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Déclaration des prix de transfert : les conditions allégées pour les filiales étrangères, mais…

Déclaration des prix de transfert : les conditions allégées pour les filiales étrangères, mais…

De nouvelles conditions de déclaration en vigueur avec la Loi de Finances 2021.

Pour les professionnels, même les entreprises qui ne remplissent pas ces conditions-là, doivent faire préparer la documentation des prix de transfert.

 

Par B. Chaou

 

Les règles sur les prix de transfert viennent de prendre un nouveau tournant au Maroc suite à l’entrée en vigueur de la Loi de Finances 2021. Un changement de conditions qui s'inscrit dans la lignée des efforts engagés par le Royaume visant l’amélioration de son cadre fiscal, mais également dans la perspective de se conformer aux règles de l’Union européenne en matière de fiscalité.

Il faut en effet rappeler que le pays adhère aux lois «antiBEPS» de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) visant à faire face à l’érosion de la base d’imposition et de transfert de bénéfices.

Pour rappel, cette pratique consiste en la minoration du chiffre d’affaires de la filiale d’une multinationale ou la majoration des charges facturées à sa maison-mère ou ses autres filiales qui traitent avec elle. Il peut s’agir de services ou de la vente de biens.

Ainsi, pour éviter toute infraction fiscale, la fixation des prix de transfert est devenue obligatoire à partir de janvier 2020 pour les filiales étrangères. Selon Arji Abdelaziz, expertcomptable, auditeur commissaire aux comptes, fondateur du cabinet Eurodefi-Audit et président de la Commission appui aux entreprises de la CFCIM, «les entreprises visées à l’article 210 sont tenues de communiquer à l’administration fiscale, par procédé électronique, la documentation permettant de justifier leur politique de prix de transfert selon les modalités prévues par voie réglementaire (Art. 214-III-A)».

Cette mesure concernait jusqu’ici toutes les filiales des multinationales ayant des liens avec leurs filiales étrangères, mais la Loi de Finances 2021 est venue limiter cette obligation aux sociétés ayant un chiffre d’affaires réalisé et déclaré ne dépassant pas les 50 millions de dirhams ou lorsque leur actif brut figurant au bilan à la clôture de l’exercice concerné est supérieur ou égal à 50 MDH.

La fixation des prix de transfert nécessite une étude bien approfondie et l’implication de l’expertise de plusieurs parties prenantes intervenant dans la chaîne d’activité de l’entreprise. Car, en effet, leur fixation donne naissance au manuel des prix de transfert de la société, un document de plusieurs pages qui doit être remis au fisc afin qu’il puisse réaliser les contrôles nécessaires, et s’assurer que les prix appliqués sont en adéquation avec la nature des prestations facturées.

Cette documentation comporte notamment un fichier principal contenant les informations relatives à l'ensemble des activités des entreprises liées à la politique globale de prix de transfert pratiquée et à la répartition des bénéfices et des activités à l'échelle mondiale, ainsi qu’un fichier dit «local» comprenant les informations spécifiques aux transactions que la filiale réalise avec les autres entreprises. Si ces documents ne sont pas dûment présentés, l'entreprise en question risque de tomber sous le coup de la loi.

D’après Arji Abdelaziz, «toute entreprise n’ayant pas produit à l’inspecteur cette documentation est passible d’une amende égale à 0,5% du montant des transactions concernées par les documents non produits. Le montant de l’amende précitée ne peut être inférieur à 200.000 dirhams par exercice concerné». «Le service comptable local se cache souvent derrière des prétextes de type : ‘ce sont des sujets confidentiels gérés par la maison-mère auxquels nous n’avons pas accès…’. Souvent, c’est la réalité, car la maison-mère sous-estime l’importance de fixer des prix de pleine concurrence dans ses filiales», ajoute-t-il.

Une mesure à double tranchant

Cet allègement vise, entre autres à encourager l’investissement étranger, surtout quand il concerne des structures de taille intermédiaire, pour qui le coût de la réalisation dudit manuel pourrait être un facteur de découragement face à l’investissement, surtout en cette période de crise. Toutefois, cette pratique serait à double tranchant si l’on se réfère aux déclarations des professionnels.

«A mon avis, et selon mon expérience internationale dans le traitement de la problématique des prix de transfert, cette disposition de la Loi de Finances 2021 est ce qu’on peut appeler «une fausse bonne nouvelle». En effet, on pourrait se féliciter d’avoir exonéré les PME de la production du manuel des prix de transfert. Mais, en réalité, si l’on se réfère à la pratique des contrôles fiscaux qui touchent les filiales étrangères, l’inspecteur ne peut pas s’empêcher de réclamer la documentation des prix de transfert pour ces entreprises. Au lieu de nommer les documents, il va citer un certain nombre d’éléments qui y font référence», explique Arji Abdelaziz.

Il semble donc que les PME qui ne sont pas préparées à ce type de questions pourraient subir des redressements considérables, car l’inspecteur sera obligé de reconstituer les flux des échanges selon une méthode qu’il jugera équitable et conforme à la pratique de contrôle. «Mon conseil est que toutes les entreprises, quelle que soit leur taille, même si elles n’atteignent pas les seuils fixés, doivent absolument faire l’exercice de préparer la documentation des prix de transfert», avertit Arji. «Cet exercice est l’occasion de mettre à plat ces pratiques souvent établies de manière empirique, pour bâtir une vraie politique basée sur la réalité économique et financière du Groupe», conclut-il

 

Un allègement dommageable pour l’UE ?
Alléger les conditions de communication sur les prix de transfert pourrait être considéré par l’UE comme étant une mesure dommageable, ne respectant pas le principe d’équité fiscale. Cependant, avec la venue de cette crise au sein même de l’Europe, les conditions de communication sur les prix de transfert ont connu un allègement, ce qui justifie aussi pour le Maroc le droit d’appliquer les mêmes mesures et rester de la sorte en conformité avec les conditions imposées par l’OCDE en la matière.

 

 

 

 

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