Conjoncture : L’économie marocaine face au risque géopolitique

Conjoncture : L’économie marocaine face au risque géopolitique

En décidant l'élimination du général Ghassem Soleimani, Donald Trump a ravivé le risque géopolitique.


 

Le regain de tensions au Moyen-Orient ravive le risque géopolitique sur l’économie mondiale.

L’économie marocaine, qui comptait se refaire une santé en 2020, est à la merci d’éventuels chocs externes.

 

Par A.E

 

Ce début d'année 2020 est décidément bien anxiogène, et le monde a les yeux rivés sur l'Irak où la tension entre les États-Unis et l'Iran est à son paroxysme.

L'économie mondiale, à peine sortie d'une année 2019 particulièrement éprouvante, marquée par la guerre commerciale que se livrent les puissances, les soubresauts du Brexit, et qui comptait sur 2020 pour se refaire une santé, bascule à nouveau dans l'incertitude.

Car, entre les déclarations incendiaires et les menaces des uns et les appels à la vengeance des autres, le pire n’est plus à exclure. Et le pire serait une déflagration mondiale. Un conflit généralisé à l’issue plus qu’incertaine, qui plongerait la région dans le chaos. Nous n’en sommes pas encore là, heureusement, mais le risque géopolitique plane plus que jamais sur l’économie mondiale.

Les marchés, après une année 2019 positive, suivent de près ce qui se passe à Téhéran et Washington. S’ils n’ont pas encore cédé à la panique, les principales Bourses mondiales n’ayant pas connu de krach au lendemain de l’élimination par les Américains du général iranien Soleimani, ils observent avec fébrilité la suite des évènements. Conséquence : l’or, valeur refuge par excellence, a vu ses cours propulsés sur des plus hauts de 7 ans, frôlant les 1.600 dollars l'once. Une tendance qui devrait se poursuivre aussi longtemps que l'incertitude demeure élevée, à en croire les analystes.

Les prix du pétrole, eux aussi, n’ont pas tardé à grimper en raison des craintes pour la production et les stocks. Aussitôt après l’élimination ciblée du général Soleimani à Bagdad, le cours du pétrole a bondi de plus de 4% et dépassé 69 dollars le baril. Il faut dire que la région est particulièrement sensible, avec le détroit d'Ormuz, par lequel transitent plus de 20% du pétrole mondial. Une escalade des tensions entre les USA et l’Iran pourrait accélérer la hausse de cours de l’or noir.

 

Maroc : Le rebond économique menacé ?

Sans jouer les Cassandres, un tel scenario serait un coup dur pour le Maroc et son économie, qui comptait bien se refaire la cerise en 2020, après une année 2019 moribonde.

Les dernières prévisions du haut-commissariat au Plan laissaient d’ailleurs entrevoir un redressement de l’activité économique nationale au cours du premier trimestre 2020, avec une croissance du PIB de 3,3% au lieu de +2,5% la même période une année auparavant.

Cette croissance serait principalement tirée par la consommation des ménages, qui progresserait à un rythme relativement plus soutenu qu’au trimestre précédent, portée par l’amélioration anticipée de l'offre de produits primaires dans un contexte de légère hausse des revenus des ménages, souligne le département de Ahmed Lahlimi.

La croissance hors agriculture serait tirée par les activités tertiaires, dont le rythme s’élèverait à +3,3% au lieu de +2,3% pour le secteur secondaire. La valeur ajoutée agricole devrait, quant à elle, progresser de 6,8%, en variation annuelle, sous l’hypothèse du retour d’une pluviométrie favorablement répartie sur les régions agricoles, notamment au cours des mois de février et mars 2020.

Pour le HCP, ce rebond relatif de l’activité économique bénéficierait d’un contexte international «moins pénalisant» pour l'économie nationale qu’au trimestre précédent, avec la dissipation des craintes de récession mondiale et l'apaisement des tensions commerciales entre la Chine et les Etats-Unis. Mais ça, c’était avant le démarrage de la crise irakienne.

Les derniers développements dans la région n’augurent d’ailleurs rien de bons : à l’heure où nous mettions sous presse, 22 missiles iraniens ont été tirés contre des bases abritant des Américains en Irak, faisant grimper d’un degré supplémentaire le risque géopolitique. On surveillera dès lors de près le comportement du pétrole.

Car une flambée des cours aurait des conséquences directes sur la facture énergétique, mais aussi sur la politique de change du Royaume : Abdellatif Jouahri, wali de Bank Al-Maghrib, a indiqué à plusieurs reprises que le passage à la deuxième phase de la flexibilité du Dirham, c’est-à-dire l’élargissement de la bande de fluctuation, serait accéléré en cas de chocs externes… ◆

 

 

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