Avec cette nouvelle hausse des prix, le pouvoir d'achat des ménages se dégrade de plus en plus. L'élimination des intermédiaires sur le marché est jugée indispensable pour stabiliser les prix.
Par M. Ait Ouaanna
Rebelote ! Une nouvelle vague inflationniste pointe le bout de son nez au Maroc. Entre la hausse exponentielle des prix des légumes, des viandes rouges, du poulet, du poisson..., particulièrement ressentie vers la fin de cette période estivale, le pouvoir d’achat des consommateurs marocains continue de s'effriter. Cette situation, maintes fois vécue ces dernières années, devient insoutenable pour bon nombre de familles vulnérables et à faible revenu, qui peinent de plus en plus à joindre les deux bouts.
Rien qu’entre 2020 et 2022, le pouvoir d’achat par habitant a connu une baisse annuelle moyenne de 0,22%, et ce en dépit d’une légère progression des revenus, révélait une étude du haut-commissariat au Plan (HCP), dont les résultats ont été publiés en mai dernier. Ce taux risque d’être plus important cette année, étant donné que les prix poursuivent leur trajectoire ascendante, sans aucun retour à la normale en perspective.
«Les augmentations de prix ont déferlé sur le marché marocain depuis fin 2022 et la vague créée ressemble à un tsunami qui a touché à tous les produits et services. Le citoyen marocain y vit et cherche à s'adapter en usant de tous les subterfuges pour boucler la boucle mensuelle. Le consommateur n'arrive plus à faire de l'épargne et recourt aux sociétés de crédits qui s'en délectent», s’insurge Bouazza Kherrati, président de la Fédération marocaine des droits du consommateur (FMDC). Rappelons dans ce sens qu’au cours du deuxième trimestre de l’année 2024, 42,1% des ménages ont déclaré s’endetter ou puiser dans leur épargne, selon une enquête menée par le HCP. Pis encore, 90,2% des ménages s’estiment incapables d’épargner dans les mois à venir et 82,6% déclarent une dégradation de leur niveau de vie.
Quid des disparités des prix ?
La hausse des prix est certes générale et concerne toutes les régions du pays mais à des niveaux inégaux. En effet, il n'est pas rare que les consommateurs remarquent des écarts de prix considérables entre villes ou même entre rues adjacentes, soulevant ainsi des interrogations quant à la régulation des prix. «A l'exception des produits réglementés tels que les médicaments ou encore les livres scolaires, ainsi que les produits subventionnés, à savoir le gaz, le sucre et la farine, tous les autres produits sont libres et le marchand peut vendre au prix qui lui semble bon. On peut trouver deux boutiques côte à côte et chacune afficher le prix qui lui convient. Seul l'affichage des prix est obligatoire», nous explique Kherrati.
Exonération de la TVA sur les médicaments, les fournitures scolaires et certains produits alimentaires, subvention aux transporteurs, aide sociale directe..., le gouvernement redouble d'efforts pour réduire l'impact de l'inflation sur le pouvoir d'achat des consommateurs, mais ses tentatives demeurent pour l'instant infructueuses. Pour le président de la FMDC, l'exécutif doit prendre les mesures nécessaires pour limiter la présence des intermédiaires sur le marché. Ces derniers étant en grande partie responsables de la flambée des prix.
«Plusieurs tentatives louables ont été entamées par le gouvernement pour soulager le pouvoir d'achat du consommateur, en commençant par des mesures fiscales qui malheureusement n'ont pas eu d'impact sur les prix et qui ont profité aux fournisseurs. En outre, malgré la baisse des prix à l'international, le Maroc continue de subir une hausse des prix au lieu de les voir diminuer ou stagner. Et pour cause, l'existence permanente sur le marché d'un intermédiaire qui tire profit des circuits de l'ensemble des filières sans qu'il apporte une quelconque plus-value. Ainsi, le gouvernement doit user de tous les moyens pour réduire ses interventions sur le marché».
Notons que dans le cadre du projet de Loi de Finances 2025, le gouvernement s'engage à poursuivre la mise en œuvre des mesures visant à atténuer les répercussions de l'inflation sur le pouvoir d'achat des citoyens. Dans ce sens, l'exécutif entend continuer à subventionner les biens et services essentiels, en particulier le gaz butane, le sucre raffiné et la farine nationale de blé tendre, en allouant environ 16,5 milliards de dirhams à la Caisse de compensation pour l'année 2025. De plus, il est prévu de poursuivre la mise en œuvre des mesures fiscales et douanières à caractère social visant à exonérer les produits de grande consommation.