Photo : Ivan Valencia/AP/SIPA
Bogotá, 22/11/2019 (MAP)- Des dizaines de milliers de Colombiens sont descendus, jeudi, dans les rues des principales villes du pays pour exprimer leur rejet de la politique sociale et économique du gouvernement du président de droite, Ivan Duque, en fonction depuis août 2018. A l'appel des centrales syndicales et des mouvements de gauche et des organisations indigènes, une grève générale a été observée dans l’ensemble des grandes villes du pays au milieu d’importantes mesures de sécurité. Lors des manifestations organisées à Bogotá et dans les autres grandes villes du pays tels que Medellín, Cali, Barranquilla et Carthagène, les manifestants parmi lesquels des milliers d’étudiants et d’indigènes, ont notamment exprimé leur rejet de la réforme éventuelle du marché du travail et des retraites, à l’origine de la grogne sociale dans le pays sud-américain.
Selon les organisateurs de ce débraye, la Confédération des travailleurs de Colombie (CTC), la Confédération générale du travail (CGT) et Centrale unitaire des travailleurs (CUT), la réforme du marché du travail envisagée, selon eux, par le gouvernement menace la sécurité d’emploi.
A en croire les syndicats, en vertu de cette réforme éventuelle, les jeunes arrivant sur le marché du travail devraient percevoir un salaire inférieur de moins de 25% par rapport au salaire minimum (environ 224 euros).
Cette réforme ouvre également la voie à l’embauche des travailleurs à temps partiel, une mesure susceptible de priver des milliers de personnes du droit à la retraire, reprochent les mêmes sources.
Les manifestants ont également fustigé l’intention du gouvernement de réformer le régime des retraites à travers la suppression de la caisse Colpensiones, qui gère le régime des retraites du secteur public.
Ils ont de même appelé le gouvernement à renoncer à la réforme fiscale en cours d’examen au Congrès, tout en réclamant davantage de ressources pour le secteur de l’éducation ainsi que la mise en place de mesures concrètes pour faire face à la spirale de violence visant les indigènes et les leaders sociaux.
La grève qui intervient dans un contexte régionale marqué par des troubles sociaux dans plusieurs pays de la région notamment le Chili et la Bolivie, a connu la participation de plusieurs partis de gauche notamment le parti Farc, issu de l’ancienne guérilla de même nom.
A Medellín (nord-ouest), deuxième ville du pays, le chef de la Farc, Rodrigo Londoño, a appelé M. Duque à prendre en compte les revendications des Colombiens. "J'espère que le gouvernement écoute le peuple", a-t-il déclaré.
Dans un discours à la télévision mercredi soir, le président colombien, qui a battu le record en termes d’opinions défavorables vis-à-vis de sa politique économique et sociale, avait reconnu que certaines revendications sociales sont "recevables" sans fournir plus de précision. Citant la ministre de l’Intérieur, Nancy Patricia Gutiérrez, les médias locaux ont rapporté que les manifestations se sont globalement déroulées dans un climat de tranquillité, à l’exception de Bogotá et de Cali où des incidents ont éclaté entre manifestants et forces de l’ordre. "Des groupes minoritaires ont commis plusieurs actes de vandalisme et agressé nos policiers", a écrit le maire de Bogotá, Enrique Penalosa, sur son compte Twitter.
Selon la presse locale, des individus encagoulés ont tenté de pénétrer au Capitolio (siège du Congrès) et à la mairie de la capitale, mais ont été repoussés par les forces de l’ordre.
De violents incidents se sont également produits à Cali (sud-ouest) où le maire de la ville a décrété un couvre-feu suite au pillage de supermarchés et la dégradation de biens publics. Pour sa part, le directeur de la Police nationale, le général Oscar Atehortua, a indiqué que jusqu’à 16h00 (21h00 GMT), 28 policiers ont été blessés dans tout le pays dont trois à Bogotá.