Les stigmates de la crise, la dégradation des finances publiques ainsi que les énormes besoins de financement en matière économique et sociale sont autant d’éléments qui imposent une logique de rupture.
Par M. Diao
Le gouvernement qui sera dirigé par Aziz Akhannouch est attendu sur plusieurs fronts. Le contexte actuel est particulièrement défavorable, comme en témoigne la prévalence de certains stigmates de la crise sur l’économie nationale. Il suffit de se pencher sur les notes d’information ou les études du HCP pour s’apercevoir de l’ampleur de la dégradation des finances publiques et de certains indicateurs économiques et sociaux sous l’effet du coronavirus. C’est dans cette atmosphère pour le moins peu favorable, même s’il y a lieu de mentionner des signes de reprise de l’activité économique, que le prochain gouvernement élaborera le projet de Loi de Finances 2022.
Ce dernier suscite d’ores et déjà un grand intérêt auprès des experts et des observateurs à l’échelle nationale. Pour cause, au-delà du simple fait de prévoir et d’autoriser pour chaque année budgétaire l'ensemble des ressources et des charges de l'État (dans les limites d'un équilibre économique et financier bien défini), la Loi de Finances constitue un baromètre de taille des priorités économiques, sociales et fiscales de l’action gouvernementale. A la question de savoir si le PLF 2022 s’inscrira dans une logique de rupture par rapport aux PLF élaborés sous l’ère Otmani, Driss Al Andaloussi, ancien président de l’Association des membres de l’Inspection générale des finances (AMIF), apporte une réponse pertinente à plusieurs égards.
«Le PLF 2022 élaboré par le gouvernement qui sera dirigé par Aziz Akhannouch ne peut s’inscrire que dans la continuité, notamment à l’aune de la note de cadrage déjà rendue publique», prédit l’ancien haut cadre du ministère des Finances. Et de préciser : «La même note de cadrage mentionne, entre autres, que la mise en œuvre du nouveau modèle de développement devrait s’ériger en priorité pour le gouvernement et l’ensemble des acteurs dans les années à venir».
Ces éléments qui militent pour une rupture
Si notre interlocuteur table plus ou moins sur une dynamique de continuité pour la confection du PLF 2022, force est d’admettre que plusieurs autres éléments plaident en faveur d’une rupture. Et ce, par l’entremise de l’adoption de mesures fiscales innovantes et audacieuses, à la hauteur des énormes besoins de financement du nouveau modèle de développement et de l’ambitieux programme économique et social du RNI (www. fnh.ma), lequel a fait mouche lors des dernières échéances électorales.
«Il est important de garder à l’esprit que les 228 Mds de DH de recettes fiscales et douanières ne couvrent que 60% des dépenses publiques. Avec les engagements pris lors des dernières échéances électorales, il faudra au moins 400 Mds de DH de recettes pour concrétiser les déclarations d’intention des trois partis de la majorité, améliorer les services publics ainsi que les infrastructures de notre pays», fait savoir Al Andaloussi. Ainsi, l’élargissement de l’assiette fiscale ainsi que l’exploration de nouvelles sources de financement doivent faire partie de la trame du PLF 2022.
Ce dernier gagnerait à se différencier des PLF sous l’ère El Otmani, souvent taxés d’indigents sur le plan fiscal. Pour sa part, Rachid Seddik Seghir, expert-comptable et patron du cabinet Seddik, soutient que le PLF 2022 doit s’inscrire à moyen terme dans une logique de rupture, avec des mesures-phares favorables à l’environnement des affaires. «La pandémie a été éprouvante pour les opérateurs économiques. Dans le cadre du PLF, le gouvernement dirigé par Akhannouch devra prendre des mesures économiques de nature à restaurer la confiance, sans laquelle il n’y a pas de reprise durable», suggère-t-il. A en croire Seghir, une autre donne importante légitime la rupture lors de l’élaboration du PLF 2022 : il s’agit de l’implémentation de la loi-cadre portant réforme fiscale.