Youssef El Alaoui, co-fondateur de Mobiblanc, et candidat à la présidence de l’APEBI pour le mandat 2020-2022
A quelques jours de l’AGO élective de la Fédération Marocaine des Technologies de l'Information, des Télécommunications et de l'Offshoring (APEBI), Youssef El Alaoui, co-fondateur de Mobiblanc, et candidat à la présidence de l’APEBI pour le mandat 2020-2022, revient pour Finances News sur les axes clés de son programme.
Propos recueillis par Momar Diao
Finances News Hebdo : Quelles ont été les principales réalisations de l'APEBI sous la présidence de Saloua Karkri-Belkeziz et vous en tant que vice-président général ?
Youssef El Alaoui : Nous avons su donner à l’APEBI la place d’interlocuteur privilégié de l’écosystème des IT au Maroc. Grâce au leadership de Saloua Karkri-Belkeziz, avec l’aide du travail de toute une équipe, notre association a gagné en crédibilité ces dernières années.
Au registre des principales réalisations durant le mandat passé, il y a lieu de citer la création du certificat de qualification professionnelle pour la formation des titulaires de Bac+3 scientifique, en partenariat avec l’Anapec.
A cela s’ajoutent l’adhésion du Maroc à Smart Africa et ainsi que l’élaboration du Livre blanc (recommandations paper).
F.N.H. : Pour les années à venir, quels seront les principaux défis de la branche des IT au Maroc ?
Y. E. A. : Aujourd’hui, la voix de l’APEBI compte. Tout l’enjeu sera d’œuvrer pour la prise en compte des recommandations de l’association dans les politiques publiques et les différentes stratégies relatives au digital. D’où la pertinence du slogan de ma candidature : «Agir ensemble pour créer l’impact économique durable».
Ce qui apparaît également comme principal défi au cours des années à venir, est le doublement du nombre d’ingénieurs marocains formés annuellement. L’intégration de la composante Open Innovation dans le fonctionnement des grandes entreprises et des administrations sera aussi un challenge de taille. L’enjeu est d’amener les grandes entités à travailler avec les start-up.
L’autre défi futur sera de favoriser la croissance dans le secteur de l’offshoring face à l’inflation des salaires et la pénurie des ressources humaines. Ce secteur doit garder sa position de leader en termes de création d’emplois dans la branche des IT au Maroc.
Toujours au niveau des challenges, il y a lieu de mentionner la nécessité de créer au moins un champion national au niveau de chaque gisement technologique (Big data, cybersécurité, etc.).
F.N.H. : Quel est le socle du programme que vous déroulerez avec votre binôme, une fois porté à la présence de l’APEBI pour le mandat 2020-2022 ?
Y. E. A. : Le profil de mon binôme qui est Abdellatif Tarhine et le mien sont complémentaires. Mon partenaire maîtrise les questions liées à l’e-gov et la réglementation de l’administration publique. Ce genre de compétence fera avancer rapidement les projets d’e-gov.
Notre programme se compose de quatre axes. Il s’agit de la promotion de la compétitivité de l’économie digitale, faire de l’APEBI un partenaire de la gouvernance du secteur, développer l’innovation et la création de valeur et enfin le renforcement de l’écosystème des services aux membres.
En définitive, une fois portés à la tête de l’APEBI, nous placerons notre mandat sous le signe de l’innovation dans la continuité, car j’ai tout de même été vice-président général de l’association au cours du mandat précédent.
F.N.H. : Le Maroc est mal placé dans le classement des Nations unies en matière d'e-Gov. Selon vous, quels sont les leviers à activer afin de rattraper ce retard ?
Y. E. A. : Il faut impérativement mettre en place une loi relative à la gouvernance des données dans notre pays. Ce qui facilitera l’échange de data entre administrations publiques. L’activité des projets structurants est également nécessaire (Gateway, Registre national de la population, etc.). A mon sens, l’interconnexion entre les administrations publiques et l’identification de la population constituent les bases de l’e-gov.
L’autre prérequis est la création de l’Observatoire du digital de l’administration et de l’entreprise rattaché directement à la primature afin de lui donner davantage de poids. Aujourd’hui, l’entité en charge de la gouvernance du digital est rattachée à un ministère. Ce qui est inapproprié pour fédérer les autres ministères ou administrations publiques.
L’essor de l’e-gov est aussi pénalisé par la carence d’infrastructures de haut débit. D’où la pertinence d’œuvrer pour le renforcement de la mutualisation des opérateurs télécoms en la matière. Cela contribuera à la baisse des coûts d’investissement pour l’acquisition de ce type d’infrastructures.
F.N.H. : Enfin, estimez-vous que l'écosystème des IT favorise-t-il suffisamment l'éclosion de start-up innovantes à même de développer des solutions adaptées à la réalité locale ?
Y. E. A. : Pour l’heure, l’écosystème affiche beaucoup de carences. Le caractère timoré de l’Open Innovation, comme mentionné plus haut, constitue un obstacle de taille pour l’émergence de start-up innovantes. Le mécanisme incitatif pour le développement de l’investissement dans les start-up n’est pas à la hauteur des enjeux.
L’investissement des grandes entreprises dans les start-up est certes défiscalisé mais le seuil des 200.000 DH est bas. Il faudra relever ce montant. L’autre grief est le retard accusé pour la mise en place du Start-up Act, qui devrait comporter plusieurs avantages pour les start-up et porteurs de projet. En termes d’investissement dans les entreprises innovantes, notre pays affiche des performances très timides.
Certains pays africains arrivent à près de 200 millions de dollars d’investissement dans les start-up contre seulement 5 millions de dollars au Maroc. Le cadre juridique des incubateurs est inapproprié. Ceux-ci sont traités comme des entreprises. Il faudrait défiscaliser davantage les incubateurs. ◆