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Finance participative : Les outils d'investissement font débat

Finance participative : Les outils d'investissement font débat

 

Jambe nécessaire à l'écosystème participatif, les outils d'investissements souffrent encore de lacunes juridiques.

 

Par Adil Hlimi

 

Cela fait un moment que l’on s'est rendu à l’évidence : chaque pas pour la finance participative est un véritable combat. Depuis leur démarrage commercial effectif il y a bientôt 2 ans, les banques, premier pilier de cet écosystème, ont dû affronter, tour à tour, une réglementation bancaire contraignante et un Conseil supérieur des Ouléma extrêmement regardant sur les détails du business.

Si évoluer dans cet environnement sous contraintes apporte une certaine crédibilité à ces banques, elles se trouvent confrontées à plus coriace encore : une perception et des a priori de la part des consommateurs qui ne permettent pas au marché de libérer son potentiel, et des vides juridiques qui empêchent un développement commercial optimal.

C'est dans ce contexte que s'est tenue la troisième édition du Forum international du Fiqh en finance participative. Un évènement qui réunit chaque année des experts du secteur à travers le monde pour trouver des solutions à des problématiques métier.

La thématique de cette année, les outils d'investissement, est d'actualité, puisque le Conseil supérieur des Ouléma vient de valider les contrats types des comptes d'investissement, qui permettront, en théorie, à ces banques de canaliser plus d'épargne et accroître leurs dépôts.

 

Contraintes «hybrides»

Pour proposer des placements à leurs clients, les banques participatives devront faire appel à la Moudaraba, un contrat mettant en relation une ou plusieurs banques participatives, appelées Rab el Mal, qui fournissent le capital en numéraire et/ou en nature à un ou plusieurs entrepreneurs (Moudarib) qui fournissent leur travail en vue de réaliser un projet.

La responsabilité de la gestion du projet incombe entièrement aux entrepreneurs. Les bénéfices réalisés sont partagés selon une répartition convenue entre les parties, et les pertes sont assumées exclusivement par Rab el Mal, sauf en cas de fraude commise par le Moudarib. La banque est donc propriétaire du projet.

De l'autre côté, la banque place l'épargne des déposants qui souhaitent la fructifier dans ces projets. Cette configuration transforme la banque participative en véhicule hybride, qui détient à la fois les projets et les dépôts.

Or, une banque est supposée être un intermédiaire financier et non un gestionnaire. En l’absence d'un cadre juridique précis pour cette activité, détaillant, par exemple, les recours en cas de difficultés financières des Moudarib, lancer ce type d'activités sur le marché paraît compliqué.

De plus, cette configuration augmente les frais de gestion, ce qui pèse sur la compétitivité des banques participatives. A cela s'ajoute le fait qu'elle soit consommatrice de fonds propres.

Du côté des déposants, se pose la problématique de la garantie. Pour les spécialistes qui ont discuté le sujet, la question est de préciser où placer le curseur en termes de protection. Faut-il exclusivement protéger l'épargne ? Faut-il en plus garantir le capital ou le rendement ?  Car bien que la garantie des gains soit prohibée (sauf par une tierce partie et de manière gratuite comme c'est le cas pour le Sukuk souverain marocain), il est possible de trouver des mécanismes de contournement comme au Moyen-Orient, où les dépôts placés ne sont pas adossés à des projets mais à la rentabilité de l'actif de la banque. Ceci déplace le risque de défaillance du Modarib, porteur du projet, à la banque.

Perdre son épargne revient à constater une dégradation des actifs de la banque ou, pire, sa défaillance. Lier le placement aux actifs et non aux projets serait un bon départ pour réduire les risques. Reste à savoir si le CSO acceptera une telle lecture.   ◆

 


Le coup de gueule de Youssef Baghdadi

Le patron de Bank Assafa, Youssef Baghdadi, a profité de ce rassemblement de professionnels pour pousser un coup de gueule sur la perception des banques participatives par le grand public.

«Les banques participatives ont dépensé 250 MDH en budgets de communication depuis le début de l'activité. Mais à quoi a servi cet investissement, puisque le grand public nous voit comme des sociétés de financement et non comme des banques. La banalisation de cette perception, renforcée par la presse, nous est préjudiciable», a déclaré celui qui a piloté le premier «engin» participatif du pays, Dar Assafa, société de financement qui s'est transformée ensuite en banque après la dernière loi bancaire, qui a introduit cette discipline. Il faut dire que les différentes campagnes de communication ont été institutionnelles ou ont porté sur les financements.

Or, ces banques auraient pu mettre le paquet sur leur véritable point fort : la quasi gratuité de leurs services au quotidien. Résultat : elles manquent aujourd'hui de dépôts, matière première de toute activité bancaire.


 

 

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