Aziz Akhannouch nous l’avait clairement dit : la majorité aux affaires a pour philosophie de «travailler plus et de parler moins». Le chef de gouvernement reste convaincu que c’est la bonne posture. Et n’a visiblement aucune intention de changer de fusil d’épaule. Croire que la meilleure façon de gouverner est de se murer dans le silence durant cette période délicate, où la conjoncture économique est particulièrement difficile et empreinte d’incertitudes, c’est se tromper lourdement. Entêtement coupable ?
Certainement. Car, aujourd’hui, plus que jamais, les Marocains ont besoin d’un chef qui leur parle, leur explique, les rassure, mais qui résout aussi leurs problèmes. Des problèmes pluriels mis à nu par une crise sanitaire qui dure depuis deux ans, et exacerbés par la sécheresse que connaît le Royaume et les répercussions économiques du conflit russo-ukrainien.
Mais les citoyens ont l’amère impression que Akhannouch ne prend pas vraiment la pleine mesure de la gravité de la situation actuelle. Rappelons quand même des données économiques factuelles importantes, qui doivent susciter autre chose que cette attitude passive du gouvernement : entre janvier et mars 2022, soit juste deux mois, nous sommes passés d’une prévision de croissance de 3,2% à 0,7%, doublée d’un taux d’inflation qui devrait s’établir à 4,27%. On frôlerait donc une seconde année de récession, après celle de 2020.
Cela est évidemment inquiétant. Car la récession doit rester un phénomène exceptionnel et non s’inscrire dans une certaine normalité. De plus, entre la flambée des prix des produits alimentaires et de ceux à la pompe, les citoyens voient leur pouvoir d’achat s’éroder considérablement. Pour seule réponse, le gouvernement a daigné accorder une aide financière ponctuelle aux transporteurs, visant à limiter les impacts de la hausse des prix du carburant au niveau national. Une aide qui sera cependant vite absorbée par le maintien des prix de l’énergie à l’international à un niveau élevé.
Et après ? Les transporteurs en voudront encore forcément plus. Comme d’autres secteurs d’ailleurs. Et pour s’acheter une paix sociale, l’Etat devra encore passer à la caisse. En réalité, le gouvernement a choisi de colmater les brèches au fur et à mesure que monte la colère sociale, au lieu d’apporter une réponse globale et des solutions transverses à une conjoncture qui lamine les agrégats macroéconomiques. Il fut un temps pas si loin où le Comité de veille économique (CVE) se collait à cette tâche justement. Et avec beaucoup d’efficacité, dans un contexte économique autrement plus délétère ! CVE, où es-tu ?
Par F.Z Ouriaghli