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Lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme: le Maroc bien parti pour sortir de la liste grise du GAFI

Lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme: le Maroc bien parti pour sortir de la liste grise du GAFI

Le Groupe d’action financière (GAFI) livre son verdict le 19 octobre.

 

Par A. Hlimi

Les autorités financières du Royaume travaillent activement, depuis bientôt 5 ans, pour que le Maroc quitte la liste grise du GAFI qui pénalise les IDE entrants, et de manière générale les flux des capitaux. Le Maroc s’est en effet engagé politiquement à haut niveau, et ce depuis février 2021, à travailler avec le GAFI et le GAFIMOAN pour améliorer l’efficacité de son régime de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme (LBC/FT). Le pays a pris des mesures dans ce sens, notamment en fournissant davantage de formations et en sensibilisant les institutions financières pour leur permettre de détecter les cas suspects et déposer des déclarations d’opérations suspectes.

Que ce soit l’Office des changes, Bank Al-Maghrib, l’AMMC ou encore l’ACAPS, les différents régulateurs ont redoublé d’efforts pour collaborer avec l'Autorité nationale du renseignement financier (ANRF), qui a vu le volume des déclarations de soupçons augmenter sensiblement depuis sa création. Résultat des courses : différents opérateurs estiment que le Maroc est désormais aux normes sur les aspects techniques pour pouvoir espérer quitter cette liste. C’est le cas par exemple pour l’Office des changes (OC), directement impliqué dans le sujet. Majid Zouheir, chef du département supervision à l’OC, témoigne lors d’une rencontre organisée par Refinitiv à Casablanca : «Nous avons beaucoup travaillé sur la sensibilisation des bureaux de change pour mettre à niveau cette population qui est particulière. L'encadrement n’y est pas toujours structuré et il fallait aider les entreprises à implémenter les procédures de contrôle avec des guides des procédures de contrôle interne, etc. On parle d’une population de près de 800 opérateurs de change au Maroc. En parallèle, nous devions contrôler la mise en place de ces procédures».

Ce travail semble payer, puisque de l’avis du responsable, «les évaluateurs du GAFI ont apprécié les efforts de l’Office des changes, surtout que les déclarations de soupçon en provenance des agents de change ont augmenté». Même son de cloche pour l’AMMC, dont le chef de la brigade LBC/FT, Badre Labiad, rappelle que l’autorité donne de l’importance à l’identification des clients des opérateurs depuis plus de 10 ans. Aussi, les différentes circulaires émises récemment couvrent parfaitement les recommandations du GAFI. En parallèle, la relation avec l’Agence nationale du renseignement financier (ANRF) est fluide et les outils de contrôle de l’Autorité sont de plus en plus complexes. «Nos outils sont modernes et apportent de l’efficacité de contrôle, et c’est ce que recommande le GAFI», résume-t-il.

 

Ce qui est demandé au Maroc

En 2021, le GAFI avait estimé que le Maroc devrait continuer son travail de mise en œuvre de son plan d’action pour remédier à ses défaillances stratégiques sur plusieurs plans. Concrètement, il s’agit de l’amélioration du contrôle fondé sur les risques, en prenant des mesures correctives et des sanctions efficaces, proportionnées et dissuasives en cas de nonconformité. Le GAFI demande également de s’assurer que les informations sur les bénéficiaires effectifs, y compris les informations concernant les personnes morales et les constructions juridiques étrangères, sont appropriées, exactes et qu’elles ont été vérifiées. Sur ce volet, Bank Al-Maghrib a démarré le travail au début des années 2000, puis en 2019 avec une directive dédiée à l'identification des personnes, explique Youssef Ghchioua, responsable du contrôle sur place à la Direction de la supervision bancaire de Bank Al-Maghrib.

Un autre volet évoqué par le GAFI pour justifier la position du Maroc est en lien avec la surveillance et le contrôle efficace de la conformité des institutions financières. Et sur ce volet, l’ensemble des régulateurs ont augmenté la cadence. L’ACAPS, par exemple, a frappé fort récemment en publiant les résultats de ses contrôles. Imane El Bourichi, chef du service LBC/FT au sein de l’autorité, témoigne du travail effectué au sein de l’ACAPS. Selon elle, c’est l’activité Assurance Vie et capitalisation qui demande le plus de vigilance. Elle assure que le secteur a pris acte de l’importance du sujet sous la supervision de l’ACAPS et que des efforts «extraordinaires» sont déployés. Tout comme l’Office des changes, l’ACAPS est confrontée à un réseau de distribution dense et souvent sous-équipé qu’il faut accompagner. Mais ce qui est déterminant, selon elle, est que les dirigeants du secteur sont pleinement conscients de l’importance du sujet, rappelant que la gouvernance est un élément clé retenu par le GAFI. En plus des actions de contrôle, la responsable au sein de l'ACAPS a rappelé les multiples actions menées par le régulateur depuis la mise en place de sa sa feuille de route LBC/FT en 2018, notamment sur les volets réglementaires, de sensibilisation mais aussi de coordination nationale. L'ensemble de ces actions a été apprécié par les évaluateurs du GAFI. 

 

Et la protection des données personnelles dans tout ça ?

Cette traque massive et organisée contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme se heurte à un cadre institutionnel puissant qui est celui de la protection des données, puisque la vie privée est «inévitablement touchée étant donné que la lutte se base sur la collecte des données», comme le résume Souad El Couhen, membre du CNDP. Mais cet obstacle est surmonté en amont, puisque tous les textes de lois et toutes les directives sont conformes en amont, ce qui offre un cadre de travail fluide aux autorités et aux opérateurs. Le travail des autorités marocaines est maintenant complet et effectif. Reste à savoir comment les vérificateurs du GAFI vont interpréter les éléments. Rendez-vous le 19 octobre pour le verdict. 

 

Crypto, digital et liste grise
Dans son mot d’ouverture de cet événement, Nabil Badr, Directeur adjoint à la supervision bancaire, a expliqué que la réglementation des cryptoactifs et la transformation digitale ne sont pas en opposition avec les recommandations du GAFI, du moment que la réglementation est verrouillée. «La digitalisation doit être conforme», résume-t-il. Il rappelle que Bank Al-Maghrib continue de travailler avec l’ensemble des régulateurs sur un cadre pour les cryptoactifs dans le but d'encadrer leur utilisation, et ce avec l'assistance technique de la Banque mondiale.

 

 

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