◆ La loi relative au financement collaboratif est dans les starting-blocks.
◆ Entrepreneurs, spécialistes et pouvoirs publics sont unanimes : le financement collaboratif aura des retombées positives sur l’entrepreneuriat au Maroc.
Par B. Chaou & Y. Seddik
La loi sur le Crowdfunding est dans les derniers rouages du circuit législatif. Le 1er février, en présence du ministre de l’Economie et des Finances, Mohamed Benchaâboun, le projet de loi 15-18 régissant le financement collaboratif a été adopté, en deuxième lecture, par les membres de la Commission des finances et du développement économique de la Chambre des représentants. Il faut dire que le financement a toujours été le gros frein à l’entrepreneuriat au Maroc.
Le financement collaboratif était présenté comme solution, mais le cadre réglementaire faisait encore défaut. Ce cadre, dont le vote final est attendu bientôt en séance plénière au Parlement avant publication au B.O, devra contribuer notamment à la mobilisation de nouvelles sources de financement au profit des TPME et des jeunes porteurs de projets innovants. Rappelons que le financement collaboratif consiste en la collecte de petites sommes d’argent auprès d’un grand nombre d’individus ou d’institutions pour financer des projets définis.
Cette technique permet de contourner les intermédiaires financiers traditionnels (banques, associations de microcrédit…) et d’utiliser des plateformes pour mettre en relation directe les porteurs de projets et les contributeurs.
En 2020, année de crise, les levées mondiales via le Crowdfunding se chiffraient à 34 milliards de dollars contre 1,5 milliard de dollars en 2011. Elles devraient atteindre quelque 140 milliards de dollarsen 2022. C’est un marché qui se développe de manière exponentielle, surtout dans les pays asiatiques qui connaissent des taux de croissance avoisinant les 200%.
Bouffée d’oxygène pour les autoentrepreneurs
Au Maroc, la mise en place d'un cadre juridique vise à renforcer l'inclusion financière des jeunes porteurs de projets, à appuyer le développement économique et social et canaliser de l'épargne collective vers de nouvelles opportunités. Pour le ministre des Finances, «le mode de financement collaboratif devrait avoir des retombées positives, au vu des différentes expériences réussies à travers le monde, particulièrement en ce qui concerne le financement des petits et moyens projets».
Zakaria Fahim, président de l’Union des autoentrepreneurs du Maroc, indique pour sa part que «nous sommes très satisfaits de cette nouveauté qui permettra sans aucun doute de doter les auto-entrepreneurs d’un nouveau véhicule de financement innovant et adapté à leurs besoins. Le financement collaboratif permettra de leur offrir un accès au capital auquel ils n’ont pas nécessairement accès via le circuit de financement classique».
«Il faut d’ores et déjà commencer à sensibiliser les gens sur l’importance du crowdfunding, et entamer la réflexion sur la mise en place de plateformes sécurisées et efficaces, afin de permettre l’émergence de ce véhicule de financement», ajoute-t-il.
Une réglementation bien ficelée
La réglementation relative à ce mode de financement a tardé à voir le jour (la première mouture de la loi ayant été finalisée en 2018). Toutefois, à travers les 78 articles, le législateur a élargi le champ juridique en touchant tous les aspects, des dispositions communes jusqu’aux sanctions. D’autant qu’à travers ce type d’activité, l’épargne citoyenne est très sollicitée.
Aujourd’hui, le texte intègre les conditions et procédures relatives à la création des sociétés gestionnaires de plateformes de financement collaboratif (PFC), notamment en ce qui concerne l’octroi d’agrément par Bank Al-Maghrib pour les activités de prêt et de dons ou par l’AMMC pour les activités d’investissement en capital. Également, il clarifie les engagements et les obligations des sociétés de financement collaboratif, notamment en matière d'information du public, de publicité, de reporting,...
Point important : une attention particulière est portée sur les règles à respecter en matière de vérification préalable des projets à financer, de sécurisation des transferts et de protection des contributeurs (petits épargnants dans la majorité des cas).
Au final, l’intérêt du Crowdfunding pour le Maroc ne se limite pas à des impacts sur son développement national. Il lui offre tout autant l’opportunité d’être un pionnier et un leader de cette nouvelle industrie à l’échelle africaine. D’ailleurs, Benchaâboun avait affirmé que «le Maroc est l’un des premiers pays en Afrique et au Moyen-Orient ayant mis en place un cadre juridique régissant les activités de financement collaboratif»