Ainsi défini, contrôlé et formaté, l’art se transforme en objet manipulable, et tout ce qui n’entre pas dans le moule est inexorablement exclu. Un galeriste ne déclarait-il pas, il y a peu, lors de la 27ème édition du Festival international d'art vidéo de Casablanca (FIAV), que les jeunes artistes avaient abandonné la peinture et la sculpture au profit du multimédia, de la vidéo et de l’Internet ? Face à de tels dénis (il suffit de visiter n’importe quelle école des beaux-arts pour constater la vigueur de la peinture et de la sculpture), on pourrait même supposer que cette idée artistique aujourd’hui dominante germa dans des esprits plus matures qui inventèrent à la jeunesse ses jouets actuels, dans la plus pure tradition du marketing. Ces dénis révèlent aussi un étrange mépris pour l’art qui se retrouve instrumentalisé, placé au même rang qu’une automobile ou un aspirateur.

On peut donc se réjouir de l’arrivée de nouvelles techniques qui ouvrent à l’art des perspectives différentes, mais sans pour autant condamner celles existant - on voit bien que le cinéma, puis la vidéo n’ont pas tué la photographie aujourd’hui triomphante. Il arrive même que ces techniques soient complémentaires…

 

Un choix surprenant

Baptisé éloquemment «L’art féminin en perspectives» : le quoi ? avant le genre; ce qui frappe d’abord dans l’exposition née de la volonté d’Art 4U Gallery, de la Fondation BMCI et de Prestigia, outre la qualité de certains tableaux, portraits surtout, abstraits aussi, et de certaines sculptures, c’est plus le sens du combat. Primo, s’attacher à montrer qu’au Maroc l’esprit n’est pas l’apanage de l’homme, la femme prouvant qu’elle est aussi apte que ce dernier à se délecter des nourritures spirituelles. Et secundo, montrer que les 10 jeunes artistes réuni(e)s dans ce group show (Fatine Arafati, Sabrine Lahrach, Mariam Tagadirt, Amal Charif Lilyan, Houda Affaya, Ewa Potocka, Nafie Ben Krich, Saad Nazih, Mohammed Arrhioui, Ulrich Zouanda) sont toutes et tous habité(e)s par la même préoccupation : celle de prouver que ce frêle esquif qu’est l’art saura toujours braver les tempêtes rugissantes qui s’acharnent sur lui, et qu’il battra encore pavillon haut, malgré la voracité de l’indigeste art conceptuel et du factice cyberart.

Là, on y trouve ce qui se fait de mieux en matière d’une modernité qui nous fait plonger dans un univers onirique, magique. Une modernité incarnée par les tableaux d’où sourd une angoisse existentielle de Mariam Tagadirt, les portraits sensuels d’Amal Charif Lilyan, les silhouettes recroquevillées et incrustées de coquilles d’œuf de Mohammed Arrhioui, ou par les recherches sur la couleur de Saad Nazih, si ce n’est par le style libre et le geste fluide de Fatine Arafati ou la palette délicate de Nafie Ben Krich… Un parcours riche et passionnant. Les bas reliefs en papier de Sabrine Lahrach, les sculptures vouées à la décomposition de Houda Affaya ou d’Ulrich Zouanda, au-delà du plaisir de déchiffrement auquel elles convient, ces œuvres forcent l’admiration par leur esthétique et l’émotion que procurait l’espace poétique qu’elles créent.

Au sortir de cette expo, où l’on découvre tant de talents, on ne peut qu'applaudir des deux mains la louable initiative prise par quelques femmes et hommes de bonne volonté

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