La production locale n’arrive pas à combler les besoins du pays. Les professionnels du secteur appellent la tutelle à mieux contrôler le circuit de commercialisation.
Par C. Jaidani
Activité ancestrale profondément enracinée dans la tradition rurale, l’apiculture fait vivre des milliers de familles à travers toutes les régions agricoles du Royaume. Très apprécié des Marocains, le miel occupe une place de choix dans leur alimentation, avec une consommation moyenne estimée à 250 grammes par habitant et par an.
Selon les données du ministère de l’Agriculture, la filière compte près de 36.000 exploitants, dont les revenus dépendent totalement ou partiellement de cette activité. Elle joue un rôle socioéconomique non négligeable, générant environ 2,45 millions de journées de travail par an, pour une production annuelle de quelque 7.960 tonnes. Le chiffre d’affaires global atteint 1,1 milliard de dirhams, attestant du poids économique de ce secteur.
Grâce à la diversité naturelle et géographique du Maroc (chaînes montagneuses, plaines, zones désertiques), la production apicole nationale se distingue par la richesse et la variété de ses produits. Outre sa valeur alimentaire, le miel et les autres produits de la ruche sont de plus en plus utilisés dans les domaines cosmétique et pharmaceutique.
Pour développer la filière, le ministère de tutelle a pris une série de mesures dans le cadre du Plan Maroc Vert (PMV) et de Génération Green. Il s’agit de la labellisation et la promotion de certaines variétés en produits de terroir, à l’image du miel de thym et du miel de Zendaz issus de la région de Souss-Massa, ainsi que du miel de l’arbousier, produit dans la zone du Jbel Moulay Abdessalam, dans le nord du pays. La région de Tadla-Azilal se distingue par le miel de l’Euphorbe, qui existe également dans les régions sahariennes comme Guelmim. Il faut rappeler que le secteur a été confronté à différentes contraintes qui ont impacté son évolution.
«L’élevage apicole est lui aussi, comme les autres activités agricoles, vulnérable à de nombreux aléas. L’amenuisement des parcours naturels et du patrimoine forestier a eu un effet négatif sur le rendement des ruches. La baisse de la production a engendré une hausse des importations qui dépassent actuellement 2.200 tonnes/an. Ces produits, pour la plupart à bas prix, concurrencent sévèrement les produits locaux», affirme Hassan Bounboun, président du syndicat marocain des producteurs de miel.
Et de poursuivre : «Nous ne sommes pas contre les importateurs, mais contre la vente de produits qui ne répondent pas aux normes et qui, mélangés au miel local, sont revendus comme produit local. C’est un milieu où l’on trouve de nombreuses fraudes. Certains produits sont étiquetés bio alors qu’ils ne le sont pas. Les autorités concernées doivent assumer leurs responsabilités pour bien protéger les consommateurs contre ces mauvaises pratiques».
Selon Bounboun, «l’apiculture a été durement touchée par des maladies telles que la varroase, qui ont entraîné la disparition soudaine de nombreuses colonies d’abeilles. Pour y faire face, le ministère de tutelle a mis en œuvre un programme de lutte qui a permis d’atténuer partiellement les dégâts et de redresser, dans une certaine mesure, la situation. Cependant, la filière peine encore à retrouver sa vitalité d’antan. Elle reste confrontée à plusieurs obstacles freinant son développement. La présence d’intermédiaires dans le circuit de commercialisation perturbe les règles du marché et empêche les apiculteurs de tirer pleinement profit de leur travail. A ce titre, nous avons adressé plusieurs courriers au ministère de l’Agriculture, mais nos doléances sont restées sans réponse favorable».
Et de conclure que «l’apiculture présente des opportunités d’investissements très importantes. Son potentiel de développement n’est pas tout à fait bien saisi. C’est un secteur intéressant pour les porteurs de projet, mais il nécessite un savoir-faire et une maîtrise de toute la chaîne de valeur».