Publiée au Bulletin officiel du 9 décembre 2022, elle annule et remplace la loi n°09.34 relative au système de santé et à l’offre de soins.
En attendant son entrée en vigueur, qui aura lieu après la publication des textes d’application, zoom sur ses nouveautés.
Par A. Diouf
Le Maroc est en train de basculer, lentement mais sûrement, vers un nouveau système de santé. Celui-ci est notamment porté par la loi n°06-22 relative au système national de santé. Laquelle a été élaborée conformément aux orientations du Souverain pour être en phase avec le chantier de la généralisation de l’assurance maladie obligatoire (AMO). Adopté par les deux Chambres du Parlement et publié au B.O du 9 décembre dernier, ce texte, composé de 34 articles, propose plusieurs nouveautés, à savoir :
• l’introduction d’un nouveau système de rémunération constitué d’une partie fixe et d’une partie variable;
• l’introduction d’un nouveau système de recrutement par contrat;
• l’élaboration d’un régime permettant aux professionnels de santé de travailler dans le privé;
• la création de la Haute autorité de la santé.
L’objectif général de la nouvelle réforme est de «faciliter l'accès des citoyens aux services de santé, d'améliorer la qualité de ces services et d'assurer une répartition égale et équitable de l'offre de soins sur l'ensemble du territoire national». Ce qui passe par l’adoption d’une bonne gouvernance, la valorisation des ressources humaines, la mise à niveau de l’offre sanitaire et la digitalisation de tout le système de santé.
Plusieurs nouvelles institutions en cours de création
En matière de gouvernance, la nouvelle loi vise le renforcement des mécanismes de régulation de l’action des acteurs, la consolidation de la gouvernance hospitalière et la planification territoriale de l’offre sanitaire. Au niveau stratégique, elle prévoit de créer la Haute autorité de la santé, qui va veiller à la continuité de l'action de l'État sur le plan sanitaire. Laquelle aura pour mission d'assurer l'encadrement technique de l'assurance maladie obligatoire et d'évaluer la qualité des services des établissements de santé des secteurs public et privé. La loi prévoit aussi la création d’une Agence des médicaments et des produits de santé et d'une Agence du sang et de produits dérivés du sang.
Au niveau central, toutes les missions, fonctions et organisation de l’administration centrale seront révisées. Alors qu’au niveau territorial, il est prévu de créer des groupements sanitaires territoriaux, qui seront chargés principalement de l’élaboration et de l’exécution du programme national au niveau des régions et du renforcement des mécanismes de coopération et de partenariat entre les secteurs public et privé. Concernant la valorisation des ressources humaines, une nouvelle loi sur la fonction publique sanitaire sera élaborée, en vue de motiver le capital humain dans le secteur public, réduire le manque actuel en ressources humaines, réformer le système de formation, ceci sans oublier l’ouverture sur les compétences médicales étrangères et l’encouragement des cadres médicaux marocains résidant à l’étranger à retourner exercer au Maroc.
Une plus grande facilitation de l’accès aux services médicaux en vue
S’agissant de la mise à niveau de l’offre sanitaire, cette action stratégique vise à répondre aux attentes des Marocains en matière de facilitation de l'accès aux services médicaux, améliorer leur qualité et assurer une répartition plus équitable des services hospitaliers sur l'ensemble du territoire national. C’est dans ce but que la loi n°06-22 va institutionnaliser l'obligation de respecter le circuit de soins, avec le passage en premier lieu par les établissements de soins primaires ou par un médecin généraliste, ainsi que de mettre constamment à niveau les structures sanitaires, notamment les établissements de soins primaires, lesquels devront servir de premier point de contact et d'orientation pour les patients. La loi prévoit également de mettre en place un système d'accréditation des établissements de santé de manière à garantir une amélioration continuelle de la qualité et de la sécurité des soins. Il y est aussi prévu de revoir la relation entre les secteurs public et privé à travers la signature d’un nouveau partenariat qui tient compte des spécificités du secteur de la santé et qui garantit la complémentarité et la synergie entre les opérateurs des deux secteurs quant à la mobilisation de leurs capacités et de leurs infrastructures.
En outre, pour développer l'offre en médicaments, le nouveau texte engage l'État à favoriser le développement d'une industrie pharmaceutique locale, promouvoir la production de médicaments génériques, définir les règles de sécurité et de qualité en matière de fabrication, d'importation, d'exportation, de distribution et de retrait des médicaments et à définir les conditions de sécurité des produits pharmaceutiques autres que les médicaments et certains dispositifs médicaux. En vertu de la nouvelle loi, l'État se voit également tenu d'assurer par tous les moyens à sa disposition la disponibilité du sang et de ses dérivés. Concernant la répartition de l'offre de soins, l'administration centrale sera appelée à élaborer un schéma sanitaire national déterminant les orientations générales y afférentes, à partir de l'analyse de l'offre disponible et en fonction des données géographiques, démographiques et épidémiques nationales.
En se basant sur ce schéma national, chaque groupement territorial de santé devra préparer un schéma régional de santé couvrant une période déterminée. Ce schéma devra inventorier l'ensemble des services de soins disponibles dans les secteurs public et privé, et déterminer pour le secteur public les mesures à prendre pour apporter une réponse aux besoins de la population en matière de soins et de services de santé au niveau régional. Et ce, en définissant les prévisions en termes de nombre d'établissements de soins et leur emplacement, le nombre de familles qui en bénéficieront, de spécialités demandées et d'équipements fixes et mobiles. Il devra aussi fixer les mesures à prendre pour assurer une cohérence et une équité dans la répartition géographique des ressources humaines et matérielles au niveau régional. Pour ce qui est de la digitalisation, enfin, elle va se matérialiser par la mise en place d'un système informatique intégré de la collecte, du traitement et de l'utilisation des principales informations liées au système de santé.