«Une appréciation rapide du Dollar américain peut faire baisser le cours du pétrole jusqu'à un niveau inférieur à 20 dollars», selon Morgan Stanley. La Banque d'affaires américaine n'est pas la première à s'avancer sur un tel scénario, mais les raisons évoquées sont différentes des autres. Explications.
Les analystes de Morgan Stanley expliquent dans une note de recherche parue le 11 janvier que l'excès d'offre sur les marchés internationaux devait théoriquement «faire baisser les prix du pétrole jusqu'à 60, voire 55 dollars, pas plus». Or, la différence avec les cours actuels (31 dollars ce matin) proviendrait de la hausse du Dollar américain, monnaie dans laquelle est libellé le pétrole. Selon Morgan Stanley «toute hausse de 5% du Dollar peut faire perdre entre 10 et 25% au pétrole».
Le pétrole a déjà perdu 11% en 2016, passant sous ses plus bas de 2015. L'OPEP avait décidé en décembre de ne pas réduire sa production, alors que les stocks américains restaient supérieurs à leur moyenne sur cinq ans de plus de 100 millions de barils.
Par ailleurs, les analystes de Morgan Stanley estiment que le Dollar devrait encore augmenter de 3 à 3,5% face aux autres monnaies à cause, entre autres, des risques en Chine et de la FED. De quoi faire baisser le pétrole jusqu'au niveau de 20 dollars. Et d'ajouter que «Si d'autres monnaies majeures évoluent dans le même sens du Dollar, le cours du brut pourrait encore baisser sous les 20 dollars».
Morgan Stanley n'est presque pas précurseur
Les premiers à avoir annoncé une telle cible pour le pétrole sont les analystes de Goldman Sachs. C'était au premier trimestre 2015. Ils avaient d'ailleurs prévu une baisse jusqu'à 20 dollars, le temps que les stocks atteignent leur maximum, de quoi obliger certains producteurs à stopper leur activité. En d'autres termes, Goldman Sachs justifie cette baisse par les fondamentaux de l'offre et de la demande. Cette nouvelle vision offerte par Morgan Stanley donne plus d'importance aux corrélations inter-marchés (Dollar Vs pétrole). «Le pétrole pourrait atteindre les 20 $ en 2016, mais pas pour les raisons souvent citées», a déclaré Morgan Stanley. «Cela ne concerne pas la détérioration des fondamentaux».
Des dommages collatéraux
Pour beaucoup d'économies émergentes, 2016 apportera son lot de déceptions à cause de la baisse du pétrole. Dans une étude publiée le 12 janvier, des économistes interrogés par Bloomberg estiment que l'économie du Venezuela, basée essentiellement sur l'exportation du pétrole, devrait se contracter de 3,3% cette année. «C'est la pire prévision des 93 pays qui entrent dans notre univers d'analyse», estime Bloomberg. Le classement des 10 pires prévisions de croissance pour 2016 contient 4 exportateurs de pétrole, dont la Russie, classée troisième. Les économistes évaluent ses chances de récession au cours des 12 prochains mois à 60%.
Adil Hlimi