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Politique de dividendes: les sociétés cotées ont-elles répondu aux attentes ?

Politique de dividendes: les sociétés cotées ont-elles répondu aux attentes ?

Près des deux tiers des bénéfices dégagés par les sociétés cotées en 2023 serviront à la rémunération des actionnaires. L’année 2023 a été marquée par le retour à la distribution de dividendes chez 4 sociétés cotées.

 

Par Y. Seddik

Après la publication des résultats annuels 2023, l'attention des investisseurs s'est directement portée sur la répartition des bénéfices des sociétés cotées en Bourse. Cette information, particulièrement importante, permet d'évaluer la santé financière des entreprises et leur capacité à partager leurs bénéfices avec leurs actionnaires. Cette année, les entreprises n'ont pas déçu : le montant global des dividendes atteint 18,83 milliards de dirhams, dont 283 millions de dirhams de dividendes exceptionnels. Une somme en hausse de 18,5% par rapport à l'année dernière et correspondant à un payout de 64%. Cette hausse des dividendes est-elle le signe d'une conjoncture économique favorable ? Est-elle durable ? Quelles sont les entreprises qui se distinguent par leur générosité envers leurs actionnaires ?

Autant de questions que se posent les investisseurs. Par construction, le dividende n’a que deux affectations possibles : soit son réinvestissement dans l’entreprise sous forme d’autofinancement, soit sa distribution aux actionnaires sous forme de dividende. Les investisseurs réagissent souvent positivement à une hausse de dividende, tandis qu’ils accueillent une baisse du dividende plus négativement que celle des bénéfices. Ils apprécient tout particulièrement les entreprises généreuses en matière de dividendes lors de périodes d’instabilité boursière ou de taux bas.

Un moyen efficace de communication

Si une entreprise maintient ou augmente son dividende alors que son bénéfice décroît, elle signifie au marché que cette baisse n’est que passagère, et que la progression des bénéfices va reprendre. C’est le cas de Label’Vie cette année qui, malgré un résultat net impacté par la non récurrence des plus-values exceptionnelles, a été généreuse au niveau de la rémunération de ses actionnaires. Le spécialiste de la grande distribution a décidé de distribuer un dividende de 96,75 DH par action, contre 86,38 DH en 2022. Cependant, il faut garder en mémoire que la réduction des dividendes ne correspond pas nécessairement à une mauvaise nouvelle sur les résultats futurs. Rappelons que l’année dernière, les investisseurs étaient plus ou moins déçus par le niveau de rendement de plusieurs valeurs, surtout celles qui, historiquement, proposent de bons dividendes.

Toutefois, la baisse de la rémunération des actionnaires chez ces entreprises a été justifiée soit par un besoin de cash en matière d’investissements, soit par une priorité au développement long terme ou par un renforcement de fonds propres. De la même façon, il faudra éviter le piège qu’une hausse du dividende ne soit interprétée comme une raréfaction des opportunités d’investissement. La société peut parfois même choisir la rétention. Comme c’est le cas pour certaines l’année passée, dont les actionnaires ont refusé, en AGO, les dividendes en 2022. La totalité des bénéfices a été affectée au compte report à nouveau. En 2023, 30 sociétés cotées ont décidé de relever leur DPA, représentant plus de la moitié de la capitalisation de la cote.

À l’inverse, 6 émetteurs ont abaissé leur dividende, 14 ont maintenu leur DPA stable et 15 ont opté pour la non-distribution ou bien ont décalé cette décision. Par ailleurs, il convient de souligner que l’exercice 2023 a été marqué par le retour à la distribution des dividendes de 4 sociétés cotées, à savoir Alliances, SMI, Jet Contractors et Risma. Des décisions qui ont été largement saluées sur le marché, comme en témoigne l’évolution de leurs cours en Bourse. En somme, sur la base des dividendes annoncés jusqu’à date d’aujourd’hui et des cours observés à fin mars 2024, le D/Y du marché actions ressort à 3,2% contre 3,4% pour les rendements des BDT à 5 ans.

Les secteurs les plus rémunérateurs

A l'heure où les placements sûrs peinent à offrir du rendement, la Bourse de Casablanca se distingue par une distribution de dividendes particulièrement attractive. En effet, plusieurs secteurs se démarquent par des rendements de dividendes (D/Y) supérieurs à la moyenne du marché, offrant ainsi des opportunités intéressantes aux investisseurs en quête de revenus réguliers. Le secteur des sociétés de financement arrive en tête de ce classement avec un D/Y moyen de 4,9%. Cette performance s'explique notamment par le relèvement du dividende par action (DPA) de Salafin, qui passe de 27 à 28,5 DH, ainsi que par le maintien des DPA d'Eqdom et de Maghrebail. Le secteur des télécoms se hisse à la seconde place avec un D/Y de 4,2%, avec la hausse significative du dividende de Maroc Telecom, qui passe de 2,19 DH par action en 2022 à 4,20 DH en 2023. Il est suivi par le secteur des assurances avec un D/Y de 4,1% grâce à des augmentations de dividendes chez Agma, AtlantaSanad, Sanlam Maroc et Wafa Assurance. L'agroalimentaire n’est pas en reste, affichant un rendement de dividende de 3,9%, après le relèvement des dividendes de Cosumar, SBM, Mutandis et Oulmès.

D’autres formes de rétribution

En plus du dividende, le rachat d’actions, la réduction de capital et le dividende exceptionnel sont d’autres formes qui permettent à la société de rendre de la trésorerie à ses actionnaires. Or, force est de constater qu’au Maroc ces pratiques restent très limitées. La réglementation marocaine limite la portée des programmes de rachats. En effet, la fraction du capital sur lequel porte le programme de rachat ne doit pas dépasser 10% des titres qui constituent le capital, déduction faite de l’autodétention indirecte. De plus, le montant correspondant à la fraction du capital sur laquelle porte le programme de rachat ne peut en aucun cas dépasser le montant des réserves de la société, hors réserve légale. Pour la réduction du capital, elle est quasi-inexistante sur le marché marocain, excepté quelques opérations comptées sur le bout des doigts. Les émetteurs se limitent aux coups d’accordéon (réduction suivie d'une augmentation du capital de la société), ceci plus dans un souci légal que d'optimisation du R.O.E. Non, le dividende n'enrichit pas systématiquement l'actionnaire.

Le dividende en lui-même ne crée pas systématiquement de la richesse pour l’actionnaire, car le jour du détachement du dividende, l’action perd en valeur exactement la même somme. En clair, quand une société verse un dividende à un actionnaire, celui-ci ne fait que récupérer une partie de son patrimoine sous forme de numéraire. Pour mieux comprendre, imaginons que vous achetiez une action à 100 DH la veille d’une distribution de dividende. Si le lendemain vous recevez 5 DH de dividende et que l’action vaut toujours 100 DH, alors vous vous seriez enrichi de 5 DH en un jour et quasiment sans aucun risque.

En réalité, le jour de détachement du dividende, l’action va coter directement à 95 DH en cours de référence, ne créant donc aucune richesse pour l’actionnaire qui aura, avec les 5 DH de dividende, toujours 100 DH. Du point de vue de l’actionnaire, le calcul est simple. Il aura certes perçu 5 DH en cash, mais son action ne valant plus que 95 DH, son patrimoine restera de 100 DH, comme auparavant. L’actionnaire ne se sera donc pas enrichi. Au final, une certaine régularité dans la distribution de dividendes est souhaitable, soit dans la croissance, soit dans la stabilité des dividendes. De là découle, pour l’entreprise, la nécessité de choisir objectivement une politique de dividendes qui peut s’appuyer sur une analyse rigoureuse de sa situation financière, de ses perspectives de croissance et des attentes de ses actionnaires. 

 

 

 

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