Leila Doukkali, Présidente de l'Association des femmes chefs d’entreprise au Maroc (AFEM)
L’AFEM est mobilisée pour porter assistance à ses 300 entreprises membres.
Les secteurs les plus touchés sont le tourisme, la communication, l’événementiel et le commerce.
La présidente de l’Association, Leila Doukkali, fait le point.
Propos recueillis par C. Abounaim
Finance News Hebdo : Le Maroc passe par une période sanitaire et économique très critique qui a mobilisé tous les acteurs économiques nationaux. En quoi a consisté l'action de l’AFEM pour faire face à cette crise ?
Leila Doukkali : J’en profite aujourd’hui pour saluer toute la mobilisation et les initiatives prises afin de faire face à cette pandémie que personne n’a vue venir.
L’Association des femmes chefs d’entreprise au Maroc (AFEM), dans son rôle de soutien à sa communauté, s’est rapprochée dans un premier temps de ses membres à travers un questionnaire, afin de mesurer leurs préoccupations.
En tant que force de propositions, nous avons transmis ses conclusions à la CGEM afin qu’elle puisse les défendre auprès des pouvoirs publics.
Notre association a mis en place un comité de veille à l’écoute de toutes les mesures gouvernementales.
F.N.H : Votre association compte 300 TPME. Quelle évaluation faites-vous de la situation des entreprises en cette période ?
L.D : L’entrepreneuriat féminin a ses spécificités. Les principaux secteurs dans lesquels nous opérons sont les commerces et les services, touchés de plein fouet par les conséquences du Covid-19. C’est une période très compliquée car l’activité est à l’arrêt. Les TPME sont généralement plus vulnérables et les plus exposées à des fermetures.
La propagation de la pandémie impacte durement les entreprises dirigées par des femmes. Celles-ci, même pour le peu d’entre elles pouvant continuer partiellement leur activité, ont des problèmes organisationnels familiaux.
F.N.H : Concernant l’AFEM, quels sont les secteurs qui ont été le plus touchés et combien de postes sont-ils menacés ? Quel est le nombre d’entreprises qui ont fait appel à la CNSS pour la prise en charge de leurs employés ?
L.D : Pour les entreprises membres de notre association, les secteurs les plus touchés sont le tourisme, la communication, l’événementiel et le commerce.
L’une des principales préoccupations de la femme entrepreneure est la sauvegarde de ses salariés. Une majorité d’entre elles a fait appel au soutien temporaire de la CNSS pour une partie de ses salariés.
Les employés à gros revenus dans lesquels l’entreprise investit beaucoup, font partie du patrimoine de la société. Surtout dans le secteur des services. La subvention proposée par la CNSS (2.000 DH) est insignifiante. Nous avons d’ailleurs soulevé ce problème à la CGEM. Je salue donc la décision prise par le CVE lors de la réunion d’hier, consistant à exonérer le paiement de l’IR relatif au complément d’indemnités versées au profit des salariés dans la limite de 50% du salaire mensuel net.
F.N.H : En tant qu’association, comment avez-vous procédé pour aider les entreprises en question ? Y a-t-il des soutiens particuliers … de la CGEM, par exemple, dont vous faites partie ?
L.D : Nous sommes mobilisées afin d’être à l’écoute de nos membres. Nous les informons des mesures prises, organisons des réunions par vidéoconférences, et faisons des propositions spécifiques aux TPME à travers la CGEM. Parmi celles-ci, la possibilité d’octroyer un trimestre blanc fiscal, et veiller à ce que les agences bancaires où sont domiciliés les comptes des TPME, pour la plupart à vocation particuliers, apportent le soutien adéquat à la problématique de l’entrepreneur.
Enfin, nous insistons pour que la commande publique s’adresse à ces entreprises qui pourront se constituer en groupement.
F.N.H : Plusieurs mesures ont été prises par le gouvernement pour aider les entreprises en difficulté. Pensez-vous qu’elles sont suffisantes pour assurer la survie des TPME à moyen-terme ?
L.D : Toutes les mesures de soutien prises sont louables mais ne seront jamais suffisantes car la crise est profonde.
Sous l’impulsion de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, l’Etat joue un rôle de chef de famille. Il est à la hauteur de ses responsabilités pour apporter des alternatives au peuple marocain.
Mais toutes ces mesures ne pourront porter leurs fruits que si le citoyen est aussi pleinement impliqué.
F.N.H : Comment voyez-vous l'après crise ?
L.D : J’espère que cette crise permettra à chacune de nous de se réinventer et de se reconvertir. Le digital est un outil incontournable pour faire face à cette crise. Nous avons d’ailleurs participé ce matin à une conférence à ce sujet.
Nous serons davantage à l’écoute de nos membres pour leur apporter notre soutien.
L’après crise sera difficile au vu des indicateurs, mais l’engagement de tous réservera sans doute des opportunités en termes d’innovations pour surmonter cette étape.