Pétrole: comment gérer la flambée des prix

Pétrole: comment gérer la flambée des prix

Dans une posture délicate, le Maroc se retrouve pleinement exposé aux futures hausses des prix du pétrole, avec peu de possibilités pour en atténuer les impacts. La pénurie de l'offre ne fait que compliquer davantage la situation.

 

Par Y. Seddik

Phénomène mondial, la hausse des prix à la pompe prend des proportions inquiétantes à mesure que les prix du pétrole grimpent de manière significative. Pour les pays non producteurs, comme le Maroc, la variation des prix finit inéluctablement par se faire sentir sur le portefeuille des consommateurs, qui subissent coup sur coup des augmentations des prix à la pompe depuis le début du mois d'août. Pourtant, la dernière hausse de 50 centimes prévue pour le 15 septembre courant n'a pas été appliquée par les distributeurs, probablement en signe de solidarité envers la région d'Al Haouz, récemment touchée par un séisme.

Une trêve qui ne devrait pas durer longtemps, compte tenu de la flambée des prix du pétrole sur les marchés mondiaux. Aujourd’hui, les perspectives pour les 3 à 6 prochains mois sont loin d'être rassurantes. L'Agence internationale de l'énergie (AIE) prévoit une «importante pénurie de l'offre» de pétrole au quatrième trimestre de 2023. À partir de septembre, la diminution de la production des pays de l'OPEP+ engendrera un déficit d'approvisionnement significatif, ce qui laisse présager une nouvelle augmentation des prix de l'essence et du gazole. Mais ce n’est pas tout : l'AIE a prévenu d'un nouveau record de la demande mondiale de pétrole, avec une augmentation de 2,2 millions de barils par jour pour atteindre 102,2 mb/j. Et pour ne rien arranger, la Russie a annoncé des restrictions temporaires sur les exportations d'essence, visant à augmenter l'approvisionnement en carburants sur son territoire, ce qui pourrait potentiellement entraîner une hausse supplémentaire des prix à l’international.

Cette nouvelle est particulièrement préoccupante pour le Maroc, l'un des principaux importateurs de gazole russe. Rappelons que le Royaume a été le quatrième acheteur du gazole russe, avec des importations estimées à 68.000 tonnes métriques  durant les deux premières semaines  d’août, selon les données de Refinitiv Eikon. Il est essentiel de rappeler que les prix à la pompe affichés dans les stations-service intègrent deux composantes principales : le coût du produit pétrolier raffiné et la fiscalité. Il convient de noter que le carburant n'est pas indexé directement sur le baril brut, mais sur le «Platts».

Il s'agit du gazole raffiné, sans le prix du fret, déterminé par les cotations sur le marché de gros à Rotterdam (Pays-Bas). Outre ces facteurs conjoncturels, d'autres éléments structurels exercent une pression sur les prix du pétrole et, par extension, sur les prix des carburants. Parmi ceux-ci, on peut citer les coupes de production, l’embargo sur le pétrole russe, ainsi que la fermeture de grandes raffineries due à la baisse de la production et à la crise sanitaire. De plus, les raffineries russes sont en arrêt de maintenance, ce qui fait grimper les coûts de raffinage. En outre, sur les marchés des contrats à terme, la hausse résultant de la future réduction de la production de pétrole russe et saoudien est déjà intégrée dans les prix. Face à cette situation, le Maroc, en tant que pays nonproducteur dépendant à 100% des produits pétroliers importés, a peu d'outils à sa disposition pour contrer la montée des prix.

«Au niveau de la Samir, il n'y a plus de débat sur ce sujet. Son activation ne peut être plus évidente», explique Oussama Ouassini, expert en intelligence économique, à Finances News Hebdo dans l’émission Urgences Économiques. Signalons qu’après l’embargo de l’UE et grâce à ses raffineries, la Turquie importe du pétrole russe, le raffine puis le revend à l’Europe et les États-Unis en se faisant au passage des marges considérables. Oussama Ouassini propose également d'explorer des alliances avec des pays amis pour négocier un schéma de troc, tel que l'échange d'engrais ou de phosphates contre des produits pétroliers à un prix préférentiel.

D'autres solutions envisageables, selon l’expert, incluent l'accélération du développement de l'énergie solaire en utilisant les nouvelles technologies, ainsi que l'exploration de l'investissement dans l'énergie nucléaire, à l'image des centrales nucléaires flottantes développées par la Russie. En fin de compte, le Maroc doit se préparer à une crise pétrolière qui pourrait s'étendre sur au moins trois mois, voire plus. L'attente passive n'est pas une option viable. Il est temps d'investir dans des solutions plus durables et de diversifier l’approvisionnement énergétique. 

 

 

 

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