Opter pour l’agriculture de conservation, la réduction d’intrants chimiques et l’intégration de la technologie va aider les agriculteurs à produire de manière durable tout en luttant contre le changement climatique.
Par D. M.
Dans la lutte mondiale contre le changement climatique, le secteur agricole joue un rôle crucial. La refonte des modes de production agricole émerge comme une stratégie cruciale pour réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES) tout en assurant la sécurité alimentaire mondiale. Selon un nouveau rapport de la Banque mondiale intitulé «Recipe for a Livable Planet : Achieving Net Zero Emissions in the Agrifood System», cette transformation pourrait réduire jusqu’à un tiers les émissions mondiales de GES d’ici 2030.
Au Maroc, des initiatives novatrices telles que le programme Al Moutmir, lancé en septembre 2018 par l’OCP, témoignent de l'engagement croissant en faveur de pratiques agricoles plus durables et respectueuses de l'environnement, tout en maintenant la compétitivité du secteur. L'adoption de l'agriculture de conservation, avec son approche de zéro labour semi-direct, représente un «Game Changer» pour l'agriculture marocaine.
Cette transition vers des méthodes agricoles plus écologiques est un pilier essentiel pour réduire les émissions de gaz à effet de serre. L'agriculture de conservation favorise une perturbation minimale du sol, maintient une couverture permanente du sol et diversifie les espèces végétales, renforçant ainsi la biodiversité et les processus biologiques naturels. Cette approche non seulement améliore l'efficacité de l'utilisation de l'eau et des nutriments, mais contribue également à la séquestration du carbone dans le sol.
Selon Nadia Makraz, chercheur en phytopathologie et lutte intégrée, la réduction des intrants chimiques dans le processus agricole représente également une solution pour réduire les émissions de gaz à effet de serre. Parallèlement, les progrès technologiques offrent aussi de nouvelles opportunités pour rendre l'agriculture plus respectueuse de l'environnement et efficace. Des startups comme «Tourba» utilisent la modélisation et l'intelligence artificielle pour comprendre la séquestration du carbone dans le sol et son interaction avec différents types de culture. Grâce à l'Internet des objets (IoT) et à la collecte de données, ces technologies permettent d'analyser en temps réel ce qui se passe dans le sol, aidant ainsi à prendre des décisions éclairées pour une gestion agricole plus durable.
Fatiha Charradi, vice-présidente à l’UM6P et responsable au sein de l'écosystème OCP UM6P, souligne que «la séquestration du carbone est une question de technologie. En encourageant les agriculteurs à adopter des pratiques qui captent le CO2 dans le sol, nous pouvons favoriser une agriculture plus respectueuse de l'environnement et contribuer à l'atténuation du changement climatique; ce sera la meilleure des choses à faire pour la planète».
Le Maroc, bien que considéré comme un faible émetteur de GES à l'échelle mondiale, s'est fortement engagé dans la lutte contre le changement climatique. En ratifiant l'Accord de Paris et en développant sa Contribution déterminée au niveau national (CDN), le pays s'est fixé des objectifs ambitieux d'atténuation des émissions de GES et d'adaptation aux changements climatiques d'ici 2030. Les programmes de plantation d'arbres fruitiers et les initiatives de reforestation sont des exemples concrets de l'engagement du Maroc à renforcer sa contribution à la lutte contre le changement climatique. La refonte des modes de production agricole est une étape cruciale pour réduire les émissions de GES et construire un avenir plus durable.
Grâce à des pratiques agricoles innovantes et à l'adoption de technologies de pointe, le Maroc peut jouer un rôle de premier plan dans cette transition mondiale vers une agriculture plus respectueuse de l'environnement. A noter qu’au niveau mondial, selon les estimations, un investissement annuel de 260 milliards de dollars est requis pour réduire de moitié les émissions du secteur agroalimentaire d'ici 2030 et atteindre la neutralité carbone d'ici 2050. Ces investissements sont essentiels pour soutenir la transition vers une agriculture plus durable, tout en garantissant la sécurité alimentaire et la compétitivité du secteur.