La prédominance de l’informel présente des risques quant à la fiabilité des documents et des véhicules proposés. Investie de plus en plus par des opérateurs structurés, l’activité cherche de nouvelles pistes de développement.
Par C. Jaidani
Le marché des véhicules d’occasion (VO) est un secteur florissant, prometteur en termes de développement et qui continue d’évoluer malgré les défis. Si la pandémie de Covid-19 a quelque peu freiné sa dynamique, notamment durant l’année 2020 et en partie 2021, le marché du VO a rapidement repris une trajectoire haussière. En 2023, il a enregistré plus de 700.000 transactions, en progression de 3,36% par rapport à 2022 où 677.222 mutations avaient été comptabilisées.
A titre de comparaison, le marché des véhicules neufs n’a, lui, comptabilisé que 163.504 livraisons sur la même période. De ce fait, le VO fait plus de quatre fois le volume du neuf. Toutefois, une caractéristique essentielle du marché du VO reste la prédominance de l’informel. La majorité des transactions se fait via des réseaux non encadrés, que ce soit sur les réseaux sociaux, à travers des sites spécialisés, des intermédiaires ou encore par simple affichage sur les véhicules eux-mêmes. Cette pratique présente bien des risques pour les acheteurs, notamment en termes de fiabilité des documents et de l'état technique des véhicules proposés.
Vers une structuration du marché
Malgré cette situation, le secteur commence à emprunter un chemin vers une plus grande organisation. En effet, un circuit organisé se développe lentement mais sûrement. Ce dernier, encore limité, ne représente pour le moment que 2% des transactions totales du marché, avec environ 14.000 mutations par an. Néanmoins, outre les garagistes, les distributeurs automobiles et les concessionnaires sont de plus en plus nombreux à créer des filiales ou des marques dédiées exclusivement à la vente de véhicules d’occasion. M-Automotiv, acteur de référence dans la distribution des marques Renault, Dacia et Alpine, fait partie des entreprises qui souhaitent jouer un rôle dans cette évolution.
«Notre groupe lancera dans les mois à venir une nouvelle marque dédiée aux véhicules d’occasion. Nous ambitionnons non seulement d’investir ce segment, mais aussi de contribuer à sa structuration en offrant des solutions fiables et pratiques aux consommateurs», déclare Souhail Houmaini, Directeur général de M-Automotiv. Ajoutant que «notre groupe offrira des véhicules contrôlés et répondant aux normes du constructeur en matière de fiabilité et de qualité. Nous voulons, à travers ce projet, fidéliser aussi notre clientèle pour concrétiser des reprises en toute sérénité».
Les attraits du marché du VO
Selon Adil Berrada, garagiste expérimenté basé à Casablanca, le succès du marché des VO s'explique en grande partie par des facteurs économiques. «Le principal avantage du VO est son coût, bien inférieur à celui d’un véhicule neuf. De plus, les véhicules sont disponibles immédiatement, et la transaction peut être bouclée en quelques heures à peine, contrairement à l’achat d’un neuf qui peut prendre des jours, voire des mois en cas de rupture de stock. Lors de la crise des composants électroniques, les clients attendaient parfois une année pour être livrés. Dans le VO, il est possible de dénicher des modèles, des finitions ou des couleurs que l’on ne retrouve pas chez les concessionnaires locaux», précise-t-il.
Cependant, Berrada met également en garde contre les risques inhérents au marché des VO. «Le VO présente quelques risques concernant l’authentification des données et des documents présentés, ainsi que la fiabilité de l’état technique du véhicule. C’est pourquoi un nombre croissant de clients se tourne désormais vers des opérateurs organisés, qui offrent des garanties allant de 3 à 12 mois sur les véhicules vendus. L’organisation d’événements comme le salon de l’Auto d’Occasion ne peut que contribuer à structurer ce marché du VO».
Dans le cadre de la régulation de ce secteur, la Narsa a mis en place plusieurs initiatives pour structurer le marché des véhicules d’occasion. Parmi elles, une plateforme dédiée aux mutations de véhicules, permettant à tout citoyen de vérifier la situation juridique d’un véhicule en ligne, notamment l'existence éventuelle de saisies ou d’oppositions. La Narsa collabore également avec les organismes de crédit afin de lutter contre les fraudes, notamment en ce qui concerne les falsifications des documents de mainlevée pour les véhicules achetés à crédit. Enfin, l’agence prévoit d'interfacer son système d'information avec ceux de plusieurs autres institutions comme l’APSF (Association professionnelle des sociétés de financement), la douane, la police et la gendarmerie, dans le but d'accroître la transparence et la sécurité des transactions.