Plus que quelques semaines nous séparent du lancement officiel du très attendu dispositif d’indemnisation pour perte d’emploi. Le 1er décembre 2014 fera ainsi date dans les annales de la sécurité sociale au Maroc. C’est à partir de ce jour-là que seront instruits les premiers dossiers des salariés qui ont perdu leur emploi pour des raisons involontaires. Encore faut-il que le salarié bénéficiaire soit déclaré à la Caisse nationale de sécurité sociale (CNSS) au moins 780 jours (environ 26 mois) pendant les trois années précédant la date d’arrêt du travail, dont 260 jours durant les douze derniers mois.
Comme nul n’est censé ignorer la loi, les employeurs seront désormais dans l’obligation d’affecter une nouvelle cotisation patronale (fixée à 0,38% du salaire brut) destinée à financer le régime IPE, soit le double de la cotisation à la charge des salariés (0,19%). A l’approche du jour J, la Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM), qui a accueilli favorablement l’adoption de la nouvelle loi, a tenu à sensibiliser ses membres, notamment à travers un mailing rappelant le bien-fondé et les principales composantes du nouveau dispositif. «Certes, l’IPE engendre un coût supplémentaire pour l’entreprise, mais c’est surtout une avancée sociale majeure. Le patronat veut absolument accompagner le progrès social», souligne Jamal Belahrach, président de la commission «Emploi et relation sociale» à la CGEM.
Du côté de la CNSS, la machine semble bien huilée pour intégrer l’IPE dans les process. «Une formation spéciale a été offerte au personnel invité à prendre en charge la nouvelle prestation, aussi bien au niveau central que régional. Le système d’information a lui aussi été mis à jour en développant une application dédiée à la liquidation des demandes de la prestation», affirme Omar Souabni, directeur des Etudes et de la Communication à la CNSS. Outre la préparation des imprimés nécessaires à l’instruction des dossiers, a-t-il ajouté, de nouvelles procédures ont été conçues pour la réception, le traitement et la liquidation des demandes des adhérents de la Caisse.
Traitement prioritaire à l’Anapec
La CNSS constitue la porte d’entrée du processus d’indemnisation pour perte d’emploi. Une fois le dossier validé, puisque répondant aux conditions d’éligibilité, les données du bénéficiaire seront transmises en temps réel à l’Agence nationale de promotion de l’emploi et des compétences (Anapec). Car on exige des bénéficiaires de s’inscrire, pendant six mois (soit la durée maximale d’indemnisation), dans une recherche active d’emploi. Et à l’image de la CNSS, l’Anapec se dit, elle aussi, prête à leur fournir son assistance. «Un traitement prioritaire sera réservé aux détenteurs d’un statut IPE», nous confie son Directeur général, Hafid Kamal. Un entretien d’orientation leur sera d’abord consacré, avant de décider du mode d’intervention de l’agence.
Mis à part le système d’échange de données relié à la CNSS, développé d’ailleurs en interne (deux cadres s’y sont attelés pendant trois mois), l’offre de services dont auront besoin les bénéficiaires d’IPE existe déjà chez l’Anapec. Entre le service de médiation pour une réinsertion sur le marché du travail et celui d’aide à la création d’entreprise, ils auront l’embarras du choix. Mieux encore, souligne Hafid Kamal, pour améliorer leurs compétences et leur employabilité, des ateliers de formation seront animés soit au sein de l’Anapec, soit auprès de l’Office de la formation professionnelle et de la promotion du travail (OFPPT) en cas de nécessité.
Le montant de l’indemnisation est fixé à hauteur de 70% du salaire de référence (salaire mensuel moyen déclaré des 36 derniers mois), sans excéder toutefois le seuil du SMIG, soit 2.300 DH. Un montant jugé dérisoire, notamment quand il s’agit de cadres dont la rémunération dépasse largement ce plafond autorisé par la nouvelle loi. J. Belahrach s’oppose à ce type de critique en rappelant l’esprit de l’IPE : celle-ci est assimilée à une aide, à ne surtout pas confondre, selon lui, avec l’allocation chômage qui commence déjà à révéler ses limites dans certains pays européens, pour ne citer que l’exemple de la France.
Les projections de la CNSS estiment à 34.000 le nombre de bénéficiaires de l’IPE au cours de la première année. Le financement, dans un premier temps, ne posera vraisemblablement pas de problème dans la mesure où le gouvernement a mis la main à la poche en budgétisant un fonds d’amorçage de 500 millions de DH, et ce sous forme de trois versements (250 millions la première année et 125 millions de DH les deuxième et troisième années).
A rappeler enfin que les intervenants lors du processus d’octroi de l’IPE ont instauré des garde-fous pour éviter les effets d’aubaine liés à la nouvelle loi. En effet, au milieu des six mois réglementaires, dès que le bénéficiaire sera à nouveau déclaré à la CNSS, il perdra automatiquement son statut IPE et cessera ainsi de recevoir l’aide liée à la perte d’emploi.
W.E