Ils se dirigent vers des activités moins fluctuantes, qui assurent un revenu assez stable.
Pour les filières de pointe, il est difficile de trouver des profils qualifiés.
Par C. Jaidani
L’agriculture nationale a fait des pas de géant. Au cours de la dernière décennie, le secteur a amélioré significativement ses indicateurs. Cela est visible au niveau des investissements, la production, l’emploi et l’export qui n’ont cessé de progresser au fil des ans. Mais la sécheresse qui a sévi ces dernières années a porté un sérieux coup à l’activité. Elle a accentué l’exode rural qui, selon le hautcommissariat au Plan (HCP), s’élève à 152.000 personnes par an.
Cette population est pour la plupart composée de jeunes qui travaillaient dans l’agriculture. De nombreuses personnes ont quitté les campagnes vers les villes à la recherche de sources de revenus plus intéressantes et régulières dans des branches comme l’artisanat, le commerce, le bâtiment ou d’autres activités informelles. Du coup, les fermiers trouvent de plus en plus de difficultés à recruter les ouvriers agricoles nécessaires.
«Historiquement, tous les pays développés ont connu ce phénomène. Le manque à gagner au niveau du nombre des travailleurs a été compensé par le développement de la mécanisation. Ce qui n’est pas le cas pour le Maroc où l’utilisation des machines n’est pas généralisée, mais plus concentrée dans les exploitations modernes. De nombreuses fermes ont une superficie de moins de 3 hectares. Elles fonctionnent totalement ou partiellement grâce au travail non rémunéré des membres de la famille. Occasionnellement, elles font appel à des employés saisonniers lors de certaines périodes de l’année où il y a une forte charge de travail comme les récoltes», indique Mohamed Benamer, professeur universitaire spécialisé en économie rurale.
Et de poursuivre que «les revenus tirés de l’agriculture deviennent insuffisants pour assurer les besoins de la famille, poussant plusieurs de ses membres à la quitter à la recherche d’opportunités dans des villes plus attractives ou à immigrer à l’étranger». Outre les petites et moyennes exploitations, les grandes fermes modernes sont, elles aussi, impactées par l’indisponibilité de la main-d’œuvre. «Lors de la préparation de la campagne ou des moissons, certaines filières ont besoin de travailleurs en grande quantité, à l’image de la filière fruits et légumes. Les exploitants sont contraints de ramener des travailleurs d’autres régions, exigeant des salaires plus élevés», explique Benamer. En plus du nombre insuffisant des travailleurs, leur profil pose également de nombreuses contraintes pour les exploitants.
Différents investisseurs rencontrent des difficultés pour mener à bien leurs projets à cause de leur incapacité à maintenir une main-d’œuvre qualifiée. «Les profils spécialisés sont très demandés par une partie des exploitations modernes, tournées vers l’export. C’est le cas par exemple des contrôleurs de qualité ou des techniciens utilisant les nouveaux process de production, comme le digital ou les drones. Pour les séduire, il faut leur proposer un bon salaire et d’autres intéressements, notamment le logement de fonction, des primes de rendement et un plan de carrière», conclut Benamer.