Cette opération marque un tournant stratégique majeur pour TGCC et vise à faire du leader marocain du BTP un acteur continental de premier plan dans les infrastructures.
Par A. Hlimi
Mohamed Bouzoubaa, PDG de TGCC, a présenté le 7 juillet à Casablanca l’opération relative à l’acquisition de 60% de STAMVIAS. Pour la financer, l’opérateur lance une augmentation de capital de 2,2 milliards de dirhams. Il est ainsi prévu l’émission d'un peu plus de 3 millions d’actions nouvelles au prix de 725 dirhams l’unité, assorties d’un dividende de 11,5 dirhams. Ce prix intègre une décote de 18% par rapport au cours spot, une décote destinée à renforcer l'attrait de l’opération auprès du public.
Avec STAM-VIAS, TGCC étend ses compétences vers des métiers jusqu’ici peu couverts par le groupe : le terrassement, les routes, les grands ouvrages hydrauliques. Des domaines où STAM a su bâtir une solide réputation au Maroc comme en Afrique. Pour TGCC, c’est un renforcement à double détente: sur le plan technique et géographique. En s’ouvrant à ces expertises, le groupe comble un chaînon manquant et peut désormais répondre à des appels d’offres plus complexes, notamment sur le continent africain.
Les effets de ce rapprochement sont immédiats. TGCC affichait déjà 10,2 milliards de dirhams de commandes fermes à fin 2024. Avec l’intégration de STAM, ce carnet grimpe à 19,4 milliards dès 2025. Une progression spectaculaire, qui tire vers le haut l’ensemble des indicateurs financiers : le chiffre d’affaires 2025 est attendu à 12,7 milliards de dirhams, dont 35% en provenance de STAM-VIAS, et le résultat net devrait atteindre 739 millions de dirhams. Un niveau historique.
Trois piliers pour changer d’échelle
Depuis une décennie, TGCC a engagé un processus de transformation profond autour de trois axes : verticalisation, diversification et internationalisation. Côté verticalisation, le groupe a intégré les maillons clés de la chaîne : menuiserie (TG Wood), préfabrication (TG Prefa), charpente métallique (TG Steel), etc. Avec STAM, cette logique atteint sa pleine maturité. TGCC devient un acteur TCE (Tous corps d’état) encore plus intégré, capable de piloter un projet de A à Z, de la structure jusqu’aux finitions.
Sur le plan de la diversification, l’acquisition ouvre un accès privilégié aux grands chantiers d’infrastructures (ports, barrages, routes, etc.) où STAM dispose d’un solide track-record et d’un carnet de commandes de 9,1 milliards de dirhams. Enfin, l’internationalisation se renforce. Implanté au Gabon, en Côte d’Ivoire, au Sénégal, en Guinée et désormais en Arabie Saoudite, le groupe entend déployer STAM comme bras armé en Afrique et au MoyenOrient.
Un hub a été mis en place à Abidjan, avec pour mission de sourcer de nouveaux marchés dans la région et de coordonner les projets transfrontaliers. Il faut dire que depuis 2013, TGCC se fixe pour objectif de générer 10% de son chiffre d’affaires à l’international. Un seuil rarement atteint. Avec STAM, le groupe tient enfin le bon bout. Sa spécialisation dans les routes et ouvrages publics, très demandés en Afrique de l’Ouest, constitue un atout stratégique majeur.
Et après 2030 ?
Interrogé sur l’après-Coupe du monde 2030, Mohamed Bouzoubaa se montre confiant. Selon lui, les besoins en infrastructures au Maroc ne faibliront pas : eau, énergie, mobilité, urbanisme… «Il y a un pipeline quasi structurel d’opportunités», estime-t-il. TGCC se prépare déjà aux gares TGV, l’autoroute de l’eau, les projets de dessalement, ou encore les futures commandes de grands donneurs d’ordres comme l’UM6P. Une chose est sûre : le groupe choisira ses batailles.
«Nous ne courons pas après tous les marchés, nous nous préservons pour les projets d’envergure», insiste Bouzoubaa. Pour lui, mieux vaut la qualité et les marges que la quantité. Avec cette opération, TGCC ne se contente plus d’être un constructeur national à succès. Il devient un groupe régional intégré, présent sur toute la chaîne du BTP et armé pour affronter les grands marchés régionaux.