Les promoteurs considèrent que l’assiette foncière est un stock non destiné à la spéculation.
Des difficultés administratives et de procédure empêchent les assujettis de bénéficier d’éventuelles exonérations.
Par C. Jaidani
Dans le cadre du PLF 2020, le gouvernement n’a pas jugé opportun d’apporter des ajustements à la taxe sur les terrains non bâtis (TTNB).
Pourtant, sa réforme figure parmi les propositions formulées par la Fédération nationale des promoteurs immobiliers (FNPI). Elle fait partie aussi des recommandations des dernières Assises de la fiscalité tenues en mai dernier à Skhirate.
Selon les avis des fiscalistes, des experts-comptables et aussi des promoteurs, cet impôt nécessite une profonde refondation ou du moins procéder à son abrogation et son remplacement par un autre plus équitable, simple, pratique et à fort rendement fiscal.
A travers l’instauration de cette taxe, l’objectif principal était de lutter contre la spéculation foncière dans les périmètres urbains. Mais dans la pratique, des effets collatéraux se sont produits.
Dans son mémorandum présenté au ministère de l’Urbanisme, de l’Habitat et de la Politique de la ville, la FNPI estime que «l’application de la TTNB ne fait pas de distinction entre le promoteur-investisseur pouvant générer des ressources fiscales supplémentaires à la collectivité et le propriétaire marchand de biens, qui acquiert des terrains en vue de les vendre en l’état après un certain délai dans un but purement spéculatif».
Driss Nokta, vice-président de la FNPI, renchérit : «La nature de notre métier nous impose de constituer des réserves foncières. Le législateur doit tenir compte de ce constat notamment de la destination finale du terrain. Pour le promoteur, c’est un stock qui devrait être transformé et servir pour la construction ou la réalisation d’un projet. En fin de compte, le chantier générera des investissements, et aboutira à coup sûr à la création de valeur ajoutée et aussi d’emplois».
La Fédération a proposé de réaménager cette taxe en révisant la durée liée à son application. En dépit de la crise que traverse le secteur de l’immobilier depuis des années et l’absence de visibilité, certains promoteurs ont été contraints de réaliser des projets pour éviter un cumul d’impôts, qui devrait impacter le coût des ventes. Un mouvement de construction qui a eu un effet sensible sur l’offre en logements bien que la demande ne semble pas suivre pas.
«Face à une concurrence acharnée et un déséquilibre du marché, les promoteurs étaient obligés de réduire les prix aux dépens des marges. Ces dernières ont été à leur tour impactées par la hausse des charges dont une partie est d’ordre fiscal», explique Nokta.
Le vice-président de la FNPI précise également que le temps est venu de créer un statut particulier pour les promoteurs à l’instar des pays les plus avancées pour faire la distinction avec les spéculateurs.
La Fédération recommande également que la TTNB soit supprimée pour les projets conventionnés, notamment ceux de type social, ceux de la classe moyenne ou encore ceux destinés au recasement des bidonvilles.
Ce genre de programme qui mobilise une grande superficie, rencontre le plus souvent des difficultés au niveau de l’exécution à cause des autorisations (non délivrées à temps pour une raison quelconque), des opérations d’évacuation des bidonvillois ou d’équipement de l’assiette foncière. Ces contraintes dont le promoteur n’est pas responsable, pourraient contraindre ce dernier à payer un surcoût fiscal très lourd.
Certes, la loi a prévu une exonération pouvant aller jusqu’à 7 ans, qui commence à partir de la délivrance du permis de construire. Mais les professionnels du secteur estiment que ces dérogations sont insuffisantes du fait que le temps entre le début des travaux et la délivrance des logements peut s’étaler sur une durée plus ou moins longue.
«La procédure administrative d’autorisation devient de plus en plus compliquée lorsqu’il s’agit d’un terrain non raccordé aux infrastructures. Dans ce cas, le promoteur se trouve contraint non seulement de supporter les frais importants de viabilisation du terrain en question, mais aussi de supporter la TTNB au cours de toute la période de viabilisation et d’autorisation», indique Nokta.
Normalement, dans pareil cas, la commune est tenue de délivrer au promoteur un certificat attestant le non raccordement du terrain. Ce certificat est nécessaire à l’exonération du foncier concerné, mais le plus souvent, les communes refusent de le délivrer pour éviter d’être poursuivies en justice et indemniser les personnes impactées à cause des préjudices subis par le retard d’exécution des opérations.
Si les promoteurs recommandent un ajustement de la TTNB, les fiscalistes prônent son remplacement par une taxe foncière locale assise sur la base de la valeur vénale.
Le ministère des Finances doit mener une étude d’impact pour évaluer le rendement de cette taxe et les moyens de sa réforme.