Par A. Hlimi
La baisse des flux est vertigineuse à la Bourse de Casablanca, avec un cumul de volumes annuels en contraction de 52% à fin mars. Les plus optimistes diront que le marché tient bon, puisque même déserté par les investisseurs, il affiche tout de même un gain de près de 3% en 2021 et préserve la quasi majorité de sa performance réalisée depuis les plus bas de 2020, qui se situe autour de 30%.
Cette résilience se constate également à travers la prime de risque du marché qui n'a que très peu augmenté, ce qui écarte d'éventuelles craintes aiguës sur la hausse du marché. Alors, pourquoi le marché cale-t-il ?
Trop haut, trop vite
Les investisseurs sont irrigués par un flux d'informations positives bien plus importantes que les données négatives. Les indicateurs avancés de la reprise, comme les ventes automobiles et la consommation de ciment, montrent des rebonds conséquents. A cela s'ajoutent l'exceptionnelle campagne agricole, le déroulement sans faute de la campagne de vaccination et la perspective d'un rebond mécanique de la croissance, des bénéfices des entreprises et des dividendes.
Mais ces informations ont été surexploitées le trimestre dernier. Ainsi, toutes les informations positives que nous pouvons voir aujourd'hui sont déjà consommées par les investisseurs. Cette opinion est la plus répandue en ce moment et elle a été bien formulée par les analystes de CFG Bank dans une note récente : «nous pensons que les niveaux de valorisation actuels du marché intègrent d’ores et déjà les perspectives de redressement et de croissance de la masse bénéficiaire en 2021».
Ce constat leur fait dire que 2021 serait une année de transition pour le marché boursier qui aurait, en d'autres termes, anticipé les événements. Les différentes publications des analystes en mars et avril ne montrent pas, du moins pour le moment, d'inquiétudes particulières sur les variants. Le marché est en effet complètement hermétique au scénario d'une détérioration brutale sur le plan sanitaire.
En attendant de nouveaux arguments
Le mois d'avril marque habituellement la saison des arbitrages chez les investisseurs institutionnels. Ces derniers vont bientôt décider de leurs allocations à court terme entre actions et produits taux. Et dans ce match, les actions préservent un léger avantage. En effet, les entreprises cotées se sont de nouveau démenées pour offrir du rendement à leurs actionnaires.
Ces dernières ont consenti un effort qualifié de considérable par les analystes d'AGR afin de rémunérer les investisseurs en Bourse. Il s'agit d'un dividende attendu à 16,7 Mds de DH au titre de 2020, équivalent à un taux de distribution historique de 96%. A cet effet, le rendement de dividende offert par le marché en 2020 demeure supérieur de 90 Pbs aux bons du Trésor à 5 ans, soit 2,9% contre 2,0% respectivement. Ainsi, les brokers font le pari que les investisseurs institutionnels mettront plus de billes sur le marché actions dans un contexte de taux bas.
Un autre argument potentiel pour la hausse des actions est d'assister à des résultats trimestriels meilleurs que prévu pour les secteurs autres que financiers, de quoi conforter les prévisions optimistes des bureaux de recherche. A titre d'exemple, AGR voit, en termes de profitabilité, les valeurs de l’AGR-30 (échantillon de 30 valeurs suivies par le bureau de recherche) afficher une croissance de leurs bénéfices récurrents de +14,2% en 2021 et de +15,0% en 2022.
La croissance bénéficiaire de cet univers de valeurs est portée sur la période 2021-2022E par l’appréciation attendue des bénéfices de plusieurs secteurs. Il s’agit principalement des banques, avec un redressement attendu des bénéfices récurrents de +31,5% en 2021 et de +24,2% en 2022, des mines, avec un doublement des bénéfices en 2021 dans un contexte minier très favorable marqué par un effet volume/prix positif et par la non récurrence des provisions financières, et des ports, avec une hausse du RNPG récurrent de +12,3% en 2021 et de +20,5% en 2022, soutenue par la reconstitution de stocks des opérateurs économiques en anticipation de la reprise progressive de l’activité économique.