Textile : Les industriels perdent le fil

Textile : Les industriels perdent le fil

Le manque de visibilité sur les niveaux des carnets de commandes est particulièrement anxiogène pour les textiliens marocains.

 

Par M. Diao

 

Les chiffres relayés par la Banque centrale, qui a tenu son Conseil le 22 septembre 2020, confortent l’essoufflement de la dynamique des exportations nationales à l’heure où la covid-19 continue de sévir à l’échelle mondiale. Pour preuve, les ventes à l’étranger de biens ont reculé, en glissement annuel, de 17% à fin juillet, en raison notamment des contractions des exportations de 28,7% pour le secteur automobile et de 29,5% pour le textile.

Interrogé sur les conditions de la reprise du secteur du textile, qui emploie de façon formelle entre 190.000 et 200.000 salariés au Maroc, avec à la clef un chiffre d’affaires de près de 38 Mds de DH en 2019, Mohamed Boubouh, président de l’Association marocaine des industries du textile et de l’habillement (Amith), décrit un contexte toujours défavorable. «Nous n’avons aucune visibilité. La situation que traverse notre secteur est très compliquée», rétorque-t-il. Ce constat est également partagé par Fatima-Zohra Alaoui, Directrice générale de l’Amith.

«Après les mois de confinement qui ont fortement impacté les exportations, nous avons assisté quelque part à un effet de rattrapage pour les mois de juillet et août», explique-telle. Notre interlocutrice alerte sur les fâcheuses conséquences du manque de visibilité des textiliens marocains pour septembre ainsi que les mois à venir.

«Les clients étrangers font face aux incertitudes liées à leurs ventes. Aujourd’hui, il est question de reconfinement et de deuxième vague de la pandémie au niveau de nos principaux marchés, notamment dans les pays européens», fait savoir la DG de l’Amith. Et de préciser que les consommateurs européens achètent moins qu’avant. Ce qui est défavorable aux carnets de commandes des industriels marocains. En clair, le moral n’est pas au beau fixe chez les exportateurs d’articles textiles.

En l’absence de nouvelles mesures adaptées, le pire arrivera !

Jusque-là, la branche du textile, l’un des premiers employeurs industriels du Maroc, n’a pas connu de vagues de licenciement. Toutefois, le manque de visibilité sur les carnets de commandes pour les prochains mois risque de pousser certains industriels à se passer d’une partie de leurs salariés.

Faudrait-il le rappeler, jusque-là, le textile n’a bénéficié d’aucune mesure urgente spécifique, à l’instar du tourisme mis sous perfusion grâce à un plan de relance dédié. Rappelons néanmoins que dans l’optique d’aider les entreprises à amortir au mieux les chocs induits par la crise liée à la pandémie, l’Etat a mis en place une batterie de mesures.

Citons, à ce titre, les crédits garantis par la CCG, les reports de paiement des crédits bancaires et des cotisations sociales de la CNSS et le décalage des échéances fiscales. Il ressort de l’appréciation de la DG de l’Amtih que les entreprises de l’industrie du textile n’ont pas suffisamment profité des crédits garantis par l’Etat (Damane Oxygène et Damane Relance). «L’un des critères d’éligibilité aux crédits Damane a été particulièrement contraignant pour les entreprises de notre secteur», révèle notre interlocutrice.

Et d’expliquer : «Beaucoup de demandes de crédit ont été rejetées à cause du ratio d’éligibilité de l’endettement, calculé à l’instant T (au 31 décembre 2019). Or, l’année dernière a été une période compliquée pour nos entreprises sur le plan financier». Afin de lever cet obstacle, l’Amith a proposé de prendre en compte deux ou trois années de référence afin de faciliter l’accès des entreprises du textile aux crédits Damane. Cette doléance plébiscitée aussi par d’autres secteurs n’a toujours pas été prise en compte.

Par ailleurs, les textiliens demandent toujours le report de l’augmentation du Smig d’une année, en raison de la conjoncture défavorable qui prévaut. Les industriels sont également favorables à l’extension de six mois de la période du chômage partiel, limitée actuellement par le code du travail à deux mois.

D’après l’Amith, cette proposition serait une alternative au licenciement pour les entreprises du textile. D’autant plus que cellesci font face à une période de turbulence, causée par les incertitudes liées aux niveaux des carnets de commandes pour les prochains mois.

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