Face à la nouvelle souche du Coronavirus, la BA.2.86, qui inquiète l’OMS et les scientifiques de plusieurs pays, Finances News Hebdo a interpellé le docteur Jaâfar Heikal qui a un discours plutôt rassurant pour ce qui y est du Maroc. Selon le spécialiste, «il n’y a pas d’inquiétude à se faire. Il faut maintenir la surveillance épidémiologique et le Maroc a les moyens de le faire». Entretien.
Propos recueillis par A. Diouf
Finances News Hebdo : L’OMS et les autorités sanitaires américaines ont annoncé, dernièrement, surveiller de très près le nouveau variant du Covid19, à savoir la souche BA.2.86, dont le nombre de mutations et la détection dans plusieurs pays ont alerté les scientifiques. Dites-nous docteur, est-ce le retour du Covid 19 ?
Jaâfar Heikal : Ecoutez, on avait déjà dit que le Covid19 deviendrait une maladie endémique et qu’au même titre que différents types de virus, les Coronavirus vont particulièrement s’installer dans le temps.
Différentes périodes de l’année ont été identifiées. Il s’agit notamment de l’automne dans l’hémisphère Nord et de mars -avril dans l’hémisphère Sud, où il est donc prévu des augmentations des infections virales de type Coronavirus ou d’autres telles que l’hémophillis influencé, la grippe saisonnière classique, etc. Ceci étant, il n’y aura pas de phase pandémique tout de suite, mais avec le temps, il faudra s’attendre à des variations et à de nouveaux variants. Et ces variants vont être plus ou moins importants selon quatre critères : la capacité ou non de les diagnostiquer et de les dépister; la capacité de les traiter avec les médications actuelles; l’ampleur des complications qu’ils vont produire; et l’efficacité des schémas vaccinaux.
C’est-à-dire est-ce que les schémas vaccinaux vont permettre de les contrôler et est-ce qu’il y a oui ou non une échappée immunitaire ? C’est à partir de ces critères que l’on voit si un variant a un impact important à l’échelle populationnelle et s’il va créer plus de problème qu’attendu. Depuis l’Omicron, nous avons constaté que les nouveaux variants qui arrivaient, n’étaient pas des variants inquiétants. Ce sont des variants qu’il fallait tout simplement surveiller. D’ailleurs, c’est ce que préconise l’OMS et nous allons ainsi apprendre à vivre avec.
Ce qu’il faut bien comprendre, c’est qu’aujourd’hui il n’y a pas de données mondiales ni de données marocaines qui montrent que ce sous-variant, qui est un sous-variant de l’Omicron, qui lui-même était un variant du Covid19, est inquiétant. Il n’y a pas de cas d’hospitalisation, il n’y a pas de létalité augmentée, et donc pas non plus de gravité. Bien évidemment, il faut surveiller les sujets âgés et ceux qui ont des maladies chroniques comme le diabète, l’hypertension ou le cancer, parce que ce sont des sujets un peu plus fragiles. Mais, il n’y a pas plus d’inquiétude à avoir.
F.N.H. : Que sait-on au juste de ce variant ? Est-il plus virulent que ceux qui l’ont précédé ?
J. H. : Actuellement, le variant BA.2.86 a un taux de prévalence qui varie entre 15, 17% voire 30% dans les pays touchés. C’est-à-dire que c’est un sous-variant qui commence à prendre de plus en plus d’importance, notamment une importance en termes de fréquence et non en termes de gravité. Est-ce que les vaccins actuels vont être aussi efficaces ? C’est trop tôt pour répondre à cette question. Ce que l’on sait aussi, c’est qu’avant, face aux variants antérieurs, nous avions un schéma vaccinal minimal à deux doses, puis un booster et enfin un rappel. Ce n’est pas le cas aujourd’hui, en tous cas pas pour le moment par rapport aux données actuelles. Peut-être que les futures données montreront que les vaccins actuels sont tout aussi efficients. Peutêtre que non et à ce moment-là, il faudrait adopter de nouvelles mesures.
F.N.H. : Excepté la vaccination qui va devoir attendre…, quelles sont les mesures à prendre dans l’immédiat pour stopper l’éventuelle propagation de ce nouveau virus ?
J. H. : Aujourd’hui, nous n’avons pas de stratégie vaccinale adaptée à ce sous-variant BA.2.86 de l’Omicron. Par contre, les mesures préventives de base sont encore extrêmement importantes. Je les rappelle : il s’agit du lavage régulier des mains; le port du masque dans le cas où le sujet aurait certains symptômes; et la distanciation physique lorsque c’est nécessaire. Il n’y a pas de psychose à avoir. Il n’y a pas de cas plus graves que d’habitude. Il faut donc adopter ces mesures de prévention, rester serein et évidemment se faire dépister si vous avez des symptômes.
Bien entendu, il faut systématiquement consulter un médecin et éviter l’automédication. Nous avons appris à vivre avec les Coronavirus, et le plus important c’est que notre système de santé puisse être résilient et s’adapter à de nouvelles situations. Le cas échéant, l’enjeu majeur est de mettre en place tous les éléments pour que le système de santé soit résilient, à savoir des lits d’hospitalisation et de réanimation, mobiliser les ressources humaines ainsi que tous les moyens pour qu’il n’y ait pas, sur les plans social et économique, un impact aussi important que lors de la première phase du Covid19.
En résumé, il n’y a pas d’inquiétude à se faire. Il faut maintenir la surveillance épidémiologique et le Maroc a les moyens de le faire. Notre pays est doté d’un solide système de santé tant au niveau national que régional. Nous avons aussi suffisamment de laboratoires pour faire le génotypage, c’est-à-dire savoir quel type de sous-variant est en circulation. Ce qui est important, c’est de rester dans la prévention primaire, c’est-à-dire le lavage régulier des mains, le port du masque si on a des symptômes et la distanciation physique.
A signaler qu’en général, les symptômes durent quatre à cinq jours et si vous êtes en contact avec votre médecin, vous bénéficierez de la thérapeutique adaptée.