Carburant: pourquoi les prix s’envolent ?

Carburant: pourquoi les prix s’envolent ?

Les prix affichés à la pompe reflètent l’évolution des cours à l’international.

Les niveaux de marge des distributeurs sur le gazole restent très limités et peuvent même être négatifs.

Plusieurs pistes sont envisageables pour alléger la facture pour le consommateur final.

 

En l’espace de deux mois, les Marocains ont dû payer 4 DH plus cher le litre de gazole, qui est passé de 10,22 DH le 1er février à 14,30 DH le 1er avril, soit un renchérissement de 40% avant de redescendre légèrement en fin de semaine dernière. Une augmentation exceptionnelle sur une période aussi courte avec un fait inédit : le prix du litre de gazole a dépassé celui du sans-plomb, bien qu’il soit davantage taxé.

Phénomène mondial, les prix des carburants poursuivent leur folle envolée sur fond de guerre en Ukraine qui a fait flamber les cours du pétrole. Pour les pays non producteurs (comme le Maroc), la variation des prix finit inéluctablement par se faire sentir sur le portefeuille des consommateurs. Vont-ils tenir le choc ?

En effet, les prix à la pompe affichés dans les stations-service intègrent deux composantes principales : le coût du produit pétrolier raffiné et la fiscalité. Il convient de noter que le carburant n'est pas indexé directement sur le baril brut mais sur le «Platts». Il s'agit du gazole raffiné, sans le prix du fret, déterminé par les cotations sur le marché de gros à Rotterdam (Pays-Bas).    

«Au début du mois, le Platts valait 1.200 dollars pour la tonne de gazole, contre 700 dollars environ fin 2021. La raison de cette hausse est que les acheteurs craignent un embargo européen sur le pétrole et donc ils se détournent du gasoil russe. Ils se rabattent sur du gasoil nord-américain ou du Moyen-Orient, faisant augmenter leurs prix par le jeu de l’offre et de la demande», nous explique un expert dans le domaine des hydrocarbures contacté à ce sujet.

Au Maroc, où l’on consomme quelque 12 millions de tonnes d'hydrocarbures par an, soit 250.000 barils/jour, la pression fiscale sur les prix du carburant (TVA et TIC) est de 37% sur le gasoil et de 47% sur le super. Cela signifie que lorsque le litre est vendu à 10 DH; 3,70 DH vont dans les caisses de l’État s'il s'agit de gazole et 4,70 DH s'il s'agit de l’essence.

«Cette pression fiscale est l'une des moins élevées au monde. En France, les taxes comptent approximativement pour 60% des prix de l'essence et du diesel à la pompe et jusqu’à 70% au Royaume-Uni», nous affirme l’expert. Notons que la TVA finale sur le produit est de 10% contre 20% pour certains pays de la région MENA.

Pour les pétroliers, à date d’aujourd’hui, le prix de revient du gazole tourne autour de 13,10 DH. 60 ou 65 centimes de différence avec le prix affiché à la pompe qui comprend les frais de transport et les marges. Ces dernières basculent entre positives et négatives d’une quinzaine à l’autre, mettant à mal les petits détaillants qui menacent de faire grève.

 

Baisser les taxes ?

La hausse brutale des prix à la pompe relance aussi le débat sur le niveau des taxes appliquées aux carburants, qui génèrent des revenus proportionnels aux prix. Le gouvernement par la voix de son ministre du Budget, Fouzi Lekjaa, a exclu tout recours à la révision de l’impôt pour faire face à la flambée des prix.

Pour notre interlocuteur «à long terme, la hausse du prix des carburants a plutôt un effet négatif pour les finances publiques. Elle augmente les coûts des entreprises et fragilise leurs investissements, tout en décourageant la consommation des ménages».

Au-delà de la baisse des taxes, d’autres pistes pour réduire ce fardeau sur le citoyen sont envisageables. Il s’agit pour notre expert de «réactivation en urgence de la raffinerie La Samir pour augmenter les capacités de stockage du Maroc». Cette dernière dispose d’une capacité de raffinage de 10 millions de tonnes par an et une capacité de stockage supérieure à 2 millions de m3. Au 11 avril, le stock de sécurité auprès des sociétés de distribution de carburant au Maroc couvrait 26 jours des besoins de consommation, contre un minimum requis de 60 jours.

Rappelons que le Porte-parole du gouvernement, Mustapha Baitas, avait indiqué que le dossier du raffineur est toujours entre les mains de la justice et qu'une action ne peut être entreprise par le gouvernement tant que le dossier n'est pas assaini.

L’autre possibilité citée par notre source est d’accorder une ristourne aux automobilistes, «je rappelle ici le cas de la France dont le gouvernement a accordé une ‘ristourne carburant’ de 15 centimes par litre, dès le 1er avril, et ce pour quatre mois»

 

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