Nous sommes un 18 mai 2005, quand SM le Roi s’adresse au peuple marocain lançant ainsi l’Initiative Nationale du Développement Humain. Dans son discours, le Roi avait précisé que cette initiative n’était pas un projet ponctuel, ni un programme conjoncturel de circonstance, mais un projet de règne. Cette stratégie marquera ainsi à jamais l’orientation du Maroc vers un développement qui place l’élément humain au centre de ses priorités.
Cinq ans après, lors du Forum du Développement Humain qu’a accueilli Agadir les 1er et 2 novembre, l’heure est au bilan. L’INDH a permis en cinq années le lancement de plus de 22.000 projets de développement au profit de 5 millions de bénéficiaires, pour une enveloppe budgétaire de plus de 10 milliards de DH avec à la clé la création de 3.400 activités génératrices de revenus traduites par la création de 40.000 emplois.
Plus important encore, cette initiative a insaturé une approche participative qui a contribué fondamentalement à la dynamisation du tissu associatif local avec plus de 5.000 associations accompagnant les projets de développement. Mais aussi l’instauration d’un climat de confiance entre pouvoirs publics et populations vulnérables.
Aujourd’hui, l’expérience est qualifiée de réussie, mais elle a montré un certain nombre de limites. Dans son message aux participants au Forum, le Roi souligne la volonté d’assurer le suivi sur le terrain de cette expérience novatrice d’envergure ainsi que l’évaluation continue pour éliminer les écueils.
Compte tenu de ces insuffisances mises en évidence par l’évaluation de la première phase, une deuxième phase d’action, étalée sur la période 2011-2015, sera incessamment lancée et prendra appui sur les orientations royales contenues dans le discours du 30 juillet 2009.
On dégage dans ce sens trois pistes qu’il faudra approfondir. Ainsi, les acteurs sont appelés à tenir compte, lors de la préparation des projets de l’ INDH, de la spécificité de ceux-ci, tout en s’assurant de leur pérennité et de leur synergie avec les différents programmes sectoriels et les plans de développement communaux.
Autre point important soulevé : celui de la nécessité de soumettre lesdits projets au contrôle et à l’évaluation et de veiller à donner corps aux recommandations de l’Observatoire national de l’INDH.
Enfin, le discours du 30 juillet 2009 insiste sur l’impératif de se focaliser sur les microprojets, générateurs d’emplois et de revenus stables, surtout dans le contexte économique actuel.
Mais pas seulement ! De nouvelles pistes sont à creuser. Car, dans son message, le Roi met l’accent sur les problématiques du ciblage des populations et des territoires. «Ces problématiques ont trait principalement au ciblage des populations et des territoires, à l'intensification des AGR, à la généralisation de l'approche participative et au renfoncement de la dynamique de convergence, ainsi qu'au rôle décisif que devraient jouer les Régions et les autorités territoriales dans la dynamique et la promotion du bien-être du citoyen. C'est dans cette perspective que Nous avons lancé le chantier de la Régionalisation avancée», souligne le message royal. Le Souverain a dit espérer que les conclusions de ce Forum «aboutissent à l'élaboration d’une vision commune du développement humain et apportent des réponses de dimension universelle aux enjeux actuels et futurs du globe» et qu'elles contribueront à «affiner les axes et les choix stratégiques de la deuxième phase 2011-2015 de l'INDH».
Un Forum, un échange d’expériences
Avec la participation de plus de 1.700 personnalités, dont près de 300 personnalités étrangères venues d'Europe, d'Afrique, d'Asie et d'Amérique, le Forum national du Développement Humain a gagné son pari de plate-forme d’échanges et de débat.
Sans oublier plus de 40 hauts responsables gouvernementaux étrangers qui y ont également pris part. Il faut dire qu’il y avait matière à travailler. Ainsi, après une cérémonie en grande pompe présidée par la Gouverneur de Bank Al-Maghrib, Abdellatif Jouahri, le Directeur général du FMI a prononcé un discours très positif sur cette expérience marocaine pionnière qu’est l’INDH.
La deuxième plénière, modérée par Mustapha Bakkoury, président de Masen, en présence de l’ancien Premier ministre du Pérou, s’est penché sur la relation de cause à effet entre les programmes de développement humain et la préservation de l’environnement.
Quant à la troisième séance, elle sera consacrée aux rôles que peuvent jouer les régions dans la lutte contre la pauvreté et la précarité. Elle a été présidée par Mohamed Berrada, professeur universitaire et ancien ministre des Finances.
Ces débats de très haut niveau ont été suivis le mardi 2 novembre par 5 ateliers différents. L’engouement du premier jour était le même ce mardi, où le ministre délégué chargé des Affaires économiques, Nizar Baraka, a étayé devant les participants les deux manières selon lesquelles on peut mener des politiques de développement humain, à savoir les programmes ciblés. D’ailleurs au Maroc, depuis deux années déjà, une expérience pilote avec le programme Tayssir a été menée et a permis le maintien en scolarité de plus de 450.000 élèves grâce à une aide directe aux parents.
L’autre projet d’aide directe en cours est celui du RAMED. Une expérience pilote menée dans la région de Tadla Azilal au profit de quelque 40.000 familles, soit 200.000 bénéficiaires de ce régime d’assistance médicale aux économiquement démunis. Ce programme sera généralisé en 2011 avec pour objectif à moyen terme de faire bénéficier quelques 8 millions de personnes pauvres ou à faibles revenus.
Au Maroc, toujours, une politique universelle est menée au travers de la Caisse de compensation, mais la subvention de cette caisse é été ramené à 2 % du PIB pour ne pas affecter les programmes et projets sociaux.
Un tout autre panel de grande importance est celui animé par Nouzha Skalli, ministre du Développement social, de la Famille et de la Solidarité, à propos des activités génératrices de revenus. Un panel qui a connu la participation de Tariq Sijilmassi, président de la FNAM qui a mis en exergue le rôle important du micro-crédit comme vecteur de développement social. Mohamed Chafiqi, Directeur des Etudes et des Prévisions Financières au ministère des Finances a, pour sa part, fait une excellente présentation concernant l’importance de l’intégration des politiques économiques de développement, insistant par là sur les gaps à rattraper en matière de coordination de ces politiques. M. Chafiki est confiant que la réforme de la Loi organique se veut une solution idoine à ce type de problématiques. Pourvu que toutes les expériences et recommandations de ce Forum soient prises en considération dans la phase II de l’INDH. Du moins, ce Forum a eu le mérite de faire un diagnostic sérieux de la situation actuelle du développement humain ici, mais également ailleurs. Le plus important également à retenir, et non sans fierté, c’est que le Maroc est pionnier en la matière. Pourvu que ça dure.
Dossier réalisé par I. Bouhrara & S. Es-siari