CRI-CRUI : une réforme ajustée aux réalités locales

CRI-CRUI : une réforme ajustée aux réalités locales

L’adoption du décret-loi n°2.25.168 vient renforcer la réforme des Centres régionaux d’investissement (CRI) et des Commissions régionales unifiées d’investissement (CRUI). L’objectif central est de déployer un dispositif d’appui aux TPME, en phase avec les réalités économiques des territoires.

 

Par Désy M.

C'est une réforme que le gouvernement présente comme un levier clé du développement économique régional et de création d’emplois. Avec l’adoption du décret-loi n°2.25.168, récemment entériné par la Chambre des représentants, le Maroc parachève la refonte de ses Centres régionaux d’investissement (CRI) et de ses Commissions régionales unifiées d’investissement (CRUI). Mais audelà de l'ajustement juridique, ce texte révèle une ambition plus profonde celle de transformer l’investissement territorial en une réalité portée par les TPME locales.

Pour le professeur Hassan Edman, expert en économie, cette réforme s’inscrit dans le prolongement de la loi 47.18, tout en consolidant les avancées du chantier de la régionalisation avancée. «Ce texte instaure la mise en œuvre effective du dispositif d'appui aux TPE/ PME adapté aux spécificités des 12 régions du Royaume. Il matérialise une approche décentralisée du développement économique, respectant l'ancrage territorial de ces structures économiques», explique-t-il.

Il s’agit de rompre avec une logique descendante en matière d’investissement, au profit d’une approche décentralisée, construite sur les ressources, les dynamiques et les besoins propres à chaque territoire. Les CRI et CRUI voient ainsi leur rôle évoluer de simples guichets administratifs à de précieux moteurs d’accompagnement, chargés non seulement d’instruire les dossiers, mais aussi de créer un environnement favorable à la croissance des entreprises locales.

De ce fait, ils sont appelés à identifier les potentiels endogènes, qu’ils soient agricoles, artisanaux, touristiques ou industriels et à les valoriser. Pour cela, ils devront renforcer la coordination entre les acteurs économiques régionaux et les institutions publiques, condition indispensable à la réussite d’un développement inclusif. Avec un accompagnement technique, une simplification administrative et un accès au financement pour les TPME, «les politiques nationales d'entrepreneuriat sont désormais ajustées aux réalités locales», affirme Hassan Edman.

Les CRI pourront ainsi proposer des incitations ciblées en fonction du tissu économique régional, tout en assurant un suivi de proximité. Ce nouveau modèle donne une place centrale à l’entrepreneur local, avec un parcours d’investissement simplifié et coordonné via les CRUI. Bien que sa déclinaison régionale soit encore inconnue, la mise en œuvre de la réforme prévoit une synergie renforcée avec les autres dispositifs publics. Les TPME pourront s’appuyer sur l’expertise de l’Agence Maroc PME et d’autres organismes spécialisés. Le CRI deviendra, dans cette configuration, un acteur pivot qui relie l’État, les régions et les porteurs de projet. C’est aussi dans cette optique que les CRUI, jusquelà instances consultatives, sont désormais dotées d’un pouvoir décisionnel élargi.

«Diverses incitations régionales seront mises en place pour encourager l’implantation des TPME dans les zones à faible contribution dans le PIB national, tout en assurant leur viabilité économique», assure Edman. En conférant aux CRI et CRUI ce rôle central dans la relance territoriale, le Royaume offre aux TPME un tremplin pour devenir des vecteurs de transformation économique. Toutefois, comme toute réforme, celle-ci n’est pas sans défis. Infrastructures, capital humain et financement En effet, la réussite de cette réforme ne saurait reposer uniquement sur l’architecture institutionnelle. De nombreux défis restent à relever, notamment en matière d’équité territoriale.

«Plusieurs zones du Royaume souffrent encore d’un manque d’infrastructures essentielles, de services publics et de conditions attractives pour l’investissement», alerte le professeur Edman. L’enjeu est donc de combler ces disparités structurelles, en créant les conditions d’un véritable essor économique dans les régions à faible contribution dans la croissance économique.

Par ailleurs, l’efficacité de la réforme dépendra de la montée en compétence des acteurs régionaux. De nombreuses collectivités locales font face à des déficits en ressources humaines qualifiées, en outils de gestion modernes et en capacités budgétaires. Le renforcement institutionnel des régions devient alors une priorité. Cela passe par des mécanismes de transfert de compétences, mais aussi par des contrats État-Région clairs, dotés d’objectifs mesurables et de financements adaptés.

Pour y parvenir, Hassan Edman plaide pour une meilleure coordination entre la planification stratégique régionale et l’allocation des ressources budgétaires. Il appelle également à une approche orientée résultats, incluant une participation citoyenne accrue dans la définition des priorités économiques régionales. Car, selon lui, «seule une régionalisation bien appliquée, inclusive et adaptée, pourra garantir un développement équilibré et durable». 

 

 

 

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