Les quelques jours qui ont précédé la réunion du Conseil de Bank Al-Maghrib ont été riches en pronostics sur la hausse ou non du taux directeur. La Banque centrale a finalement tranché, restant fidèle à sa politique monétaire accommodante afin de continuer à soutenir l’activité économique. Le taux directeur est ainsi maintenu inchangé à 1,50%. Et ce, alors que dans les grandes économies, les Banques centrales ont adopté une autre attitude, à savoir augmenter les taux directeurs pour faire face à l’inflation.
Face à toute cette agitation, BAM est donc restée sereine, justifiant ainsi ce statu quo : elle a déjà intégré dans ses prévisions l’impact des décisions prises dans le cadre de l’accord social du 30 avril 2022, et a tenu compte de la nature des pressions inflationnistes, essentiellement d’origine externe, et du retour prévu de l’inflation à des niveaux modérés en 2023.
C’est un choix de politique monétaire qui peut se défendre, mais résistera-t-il à cette conjoncture économique internationale particulièrement défavorable et, surtout, largement chahutée par la guerre en Ukraine ? Peut-on espérer que l’inflation reviendra à des niveaux dits «normatifs» à moyen terme ? Rien n’est sûr. Rappelons-nous du Conseil de Bank Al-Maghrib du mois de mars. La Banque centrale tablait alors sur une inflation de 4,7% en 2022, qui devait revenir à 1,9% en 2023. Sa composante sous-jacente augmenterait de 1,7% à 4,7%, puis décélèrerait à 2,6%. Depuis, les tensions sur les prix des produits alimentaires et énergétiques se sont visiblement accentuées.
Déjà, au cours des quatre premiers mois de l’année, les prix à la consommation ont connu une hausse sensible, avec une progression moyenne de 4,5% en glissement annuel. Et, selon BAM, cette tendance devrait se poursuivre à court terme, l’inflation devant atteindre, selon les projections de la Banque, 5,3% pour l’ensemble de cette année, avant de décélérer à 2% en 2023. Sa composante sous-jacente atteindrait 5,2% en 2022, puis reviendrait à 2,5% l’année prochaine.
La Banque centrale reste quand même très optimiste en tablant sur 2% l’année, surtout que, selon elle, «le renchérissement des matières premières, les goulets d’étranglement au niveau des chaînes de production et d’approvisionnement, ainsi que les tensions sur les marchés de travail dans certaines économies avancées continueraient d’alimenter les pressions inflationnistes».
En cela, il semble difficile de croire que l’on retombera en 2023 à un niveau d’inflation structurellement moins élevé ou égal à ce que le Maroc a connu ces 20 dernières années : l’indice des prix à la consommation a en effet évolué en dessous de la barre de 2,0% sauf pour les années 2002, 2006 et 2008, respectivement de 2,8%, 3,3% et 3,9%, nous apprend le haut-commissariat au Plan.
Par F.Z Ouriaghli