«130 milliards de DH, soit près de 50% du budget de l’Etat, ont été alloués aux secteurs sociaux. C’est un effort sans précédent». Devant la presse qu’il a conviée pour présenter les grandes lignes du Projet de Loi de Finances 2018, Mohamed Boussaid, ministre de l’Economie et des Finances, a longuement insisté sur la vocation sociale de ce budget qui tente de répondre aux préoccupations quotidiennes des citoyens, que ce soit en termes d’éducation, de santé, d’emploi ou de réduction des disparités spatiales.
Selon le ministre, les besoins prioritaires des citoyens, notamment dans le monde rural, ont changé. «Il y a quelques années, la priorité était les routes, l’eau et l’électricité. Aujourd’hui, la priorité numéro un est la santé, suivie de l’éducation. Les citoyens réclament avec insistance l’accès équitable et dans de bonnes conditions aux soins et à un système éducatif de qualité. Tout gouvernement qui se respecte se doit de répondre aux aspirations de ses citoyens», argumente le ministre, qui a rappelé également les orientations royales pour la réduction des disparités sociales et spatiales criantes.
Ces orientations se manifestent donc dans les budgets octroyés aux deux ministères concernés, ceux de l’Education et de la Santé. Le premier se voit attribuer pour 2018 une rallonge de 5 milliards de DH, portant son budget à plus de 59 milliards de DH, et la création de 20.000 postes budgétaires. Pour le second, l’effort est moins conséquent. Le budget du département de la Santé s’apprécie de 500 millions de DH à plus de 14,8 milliards de DH, «compte non tenu des comptes spéciaux du Trésor qui financent la réalisation des CHU de Tanger et d’Agadir, et la rénovation du CHU de Rabat, qui ne figurent pas dans le budget», tient à préciser Boussaid. 4.000 postes budgétaires supplémentaires ont été par ailleurs programmés pour le ministère de la Santé.
La vocation sociale du budget 2018 se manifeste également dans la poursuite du soutien aux différents programmes sociaux mis en place ces dernières années par l’Exécutif, comme le Ramed (1,3 milliard de DH), l’Initiative royale un million de cartables, Tayssir, l’aide directe aux femmes veuves (1 milliard de DH), ou encore les bourses universitaires (1,82 milliard de DH par an). Le ministre a par ailleurs annoncé l’extension des prestations du Fonds d’entraide familiale aux femmes mariées «abandonnées», à leurs enfants ayant droit à la pension alimentaire ainsi qu’aux enfants ayant droit à ladite pension alimentaire en cas de décès de la mère.
Sur le plan social toujours, la mise en œuvre du programme royal de lutte contre les disparités territoriales et sociales dans le monde rural, qui doit mobiliser un budget de 50 milliards de DH sur 10 ans, s’accélère. Les crédits de paiement dans le cadre de ce programme au titre de 2018 atteignent 3,54 milliards de DH, tandis que les engagements pour 2019 sont de 4 milliards de DH.
Soutien assumé au secteur privé
Le budget 2018 prend également à bras-le-corps la question de l’emploi. Si l’Etat va apporter sa contribution à travers la création de 100.000 postes pour un coût global de 8 milliards de DH, le gouvernement a fait le choix du soutien tous azimuts au secteur privé et aux entreprises. Partant du principe que c’est le secteur privé qui crée des emplois, le PLF 2018 multiplie les mesures de soutien à l’investissement privé, à travers notamment l’instauration de l’IS progressif, l’une des mesures-phares de ce budget. Cette mesure, revendiquée inlassablement par le patronat depuis plusieurs années, n’est «pas un cadeau aux entreprises», tient à préciser le ministre. Il y voit plutôt un levier pour créer des emplois. «Il s’agit de permettre aux entreprises de retrouver leurs capacités à investir, à créer de la richesse et donc des emplois. La baisse de la pression fiscale sur les sociétés, notamment les PME, est une tendance mondiale à laquelle nous ne pouvons nous soustraire», justifie-t-on du côté du ministère.
L’efficacité de telles mesures, dont le manque à gagner en termes de rentrées fiscales pour le Budget de l’Etat est difficilement mesurable, reste à démontrer. Le ministre en convient. Il assure que le levier fiscal seul ne suffit pas. «Ces incitations doivent être accompagnées d’une panoplie de mesures destinées à lever les freins à l’investis- sement, comme la refonte des CRI, la lutte contre la corruption, faciliter l’accès au financement, etc.».
Vous l’aurez compris. L’Exécutif veut redonner confiance aux entreprises, libérer leur potentiel. Cela passe aussi par la résolution de l’épineuse question des arriérés de TVA (près de 30 milliards de DH réparties entre entreprises publiques et privées). «Une solution définitive sera trouvée l’année prochaine», promet Boussaid. ■
Dette publique : «Aucune crainte à avoir»
Les titres alarmistes de la presse sur l’ampleur de la dette publique du Maroc n’ont pas l’air de plaire au ministre des Finances. «Non ! Notre niveau d’endettement n’est pas une menace. A ce niveau-là, il est soutenable. On ne peut imaginer une économie moderne sans endettements. Sinon, comment aurions-nous fait pour construire tous ces barrages, autoroutes... qui aujourd’hui représentent un facteur essentiel d’attractivité pour les investisseurs étrangers», affirme-t-il. «Notre dette publique ne constitue pas un frein. Elle est maîtrisée et gérée de façon rationnelle. Néanmoins, elle ne doit pas enfler», ajoute-t-il.
Selon le MEF, la Loi organique des Finances a consacré le principe de l’endette- ment pour l’investissement. Tant que la dette sert à financer les investissements, il n’y a pas de craintes à avoir, fait-on savoir.
«On me voit souvent signer des conventions de prêts avec des bailleurs de fonds internationaux. Mais sachez également que nous remboursons continuellement nos dettes, sans que l’on communique dessus. Depuis le début de l’année, ce ne sont pas moins de 92 milliards de DH en principal qui ont été remboursés par le Trésor. Dorénavant, nous allons communiquer sur les chiffres du remboursement de la dette chaque mois», annonce Boussaid.
Rappelons que la dette du Trésor atteint 65% du PIB. La dette publique dépasse elle les 80% du PIB.
A.E