Bénéfice trimestriel plus que doublé pour le français TotalEnergies et même quintuplé pour le britannique Shell: les prix des hydrocarbures, qui flambent depuis l'invasion russe de l'Ukraine, propulsent les bénéfices des géants pétroliers.
Shell a ainsi publié jeudi un bénéfice net part du groupe de 18 milliards de dollars pour le deuxième trimestre, qui profite aussi d'une reprise de provisions de 4,3 milliards de dollars, après que la major pétrolière a revu à la hausse ses projections de prix du pétrole et du gaz, revenant sur une partie des dépréciations massives de la pandémie de Covid-19.
Hors éléments exceptionnels, le bénéfice net ajusté ressort à 11,5 milliards de dollars, doublé sur un an. Et sur le premier semestre, le bénéfice net part du groupe a été quasi triplé à 25 milliards de dollars, a précisé Shell dans un communiqué.
TotalEnergies, de son côté, a plus que doublé son bénéfice net part du groupe au deuxième trimestre, à 5,7 milliards de dollars, en dépit d'une nouvelle provision de 3,5 milliards de dollars liée à l'impact potentiel des sanctions internationales sur la valeur de sa participation dans l'entreprise russe Novatek.
Le résultat net ajusté du groupe français atteint 9,8 milliards de dollars sur le trimestre, contre 3,5 milliards un an plus tôt. Sur le semestre, il totalise 18,8 milliards, quasiment triplé par rapport au premier semestre 2021.
Shell "a enregistré au deuxième trimestre de solides résultats financiers", s'est félicité son directeur général, Ben van Beurden. En témoigne un programme de rachat d'actions de 6 milliards de dollars à exécuter sur le trimestre en cours, après un précédent rachat de 8,5 milliards de dollars achevé début juillet.
Mais "avec des marchés de l'énergie volatils, des turbulences économiques et le besoin d'agir pour lutter contre le changement climatique, 2022 continue de présenter des défis pour les consommateurs, les gouvernements et les entreprises", a-t-il prévenu.
Le souvenir est encore frais des pertes colossales annoncées par des géants pétroliers terrassés, autour du globe, par l'effondrement brutal de la consommation pendant la pandémie. Shell avait, par exemple, pris une charge de 16,8 milliards de dollars au deuxième trimestre 2020.
Mais les cours des hydrocarbures ont depuis rebondi et flambent depuis des mois, particulièrement depuis l'invasion russe de l'Ukraine.
Les prix du gaz, qui étaient retombés après les sommets atteints en mars peu après le début du conflit, s'envolent à nouveau, après la réduction des livraisons russes, et ont renoué ces derniers jours avec les niveaux d'alors.
Shell avait déjà dévoilé un bénéfice record au premier trimestre, à 7,1 milliards de dollars, en dépit d'une charge après impôts de 3,9 milliards de dollars liée au retrait progressif de ses activités de pétrole et gaz en Russie.
"Il est inévitable qu'avec des résultats aussi solides, la façon dont l'entreprise utilise ses bénéfices sera scrutée de près", a estimé Michael Hewson, analyste chez CMC Markets.
La compagnie a notamment été chahutée lors de son assemblée générale en mai, accusée de ne pas aller assez loin dans sa stratégie climat (adoptée à près de 80%), entre irruption de militants et litanie de questions d'actionnaires.
Mais l'envolée des bénéfices "pose aussi la question de savoir si Shell pourra maintenir ce niveau de rentabilité au second semestre", ajoute Hewson.
Face aux profits des majors pétrolières, Londres avait annoncé en mai une taxe exceptionnelle sur le secteur de l'énergie, pour aider en partie à financer les aides gouvernementales aux ménages les plus modestes face à la crise du coût de la vie.
En France, ces énormes bénéfices pétroliers ont aussi alimenté un débat sur une taxe sur les "superprofits" des grandes multinationales, rejetée de peu samedi par l'Assemblée nationale malgré les protestations de la gauche et de l'extrême droite.
En Bourse jeudi en milieu de matinée, l'action de TotalEnergies reculait de 2,40% à 48,57 euros et celle de Shell prenait 1,30% à 2.145 pence.