Rachid Khayatey Houssaini, président de l’Association marocaine de la construction durable appelle à plus de soutien de l’Etat pour que l’écoconstruction ne soit pas un simple produit de niche.
Une construction sobre en énergie permet de faire des économies, aussi bien pour les ménages que pour l’Etat.
Finances News Hebdo : Quelles sont les dispositions que vous avez défendues en matière de construction durable ?
Rachid Khayatey Houssaini : Nous avons abouti à un texte sur la réglementation thermique devenu opérationnel. Le climat à Marrakech n’est pas celui du nord. Ce texte prend en considération l’emplacement régional de la construction. Un bâtiment au bord de la mer avec une forte humidité n’est pas le même que celui se trouvant à l’intérieur du pays, avec un climat sec et ensoleillé. Lors de l’élaboration de cette loi, l’objectif était de concevoir un texte climatique selon les spécificités et les exigences de chaque région.
L’Association marocaine de la construction durable (AMCOD) constitue une force de propositions. Nous sommes souvent amenés à animer des conférences et donner notre avis sur plusieurs questions relatives à la construction durable. Nous avons travaillé en étroite collaboration avec la Fédération nationale des promoteurs immobiliers (FNPI) pour lancer le label «Iltizam», dont certaines clauses font référence au respect de l’environnement.
F.N.H. : Pensez-vous que l’arsenal juridique actuel est suffisamment incitatif pour développer la construction durable ?
R. K. H. : Il est très insuffisant. Il existe des mesures obligatoires, mais pas d’incitations comme cela se fait dans d’autres pays. La loi doit comporter des clauses qui soutiennent l’environnement dans l’acte de bâtir. Il faut dire qu’il existe une prise de conscience chez les décideurs et les professionnels du secteur du bâtiment.
Les questions relatives au réchauffement climatique, à la réduction des émissions de gaz à effet de serre, à la consommation excessive d’énergie fossile et, plus généralement, à la nécessité d’adopter des modes de vie plus conformes à la notion de développement durable, sont de plus en plus présentes dans les décisions, les analyses et affectent la plupart des secteurs d’activité et de développement.
F.N.H. : Le marché marocain est-il demandeur de produits répondant aux normes écologiques ou au contraire les offres existantes se basent plus sur l’effet d’annonce et marketing ?
R. K. H. : Actuellement, le consommateur est regardant sur le niveau de consommation d’énergie. Comme il le fait pour une voiture, un réfrigérateur ou un climatiseur, il doit aussi le faire pour une maison. Une construction sobre en consommation d’électricité permet de faire des économies, aussi bien pour les ménages que pour l’Etat. Plus nous consommons, plus nous avons besoin d’infrastructures de production, de distribution et aussi de moyens pour les entretenir et les rendre toujours opérationnels.
Il est donc important de sensibiliser les acquéreurs à s’intéresser à ce genre de produits, qui permet d’utiliser moins de chauffage ou de climatisation et réduit sensiblement la consommation d’électricité. Il faut retenir aussi que l’offre doit suivre et l’écoconstruction ne doit pas être seulement une niche ou spécifique à un segment particulier.
F.N.H. : Les corps de métiers opérant dans le secteur sont-ils sensibilisés à l’acte de bâtir préservant l’environnement ?
R. K. H. : La construction durable est une préoccupation internationale. Le Maroc doit s’inscrire dans cette tendance. Il est donc nécessaire de développer un cadre juridique et réglementaire encore plus étoffé.
Je suis promoteur mais aussi architecte et je peux confirmer que plusieurs professionnels de notre activité ont développé une certaine fibre écologique.
Certes, les opérateurs suivent les tendances du marché où le coût de la production et les prix jouent un rôle déterminant, mais cela n’empêche qu’il est possible de se démarquer par une offre innovante, qui préserve l’écosystème et qui assure une économie d’énergie. Il est nécessaire de rendre la construction durable la règle et non l’exception. ◆