Génération Green : La sécheresse va-t-elle remettre en cause les objectifs du programme ?

Génération Green : La sécheresse va-t-elle remettre en cause les objectifs du programme ?

De nombreux exploitants sont en difficulté et songent à arrêter leurs projets.

De nouvelles mesures sont annoncées par le gouvernement pour soutenir le secteur.

Par C. Jaidani

L'agriculture continue d’être la locomotive de la croissance économique au Maroc. Avec le Plan Maroc Vert, le secteur a connu un véritable bond en avant tant au niveau du volume des investissements, de la valeur ajoutée, des emplois créés que des exportations. Capitalisant sur les réalisations du PMV, Génération Green, établi pour la période 2021-2030, veut donner un nouveau souffle au secteur à travers le soutien accordé aux jeunes entrepreneurs et l’émancipation de la classe moyenne rurale. Toutefois, la sécheresse qui persiste depuis six ans a perturbé sérieusement les différentes projections, poussant le gouvernement à revoir sa copie.

De nombreux initiateurs de projets ont différé leurs investissements ou ont décidé résolument de s’orienter vers d’autres activités moins risquées. Les témoignages recueillis auprès des nouveaux exploitants agricoles révèlent un mélange de déception et d’impuissance. Houssam Makroume, un jeune technicien agricole spécialisé dans l’élevage bovin, a jugé opportun d’investir dans un projet de vaches laitières. Il raconte les difficultés qu’il rencontre.

«Le démarrage s’est passé dans de bonnes conditions dans un terrain acquis par voie d’héritage dans la région des Zyayda, relevant de la province de Benslimane. J’ai déposé mon dossier, j’ai eu la possibilité d’obtenir toutes les formules possibles de soutien tant à l’achat des génisses que du matériel. Au lancement, les recettes couvraient largement les charges, y compris les crédits contractés, et je pouvais dégager une marge suffisante. Mais avec l’appauvrissement des parcours naturels et la hausse de l’alimentation de bétail sous l’effet de la sécheresse, la situation est devenue de plus en plus compliquée. J’arrive à peine à régler les différents frais, sans faire de bénéfice. Si cela persiste, je serais contraint de tout arrêter et liquider le projet», affirme-t-il.

Le cas de Makroume est similaire à d’autres exemples de jeunes qui ont choisi d’investir dans l’agriculture, mais qui ont dû déchanter à cause du manque d’eau. Hicham Ahrar est un jeune diplômé en comptabilité et gestion, mais qui a une passion pour l’agriculture. Il a profité des offres proposées par le programme Génération Green et a lancé un projet sur un terrain de 3 hectares dans la région de Berrechid.

«Je m’active dans la filière légumes, et plus particulièrement les produits les plus demandés (pommes de terre, oignons, courgettes, carottes…). L’activité présente un grand intérêt pour les jeunes investisseurs car le cycle de production est court, entre 4 à 6 mois. En plus, les récoltes sont facilement commercialisables, assurant des marges intéressantes. Mais cette branche ne peut donner de bons résultats qu’avec l’irrigation.

Avec la baisse de la nappe phréatique, le pompage à partir du puits de la ferme n’a cessé de baisser jusqu’à frôler actuellement le tarissement. J’ai fait une demande pour forer un nouveau puits, mais l’agence du bassin hydraulique a rejeté mon dossier, arguant la situation de stress hydrique que traverse le Royaume. Je ne sais quoi faire maintenant !», se désole Ahrar.

Conscient de ces enjeux, le gouvernement a pris de nouvelles dispositions pour faire face à la sécheresse. Il a annoncé récemment le lancement de projets structurants pour accélérer la construction des barrages afin d’augmenter la capacité de stockage de 6 milliards de m3 supplémentaires. Il s’agit aussi de créer des stations de dessalement d’eau de mer pour l’irrigation sur une superficie de 120.000 hectares, pérenniser l’irrigation dans certains bassins agricoles et créer de nouveaux bassins. Toutefois, les nouveaux projets ne pourront donner des résultats tangibles qu’en l’espace de 3 ou quatre ans, c’est-à- dire vers la fin de Génération Green (2021- 2030). Il est donc fort probable que le programme ne puisse atteindre ses objectifs.

 

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