- Face à la flexibilité du régime de change, la perception des risques va changer chez les opérateurs.
- Ces derniers dénoncent la cherté des instruments de couverture.
La flexibilité du régime de change est enfin une réalité. Une nouvelle étape de franchi dans le processus de libéralisation de l’économie nationale, mettant sur le qui-vive importateurs et exportateurs dont les marges bénéficiaires vont désormais fluctuer au gré de la volatilité du Dirham.
Si ces derniers étaient quasiment couverts sous le régime de change fixe, aujourd’hui, ils entament un nouveau virage.
«Auparavant, la fixité du Dirham contre son panier de devises donnait l’impression erronée de l’absence de risque de change, d’où une sous-utilisation des solutions de couverture contre le risque de change», apprend-on chez Euler Hermes.
Le spécialiste de l’assurance crédit explique par ailleurs, que «maintenant que le Dirham pourra évoluer plus fortement, cette perception des risques devrait évoluer».
Contrairement aux grandes entreprises (commerçant avec des opérateurs issus de pays à hauts risques) qui étaient à l’affût des instruments de couverture, les petites et moyennes entreprises n’y voyaient même pas l’intérêt.
Et pourtant, le risque de volatilité Euro/Dollar a toujours bel et bien existé. Avec l’évolution du Dirham au sein du nouveau régime de flexibilité et dans un éventuel scénario d’accentuation de la volatilité du cours de change, les opérateurs, quelles que soient leurs tailles, sont astreints à se prémunir.
Toutefois, ils plaident pour une véritable concurrence entre les banques les incitant à une baisse des prix. Et pour cause : le coût de la couverture est jugé exorbitant, voire même dissuasif. Certaines voix se sont d’ailleurs élevées pour le dénoncer auprès des banques.
Réponse du berger à la bergère : les banques répliquent que le coût est aléatoire et dépend d’un certain nombre de paramètres incompressibles (spot, taux d’intérêt, volatilité…).
Une chose est cependant sûre, cette légère mutation de l’environnement économique sera accompagnée de nouveaux instruments de couverture. Une aubaine certes pour les banques, mais encore faut-il que l’Office des changes veille au grain pour éradiquer les spéculations qui risquent de s’amplifier.
A ce titre, une circulaire a été publiée récemment par l’Office pour encadrer les opérations commerciales (voir encadré).
Vulgarisons d’abord !
Toutefois, gérer et maîtriser des risques de change, c’est d’abord connaître leur nature pour les identifier, les évaluer et ensuite se couvrir. C’est dans ce sillage qu’aussi bien les banques que les spécialistes de l’assurance crédit jugent primordiales des séances de vulgarisation et de sensibilisation aux enjeux des outils de couverture contre les fluctuations de change.
En matière d’outils, il existe différentes techniques de couverture du risque de change.
Sans trop détailler, nous pouvons citer le termaillage, une procédure interne par laquelle l’entreprise chercher à faire varier les termes du contrat (les délais) de paiement afin de pouvoir profiter d’une évolution favorable du cours de change.
Comment ? Si l’entreprise importatrice anticipe une appréciation de la monnaie de facturation, elle tentera d’accélérer le règlement du fournisseur et, en cas de dépréciation, elle cherchera à retarder le paiement.
C’est l’effet inverse pour une entreprise exportatrice. Cette dernière sera tentée de retarder le paiement si la devise a tendance à la hausse. Mais lorsqu’il s’agit d’une baisse, l’accélération du paiement est souhaitable.
L’autre catégorie de couverture englobe les instruments commercialisés par les banques lorsque l’entreprise est dans l’incapacité de se prémunir contre la volatilité de la monnaie.
Ainsi, nous pouvons évoquer en premier lieu le swap de devises, qui relève d’un contrat d’échange de flux financiers entre deux opérateurs qui sont généralement des banques, et ce sur la base d’un taux et d’une échéance définis à l’avance.
L’option et l’affacturage sont également des instruments à même de protéger les agents économiques contre la forte volatilité de la monnaie. La liste est loin d’être exhaustive.
Au fur et à mesure de l’élargissement de la bande de fluctuation, d’autres instruments plus pointus verront certainement le jour. ■
Art 3 de la circulaire de l'Office des changes : Adossement des opérations de couverture
Les opérations de couverture doivent être adossées à des opérations courantes ou en capital en relation avec l’activité de la société, à l’exclusion de toute opération spéculative.
L’adossement consiste à attacher l’opération de couverture à une opération courante ou en capital, matérialisée par la présentation, au moment de la souscription de la couverture, de tout document engageant l’opérateur marocain ainsi que sa relation étrangère dans l’accomplissement de la transaction objet de la couverture, notamment : contrats, titre d’importation, déclaration d’exportation, facture définitive…
Les banques intermédiaires agréés ayant réalisé l’opération de couverture doivent s’assurer que :
• le montant couvert ne dépasse pas le montant de la transaction réalisée;
• le dénouement des opérations de couverture ne dépasse pas les délais de règlement de l’opération courante.
Pour les produits de base importés et stockés, l’opérateur doit veiller à ce que le dénouement des opérations de couverture ne dépasse pas la date de cession de ces produits.
Par Soubha Es-siari