Les dossiers des demandeurs de crédit immobilier sont le plus souvent rejetés ou ont besoin d’une surprime coûteuse.
Dans certains pays européens comme la France, un dispositif a été mis en place pour combler cette lacune.
Par C. Jaidani
L’acquisition d’un bien immobilier est le rêve de toute personne. Elle nécessite le plus souvent un crédit bancaire échelonné sur de longues années de remboursement, pouvant aller jusqu’à 30 ans. Outre la capacité financière ou la situation socioéconomique de la personne concernée, les organismes de financement exigent une assurance décès/invalidité. Pour bénéficier de cette couverture, les assureurs demandent un bilan médical. En cas de maladies graves ou chroniques, les compagnies rejettent le plus souvent le dossier ou, dans des cas moindres, elles fixent une surprime qui peut être très onéreuse. Plusieurs personnes ont été confrontées à cette amère expérience et n’ont pu, dans pareilles conditions, acquérir un logement.
«J’ai voulu acheter un appartement d’un montant de 1,6 million de DH (30% d’apport et 70% par un crédit bancaire). Pour souscrire une assurance-décès invalidité, la compagnie avec qui ma banque est conventionnée m’a invité à passer un examen médial chez un médecin mandaté par ses soins, du fait que le crédit dépasse 1 million de DH. J’ai rempli un formulaire englobant un questionnaire sur mon état de santé. Dans mes déclarations, j’ai affirmé que je suis diabétique et hypertendu et que je suivais un traitement permanent. Le médecin m’a demandé des analyses de sang et un test d’effort qui ont confirmé mes problèmes de santé. L’assureur a automatiquement rejeté mon dossier arguant que vu mon âge et mes maladies, je suis considéré comme une personne à risque aggravé. Il m’a conseillé de chercher une couverture chez un autre assureur. J’ai fait le tour du marché mais en vain», témoigne Hamid Rachidi, un cadre quadragénaire de Casablanca. Le cas de Hamid n’est pas isolé, selon les informations que nous avons pu recueillir.
Au Maroc, il n’existe aucune formule spécifiquement dédiée à ces personnes. On parle généralement de risque aggravé quand le risque de voir se produire l’événement garanti (invalidité ou décès) pour une personne déterminée est statistiquement supérieur à celui d’une population de référence. «Logiquement, une espérance de vie d’un cancéreux, d’une personne cardiaque, diabétique ou asthmatique est nettement inférieure à celle de la moyenne de la population. Le risque de décès ou d’invalidité s’aggrave avec l’âge. Il est donc tout à fait normal que ce genre de couverture soit plus coûteux par rapport à une garantie normale», explique Hicham Tanane, consultant en assurance à Casablanca.
«De peur que leur dossier de crédit soit rejeté, plusieurs personnes font des déclarations erronées sur leur état de santé et ne reconnaissent pas qu’elles sont atteintes de maladies chroniques ou graves. Dès que l’invalidité ou le décès survient quelques années après l’acquisition du bien immobilier, l’assureur refuse de rembourser la banque qui, dans cette situation, fait prévaloir ses droits hypothécaires», souligne Tanane. Outre les risques aggravés liés à la santé, d’autres couvertures peuvent être refusées par les compagnies à l’image des sportifs de haut niveau, les séniors ou les professions à gros risques comme les démineurs. Par le passé, cette situation a existé en France. Sous la pression des associations, de certains militants et aussi d’hommes politiques, un dispositif spécifique a été lancé. Il s’agit de la convention «s'Assurer et Emprunter avec un risque aggravé de santé». Elle permet un meilleur accès au crédit pour les personnes concernées. Tous les organismes signataires s’engagent à trouver des solutions d’assurance emprunteur, peu importe le problème de santé qui est présenté par le demandeur. Si l’état de santé du demandeur ne permet pas d’obtenir une couverture d’assurance aux conditions standard, alors cette convention est déclenchée.