Sur 143 milliards de DH d’importation, il est possible de produire 51 milliards de DH localement.
Il est primordial d’avoir la maîtrise des centres de décision et de soutenir la R&D.
Par C. Jaidani
La pandémie, la crise économique et la guerre en Ukraine ont mis sur les feux de la rampe la question de la souveraineté économique pour ne pas dépendre de l’étranger. Ce sujet est fortement évoqué partout dans le monde, comme ici au Maroc. C’est dans ce cadre que l’Association des lauréats de l’ISCAE a organisé à Casablanca une grande rencontre sous le thème : «Made in Morocco, quel rôle dans la souveraineté économique ?».
Ryad Mezzour, ministre de l’Industrie et du Commerce, a souligné à cette occasion que «la souveraineté économique du Maroc s’impose aujourd’hui plus que jamais comme un enjeu vital et stratégique. Avec la guerre en Ukraine et la sécheresse, le Maroc est confronté à des difficultés importantes d’approvisionnement en produits alimentaires, surtout pour le bétail qui représente pour certains agriculteurs 100% de leur économie».
Le ministre a révélé que «sur 143 milliards de DH d’importation, il est possible de produire localement 34 milliards de DH car nous avons la compétitivité nécessaire. Cette valeur peut être extensible à 51 milliards de DH. Pour ce que nous ne pouvons pas produire, il faut miser sur la recherche et développement pour avoir le savoir-faire nécessaire». A cet égard, il a noté que «le Made in Morocco est notre ambition qui ne peut être consolidée qu’à travers les compétences et les projets réalisés sur le terrain». Il a donné comme exemple l’essor réalisé au niveau du secteur de l’automobile ou de l’aéronautique.
Lentement, mais sûrement, les marques marocaines s’imposent progressivement aussi bien dans leur environnement local qu’à l’international. Du secteur industriel à la santé, elles sont de plus en plus nombreuses à batailler à des niveaux élevés en matière de prestige et de qualité. Ces marques et enseignes marocaines exercent dans des domaines où la compétition est très rude et où les normes sont strictes. Le Made in Morocco ne concerne pas uniquement la fabrication de produits ou l’offre de services, mais également la formation des ressources humaines. Dans ce sens, Nada Biaz, Directrice générale du Groupe ISCAE, a fait savoir que les Iscaéistes sont véritablement des managers «made in Morocco», puisque l’institution est ancrée dans son histoire, imprégnée de sa culture, baignée dans son environnement économique national, avec une ouverture sur le monde, et au fait des tendances internationales. Elle a souligné que le lauréat de l’ISCAE est formé pour comprendre et travailler dans un contexte national, mais il connait aussi les enjeux internationaux et peut travailler dans des contextes économiques et culturels très différents.
Évoquant le rôle de cet établissement, Biaz a indiqué qu’«il a veillé durant ces 5 décennies à la formation de managers et de décideurs outillés pour les enjeux de leur époque et capables de porter la vision commune pour le développement de notre pays». D’autres intervenants de renom ont mis en exergue leur expérience pour développer des entreprises locales et se projeter à l’international, à l’image de Adil Douiri, ex-ministre et président du groupe Mutandis.
«A une certaine époque, on disait que le Maroc a raté l’étape de l’industrialisation. Mais avec les progrès réalisés actuellement surtout dans certaines filières, cette idée n’a plus raison d’être. Le Maroc a besoin d’acteurs étrangers, mais aussi locaux. La souveraineté économique ne peut être consolidée sans un ancrage des centres de décision. Pour être compétitif, il faut produire non seulement à moindre coût et une bonne qualité, mais aussi avoir la maîtrise de ses outils de production et un positionnement durable dans le marché», a indiqué Douiri. Avant d’engager la bataille à l’international, le premier enjeu demeure local. Et à ce propos, dans les différents centres commerciaux, gares et lieux de vie au Maroc, le défi est encore de taille afin de réussir à faire installer des marques et enseignes marocaines capables de concurrencer celles mondialement connues.