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Exposition : La CasaKobra de Zemmama

Exposition : La CasaKobra de Zemmama

Dans l'exposition «Casablanca vue d’en haut», organisée par Art First avec le soutien de la Fondation BMCI, à la galerie de l’American Arts Center, l'artiste Adnane Zemmama présente, jusqu'au 12 juin, une série de photos de la mégalopole.

Par R. K. H.

 

Inutile de se mentir, le nom de l'artiste, né à Casablanca en 1992 et installé à Marrakech depuis 2012, Adnane Zemmama, ne nous disait rien avant que l’on visite cette expo, riche, trapue, intense.

Le titre paraît tautologique, sinon peu inspiré : «Casablanca vue d’en haut». Mais une fois nos yeux plongés dans les photos qui la composent, on comprend qu’il n’a rien d’une évidence : Casablanca est tout entière, tordue, bousculée par Zemmama. Un peu comme si Miles Davis ou John Coltran avaient décidé d’appeler un album Jazz.

«Derrière mon objectif, j’ai tenté d’immortaliser Casablanca à ma manière, cette ville qui m’a vu naitre et grandir. J’ai voulu rendre hommage à la fois à sa singularité et à sa diversité. Du haut de ses bâtisses, témoins de notre histoire, j’ai souhaité apporter un nouveau regard sur la ville, loin du vacarme habituel de ‘Dar El Beida», souligne Adnane Zemmama.

Il s'était faufilé sur les toits des plus grands immeubles de la ville, allant droit au but : mettre en boite la grandeur de Dar El Beida avec ses bâtiments art déco qui surplombaient le centre-ville. Il avait obtenu les images recherchées, des détails de toits de zinc, des antennes paraboliques, des petites terrasses, des murailles en béton comme autant de paravents dans lesquels l'homme du XXIème siècle ne trouve pas d'échappatoire… Autant de points de vue peu communs que l'on regarde habituellement en contre-plongée, écrasé par le poids de l'histoire et la vision tenace des cartes postales.

Adnane Zemmama a surtout immortalisé le patrimoine architectural de Casablanca - véritable ville-musée à ciel ouvert. Il ne l’a pas capturé, mais il l’a plutôt cadré. Il a découpé des panoramas avec intelligence : suffisamment larges pour y faire entrer l'immensité grouillante et déshumanisée de la ville, et suffisamment serrés pour n'y inclure qu’une partie d’un ciel nuageux et sombre, signifiant ainsi par ces larges prélèvements des horizons bouchés et un aveuglement.

«J’ai sélectionné divers toits de la ville blanche, aux vues panoramiques. J’ai choisi la prise de vue en hauteur car elle offre ce sentiment de grandeur, de passage dans le temps du passé au présent», avance-t-il.

En éternel nostalgique, il a sublimé le paysage urbain et l'atmosphère rigide de l'architecture, en imposant ¬toute la gamme des noirs et des blancs, voire différentes nuances de gris. «Le noir et blanc procure un sentiment de voyage à travers le temps», explique-t-il.

Témoin de son temps, Adnane Zemmama nous a donné à voir des clichés bruts jamais brutaux, des images d'une infinie poésie… Immersion dans ce chaos qu’est Casablanca, le fantasme de la ville moderne marocaine et de sa déréliction. «Ces photos donnent, selon l’artiste photographe, l’opportunité de vivre et d’explorer la diversité architecturale et urbaine de la métropole marocaine».

On picore des yeux les façades étouffantes, esquissant l'âme de la ville photographiée, comme un corps dont il faut ausculter la respiration. A travers cette exposition - d’ailleurs sa première -, Adnane Zemmama a voulu «faire ressortir la beauté de chaque détail que nous offre Casablanca. Grâce à une texture et un grain de photo particulier, un sentiment intemporel se crée, rendant la photographie unique».

 

*Selma Naguib est la commissaire de cette exposition. 

 

«Casablanca vue d’en haut»
L’expo est accompagnée de témoignages audios. Chacune des personnes interrogées (Hatim Achbili, Brian Bexter El Glaoui, Frédéric Coconnier, Abdellatif Amghar) a témoignè de son vécu avec l’édifice en question (il s’agit de l’ancienne médina, de l’immeuble Glaoui, du cimetière chrétien Al Hank et de l’immeuble Liberté). Une immersion sonore, signée par le musicien et compositeur Joel Pelligrini, y est également prévue. Elle nous plonge au cœur du vacarme casablancais, son brouhaha, ses embouteillages, ses klaxons, ses marchands ambulants...

 

 

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