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Algérie: quel cirque !

Algérie: quel cirque !
 
L’Algérie a sombré dans l’absurde, il y a de cela plusieurs décennies. Le non-sens, l’aberration, l’illogisme, l’absence de raison, l’annihilation de toute logique ont toujours fait partie des pratiques du régime algérien, quel que puisse être l’homme aux commandes. Mais, c’est avec l’ère Bouteflika, que les choses ont pris une tournure, à la fois simiesque et dangereuse. Ridicule parce que les dirigeants algériens, toutes obédiences confondues, ont donné dans le spectacle. Menaçante, parce que les chefs algériens ont toujours préféré la guerre à la paix. Ils ont toujours privilégié le chaos à la stabilité.
 
Mais pourquoi affirmons-nous que c’est sous le règne de Abdelaziz Bouteflika que les choses ont dégénéré à ce point ? D’abord parce que ce dernier a toujours voué une haine viscérale au Maroc et à ses dirigeants. Son ennemi juré était Hassan II qui lui rabattait le caquet au propre et au figuré. Puis c’est autour de Mohammed VI qui a montré aux dirigeants algériens leurs failles, leur déshérence et leur incapacité de gérer et de mener un pays riche par ses ressources en matières premières vers un avenir meilleur. De l’indépendance en 1962   à nos jours, l’Algérie bat tous les records de la mauvaise gouvernance, de la précarité sociale, des crises qui se succèdent et se ressemblent.
 
Des failles qui plongent chaque jour davantage le pays dans un marasme qui  peut tout faire partir en fumée avec des populations écrasées et livrées à elles-mêmes, sous les yeux d’une dictature qui ne s’en cache pas. Pour illustrer nos propos voici le best off sur vingt  années de règne d’une minorité militaire. Depuis plus de 20 ans, le show Bouteflika,  a creusé les sillons d’une  guerre larvée que mène l’Algérie au Maroc à tous les niveaux, de manière frontale comme  dans les coulisses usant de tous les moyens  pour déstabiliser un Maroc droit dans ses bottes.  En effet, le règne de Abdelaziz Bouteflika a été émaillé de quelques épisodes d’anthologie que les annales ont gardés. Des faits  rares d’un pouvoir absolu.
 
Des moments inoubliables et surréalistes surtout. Des chapitres absurdes poussent aussi l’irrationnel dans ses confins les plus sombres. Le tout a culminé depuis que Bouteflika avait arboré son accessoire fétiche pour gouverner tout un peuple muselé, circulant dans un fauteuil roulant, hagard, hébété, absent. Avec une telle parodie, il a touché à un autre degré d’aberration et d’hilarité conjuguées. Vous vous souvenez de cette séquence où on lui offre un cheval ? Inoubliable. On fait venir un cheval pour l’offrir au chef de l’État, sauf que la bête n’a jamais vu le bonhomme.
 
Le cheval n’a eu droit qu’à la photo du président fantôme. Les sbires du régime de Bouteflika ont poussé la rigueur surréaliste à ses confins les plus improbables. On a mené le cheval, un peu paumé, sur cette estrade, entouré de généraux, de militaires de tous acabits et d’officiels impliqués et appliqués, vers une énorme image. Même le cheval a halluciné. Comment ? Quel affront ? On me dirige vers une image, mais où est le bonhomme ?  Il est où le président ? Ce que le cheval n’avait pas compris, c’est que quand on atteint ce stade de sainteté, on peut juste faire balader ses effigies un peu partout dans le pays et rester scotché à son fauteuil roulant comme un enfant avec son joujou.
 
Il y a aussi cet autre épisode tout aussi incroyable quand on a fait défiler l’énorme portrait du président malade Bouteflika pour les besoins d’un défilé militaire, en grandes pompes, avec tout le cérémonial de circonstance. Imaginez la scène qui est authentique : vous avez des deuxièmes classes par milliers et des officiers et des hauts gradés qui saluent un cadre qui passe.
 
Oui, on donne du garde à vous à une photo grandeur nature qui tient lieu et place de monsieur le président. Évidemment, dans les dictatures qui se respectent comme c’est le cas à Alger, le culte de la personne et les images monumentales font office de gouvernance, mais de là à faire entrer dans la foire, des animaux, Abdelaziz Bouteflika a dépassé tout le monde. Saddam, Kadhafi et les autres, ont été cloués au pilori. Il faut le dire, c’est une idée de génie de la part d’un président à vie, qui a dirigé un pays pendant 20 ans.
 
Celui qui a exigé qu’on l’appelle Sa grandeur monsieur le président, a poussé la symbolique tellement loin, que le jour où il signe sa démission, il est assis sur son accessoire mobile en gandoura grise. Le Comble de l’élégance et du respect pour ce peuple algérien qui a tant enduré et qui n’est pas encore sorti de l’auberge. Ce peuple qui a été méprisé par un Bouteflika coupé des réalités de son pays, grisé par le pouvoir, ivre de sa toute-puissance défaillante. On se rappelle de cette phrase terrible quand on l’avait installé pour présider le pays s’adressant à un journaliste étranger lui disant qu’il n’est pas là comme président pour élever le peuple et l’aimer.
 
Il ajoute en substance : si le peuple veut rester arriéré, il va le rester. Ce jour-là, il aurait fallu comprendre le rapport du bonhomme au pouvoir et à l’exercice de l’État. La même logique qui a guidé les Boumediene, les Ben Bella, les Ben Jdid et les autres. La même logique qui dicte ses lois à Abdelmajid Tebboune. Ce président qui  verse  aujourd’hui, lui aussi, dans des travers incroyables, multipliant les saillis et les bévues, poussant le ridicule dans des dimensions hilarantes.  
 
En 2021, malgré une grogne sociale qui dure depuis février 2019, avec un peuple qui dit stop, un peuple qui le dit de manière pacifiste, donnant une leçon à l’armée, aux généraux, aux sous-fifres du pouvoir algérien, au clan Bouteflika, aux islamistes qui sont en embuscade… et à d’autres services qui s’emploient derrière les rideaux pour fomenter le pire.  Le mot d’ordre pour ce peuple bafoué est simple : liberté et dignité, comme  ces Algériens la méritent. Ils ont assez accepté, ils ont assez enduré, ils ont assez donné, mais ils n’ont pas oublié les années noires, les 200 000 morts, les répressions à répétition et la confiscation des identités et de toutes les libertés individuelles. Ce cirque doit aujourd’hui plier bagage. Il n’y a plus de spectacle. Il y a une nouvelle page à écrire, et les Algériens vont l’entamer avec sérénité en mettant à l’échec une junte militaire sénile, un président télécommandé et des barbouzes dépassés par les événements. 
 
Mais la roue tourne, le rouleau compresseur de l’Histoire approche et risque d’écraser cette bande désaxée qui torture tout un peuple en le privant de tout.
 
 
 
Abdelhak Najib
Ecrivain-Journaliste
 
 
 

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