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Réglementation des changes: «Une logique d’assouplissement progressif»

Réglementation des changes: «Une logique d’assouplissement progressif»

Lors de l'élaboration de la nouvelle Instruction, l'Office des changes s'est penché sur les mécanismes pratiques et les solutions innovantes à mettre en place.

Un ensemble de mesures complètes et concrètes a été adopté pour accompagner et soutenir le tissu productif national et donner une forte impulsion aux entreprises, avec un effort particulier en direction des start-up.

Entretien avec Hassan Boulaknadal, Directeur de l’Office des changes.

 

Propos recueillis par M. Diao

 

Finances News Hebdo : L’Instruction générale des opérations de change 2022 (IGOC) prévoit, entre autres, le relèvement à 200 millions de dirhams du plafond autorisé pour tout investissement marocain à l’étranger. Qu’est-ce qui a motivé cette nouvelle réglementation ?

Hassan Boulaknadal : La réglementation des changes est inscrite dans une logique d’assouplissement progressif permettant à l’économie nationale de s’ouvrir sur son environnement et à ses acteurs de s’adapter aux exigences d’un marché mondial en constante évolution. S’inscrivant pleinement dans le cadre de la politique économique du Royaume visant le soutien de l’acte d’investir, d’entreprendre, les nouvelles dispositions de la réglementation des changes accompagnent la dynamique de reprise économique en permettant aux opérateurs économiques de saisir les opportunités qui se profilent au niveau international. Dans cette lignée, le relèvement du plafond des investissements marocains à l'étranger à 200 millions de dirhams vise à encourager les entreprises marocaines à s’ouvrir sur l’international, à explorer de nouveaux horizons, à conquérir de nouveaux marchés et à contribuer, in fine, au rayonnement du Royaume sur la scène internationale. Il faut rappeler qu'avant 2007, les opérations d'investissements à l'étranger par les entreprises marocaines étaient soumises à l’accord préalable de l’Office des changes. En 2007, l’Office des changes a, ainsi, autorisé pour la première fois, les personnes morales résidentes, à transférer jusqu’à 30 millions de dirhams par an, en vue du financement de leurs investissements à l'étranger. En 2010, ce plafond a été relevé à 100 millions de dirhams pour les investissements à réaliser en Afrique et à 50 millions de dirhams pour ceux réalisés dans les autres continents. En 2022, l'Office des changes a poursuivi ses efforts d'assouplissement et de libéralisation en procédant au relèvement à 200 millions de dirhams du plafond autorisé pour tout investissement marocain à l’étranger et ce, quelle que soit la juridiction.

 

F.N.H. : Parmi les nouveautés phares de l’IGOC 2022, figurent les facilités en faveur du développement des start-up nationales, répertoriées par l’ADD aussi bien en matière d’investissement à l’étranger qu’en matière d’importations de services réglées par carte de paiement, en portant le montant à 1 million de dirhams (contre 500.000 dirhams auparavant). Qu’est-ce qui légitime ce relèvement substantiel de plafond ?

H. B. : Lors de l'élaboration de la nouvelle Instruction, l'Office des changes s'est penché sur les mécanismes pratiques et les solutions innovantes à mettre en place pour permettre à la réglementation des changes de se mettre au diapason des évolutions de l’heure et de se réinventer face aux évolutions profondes et accélérées qui caractérisent l’économie marocaine autant que son environnement. Avec la publication de l'IGOC 2022, la réglementation des changes a opéré une véritable mue et a retrouvé une pertinence nouvelle. Un ensemble de mesures complètes et concrètes a été adopté pour accompagner et soutenir le tissu productif national et donner une forte impulsion aux entreprises, avec un effort particulier en direction des start-up. Les nouvelles dispositions apportent un appui inégalé aux start-up nationales en mettant en place des facilités en leur faveur. En effet, l'IGOC 2022 a considérablement assoupli les conditions d’investissement à l’étranger pour les jeunes entreprises innovantes répertoriées par l’Agence du développement du digital (ADD). Ces entités sont, désormais, autorisées à investir à l’étranger. Dans le même ordre d'idées, la nouvelle Instruction a relevé à un million de dirhams le plafond autorisé pour le règlement, par carte de crédit internationale, des importations de services effectuées par les entreprises susvisées. Ce plafond était limité à 500.000 dirhams. Pertinentes et visionnaires, ces mesures se veulent un levier efficient et structurant pour accompagner l'émergence et le développement des start-up et pour remettre l’économie sur la voie de la création de valeur et de croissance.

 

F.N.H. : D'un montant de base de 100.000 dirhams par an et d’un montant total qui ne doit pas dépasser 300.000 dirhams par personne et par année, la «dotation voyages personnes physiques» peut être majorée de l’équivalent de 30% de l’IR. Quels sont les principaux objectifs visés par cette mesure contenue dans l’IGOC 2022 ?

H. B. : Parmi les mesures phares introduites par l'Instruction générale des opérations de change 2022, figure la mise en place d’une dotation globale pour les voyages personnels. «La dotation pour voyages personnels» est destinée au règlement des dépenses relatives aux voyages personnels à l’étranger de toute nature : touristique, Omra et Hajj pour soins médicaux, etc. D'un montant de base de 100.000 dirhams par an, «La dotation pour voyages personnels» peut être majorée de l’équivalent de 30% de l’IR. Le montant total ne doit pas dépasser 300.000 dirhams par personne et par année. Il est à préciser qu'il ne s'agit pas d'une nouvelle dotation, mais bien d'un regroupement de l'ensemble des dotations accordées auparavant aux personnes physiques pour une meilleure flexibilité et un meilleur accès aux devises étrangères. Ce regroupement a été dicté par le souci de faciliter l'accès des citoyens aux devises étrangères pour couvrir les dépenses relatives à leurs déplacements à l'étranger. Cette démarche permettra, également, de simplifier le traitement au niveau des banques et des points de change. Il est à souligner à ce sujet que l’un des objectifs majeurs recherchés à travers ces mesures est de lutter contre le marché parallèle des devises et d’inciter les citoyens à recourir au marché officiel en toute sécurité.

 

F.N.H. : De manière générale, l'IGOC apporte beaucoup de souplesse aux opérateurs. Est-ce un signal sur une situation «trop» confortable de nos réserves en devises ?

H. B. : Il est clair qu'en termes de relance de l'activité économique, l'accompagnement des opérateurs économiques et l’amélioration du climat des affaires s’imposent, aujourd'hui, en tant que leviers incontournables pour redynamiser le tissu économique national et maintenir l’élan de reprise observé ces derniers mois. Et il semble évident, également, que la relance de l'économie nationale ne pourra se faire sans des mesures d'accompagnement et de soutien concrètes, orientées vers les opérateurs économiques. Actuellement, l’économie marocaine se remet progressivement de l'impact de la pandémie. En effet, le redressement de l’activité économique est perceptible au niveau des principaux indicateurs des échanges extérieurs à fin novembre 2021 : hausse des exportations de 53,8 Mds de DH par rapport à fin novembre 2020, des recettes IDE de 2,5 Mds de DH, des transferts MRE de 25,2 Mds DH… Dans ces conditions, les avoirs officiels de réserve se sont renforcés à 331,2 milliards de dirhams au 31 décembre 2021, représentant une couverture de plus de 7 mois d’importations de biens et services. Cette situation est de nature à assurer au marché national une offre en devises non négligeable lui permettant de faire face à tout choc externe sur la balance des paiements.

 

F.N.H. : Quelle est la situation de la position extérieure globale (PEG) du Maroc à fin septembre 2021 ?

H. B. : Dans un contexte de crise sanitaire liée au covid-19, la position extérieure globale du Maroc affiche une situation nette débitrice de 767 Mds de DH à fin septembre 2021 contre -759,9 Mds de DH à fin juin 2021. Cette situation résulte de la hausse simultanée des encours des engagements financiers (+25,7 Mds de DH) et des avoirs financiers (+18,7 Mds de DH) : - La hausse des engagements financiers est conséquente, principalement, de l’accroissement de l’encours des investissements directs étrangers au Maroc de 13 Mds de DH et celui de la composante «autres investissements» de +11,9 Mds de DH. - La progression de l’encours des avoirs financiers s’explique, essentiellement, par la hausse de 17 Mds de DH des avoirs de réserve.

 

F.N.H. : Au cours de ces dernières années, quels ont été les principales faiblesses et les points forts de la PEG du Royaume ?

H. B. : D’abord, je voudrais préciser que la position extérieure représente le patrimoine net d’un pays vis-à-vis du reste du monde. Sa structure est décomposée en cinq catégories fonctionnelles, à savoir : investissements directs, investissements de portefeuille, dérivés financiers, autres investissements et avoirs de réserve. Dans notre pays, la position nette débitrice en investissements directs constitue le principal poste débiteur de la position extérieure suite à l’importance de l’encours des investissements étrangers au Maroc par rapport à l’encours des investissements marocains à l’étranger (578,8 Mds de DH à fin 2020 contre -576,6 Mds de DH à fin 2019). A titre d’information, à fin décembre 2020, l’encours des investissements directs étrangers représente 52,8% du stock global des engagements financiers contre 54,7% à fin décembre 2019. De même, l’encours des investissements des non-résidents en titre marocains est plus important que celui des encours des investissements des Marocains en titres étrangers. De ce fait, la position nette des investissements de portefeuille est débitrice (-119,4 Mds de DH à fin 2020 au lieu de -101,5 Mds de DH à fin 2019). S’agissant de la position nette en instruments financiers dérivés, vis-àvis des non-résidents, celle-ci s’établit à -42,3 MDH à fin 2020 contre +72,9 MDH en 2019. Cette évolution résulte d’une hausse des engagements plus importante que celle des avoirs. La rubrique «Autres investissements» représente la deuxième grande catégorie fonctionnelle des engagements financiers du Maroc vis-à-vis du reste du monde après celle des investissements directs. En 2020, sa position affiche un solde débiteur de 354 Mds de DH contre 335,8 Mds de DH une année auparavant. Enfin, pour l’encours de la rubrique «Avoirs de réserve», celui-ci enregistre une hausse de 67,2 Mds de DH (320,6 Mds de DH en 2020 contre 253,4 Mds de DH une année auparavant).

 

 

 

 

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