Karim Cheikh, président du Groupement des industries marocaines aéronautiques et spatiales.
Un carnet de commandes prévoyant 40.000 avions à produire pour les 20 prochaines années.
L’objectif pour 2020 du Plan d'accélération industrielle est de porter le taux d’intégration à 42%.
Le repreneur de Bombardier devra honorer tous les engagements de ce dernier au Maroc.
Propos recueillis par Badr Chaou
Finances News Hebdo : Quelle est aujourd'hui la croissance moyenne annuelle de l'écosystème de l'aéronautique ?
Karim Cheikh : La croissance a atteint 20% cette année. Elle est principalement portée par celle des entreprises déjà implantées, par la consolidation de notre base, avec plus de valeur ajoutée dans les équipements exportés et plus d’intégration locale.
Le Maroc profite aussi de la conjoncture favorable internationale. En effet, depuis quelques années déjà, le carnet de commandes a atteint des niveaux historiques. Plus de 40.000 avions nouveaux seront à produire pour les 20 prochaines années, sans compter les renouvellements de flotte.
La quête de nouvelles capacités de production disponibles à des coûts compétitifs, en plus de la proximité d’un hub mondial de l’aéronautique, Toulouse, sont des facteurs qui ont permis au Maroc d’atteindre un tel niveau de croissance.
F.N.H. : A quel niveau se situe le taux d'intégration à ce jour ?
K. Ch. : Le taux d’intégration se trouve actuellement à 38%. Il s’agit de la bonne surprise des objectifs du Plan d’accélération industrielle (PAI). Nous étions à 17,5% lors de l’étude du contrat de performance aéronautique, nous sommes à 38%. L’objectif étant 35% en 2020. Nous avons donc décidé de le revoir à la hausse pour l’année prochaine. Le taux d’intégration est non seulement respecté, mais dépasse toutes nos espérances.
F.N.H. : Quel est l'objectif souhaité d'ici 2020 (fin du Plan d'accélération industrielle) ?
K. Ch. : L’objectif initial à la fin du PAI était de 35%. Objectif qui a été revu à la hausse à 42% en 2020 à cause de la progression rapide qu’a connue l’intégration locale depuis le lancement du PAI.
F.N.H. : Quelle est la valeur ajoutée de l'aéronautique dans le secteur industriel ?
K. Ch. : C’est un secteur d’excellence où l’on produit des pièces de haute qualité, respectant les exigences strictes de cette industrie. C’est un secteur porteur d’innovation.
À ce titre, le Groupement des industries marocaines aéronautiques et spatiales (Gimas) œuvre aussi dans la continuité, avec la création de l’Aerospace Moroccan Cluster, qui montre la volonté de supporter l’innovation dans l’industrie.
En effet, ce cluster vise à travers des efforts communs entre les industriels, les universités et le Gimas, à mener des projets innovants à haute valeur technologique dans le secteur au Maroc.
Aussi, la formation des talents à des métiers de pointe est une composante forte de ce secteur.
F.N.H. : Comment a été perçu le retrait de Bombardier par le secteur aéronautique au Maroc ?
K. Ch. : Bombardier a procédé à une restructuration de ses activités. Cette restructuration implique de se départir de certaines activités et usines, notamment celles de Belfast (Irlande du Nord) et de Nouaceur, spécialisées en aérostructures, qui seront cédées en même temps et dans un unique package.
Le site marocain, implanté dans la zone franche de MidParc à Nouaceur, emploie aujourd’hui 400 personnes. Il est considéré par Bombardier comme l’un de ses sites les plus compétitifs.
Le repreneur devra honorer tous les engagements de Bombardier au Maroc. Cela inclut les projets de développement de l’usine qui ont été annoncés récemment (Phase 2). Les usines du Maroc et de Belfast vont donc changer d’actionnaires. Ainsi, il s’agit d’une opportunité d’attirer un des gros sous-traitants fournisseurs du secteur aéronautique, tout en gardant les développements sur lesquels Bombardier était déjà engagée.
F.N.H. : Le retrait de Bombardier s'est-il fait ressentir sur l'écosystème aéronautique ?
K. Ch. : Pour le Gimas, les changements d’actionnariat, les cessions, fusions ou acquisitions font partie de la vie aéronautique dans le monde où nous observons de plus en plus d’intégration d’entreprises.
A partir du moment où l’entité Bombardier poursuit son développement, nous ne voyons pas d’impact, à part celui d’intégrer un nouvel acteur majeur de la sous-traitance aéronautique au Maroc.
Non seulement, les activités actuelles et les engagements futurs sont maintenus, mais Bombardier, en elle-même, continuera à s’approvisionner et utiliser la Supply Chain aéronautique du Maroc. ◆