Expropriation : pointée du doigt, la loi 7/81 montre de nombreuses limites

Expropriation : pointée du doigt, la loi 7/81 montre de nombreuses limites

Jugé dépassé, le texte ne garantit pas suffisamment les intérêts des personnes concernées. Le niveau d’indemnisation et les délais d’exécution sont les plus décriés.

 

Par C. Jaidani

Le Maroc a lancé un vaste programme de modernisation de ses infrastructures, porté par l’organisation de la Coupe d’Afrique des Nations en 2025 et la co-organisation du Mondial 2030. Les chantiers se multiplient à travers le pays, mobilisant le foncier public. Mais la dynamique de développement ne fait pas que des heureux. La nécessité d’exproprier également certains terrains appartenant à des particuliers suscite une vague de mécontentement. Les personnes concernées pointent du doigt des procédures expéditives, un manque de concertation et surtout des indemnisations jugées largement insuffisantes.

Sur les réseaux sociaux, les images de protestations et d’accrochages avec les autorités circulent, témoignant d’un malaise grandissant. A l’ancienne médina, ciblée par un ambitieux projet de réaménagement dans le cadre de la future Avenue royale, les habitants ne cachent pas leur amertume.

«La maison où nous habitons a été construite par mon grand-père durant les années cinquante. Suite à son décès et de plusieurs de ses descendants, le nombre de propriétaires dans l’indivision n’a cessé d’augmenter. Actuellement, cette maison regroupe une dizaine de familles. Les autorités nous ont proposé un relogement à Sidi Hajjaj, à 25 km de Casablanca. Cette offre n’arrange personne car les résidents seront éloignés de leur lieu d’activités. Aussi, il est difficile de faire le transfert pour les enfants scolarisés en cette période de l’année», témoigne Abdelkader Hajjaji, un septuagénaire habitant du quartier. Il déplore également le fait que «les locataires ne bénéficient d’aucune indemnité, alors que la plupart d’entre eux ont résidé dans ces maisons pendant plus de 30 ans pour un loyer de moins de 1.000 DH. C’est très difficile pour eux de déménager et de trouver un loyer similaire».

Ce climat tendu existe également dans le quartier L’Océan à Rabat, où un vaste programme de rénovation urbaine est lancé. Il a mis au-devant de la scène la réforme du cadre juridique de l’expropriation jugé inadéquat. Il est utile de rappeler que le projet de la LGV Tanger-Casablanca, qui devait être livré en 2015, n’a pu l’être qu’en 2018 à cause des retards pris dans les expropriations. D’autres grands projets ont rencontré les mêmes difficultés et leurs budgets ont été revus à la hausse. Il y a quelques années, une proposition de loi a été déposée par l’Union socialiste des forces populaires (USFP) pour amender le texte 7/81 qui encadre les expropriations, particulièrement les articles 6, 10 et 23. Parmi les réformes proposées, figurait la révision du système d’indemnisation et du délai légal pour rendre effective l’expropriation.

«Une bonne part des affaires déposées auprès des tribunaux administratifs concerne les expropriations. Elles peuvent mettre des années pour être résolues, tout en engendrant des préjudices importants pour les plaignants. Les montants débloqués pour l’indemnisation ne sont pas justes et sont nettement en deçà de la moyenne du marché. Ils se basent sur un système dépassé, hérité de l’époque coloniale», explique Nabil Haddaji, avocat au barreau de Casablanca.

En effet, c’est une commission locale ou régionale regroupant les représentants de nombreux départements qui fixe les prix. Les départements concernés varient selon la nature du bien exproprié. Mais en général, les départements de l’Intérieur, des Finances, de l’Agriculture, des Habous et de l’Équipement sont les plus impliqués. Une fourchette des prix est établie sur la base de la moyenne des transactions effectuées les dernières années. Avec les fausses déclarations, la grille est en général biaisée et ne reflète aucunement la réalité.

«Outre le taux d’indemnisation, le délai d’exécution de l’expropriation est fortement décrié par les plaignants. Fixé par la loi à deux mois, ce délai est insuffisant pour permettre aux expropriés de s’organiser et de prendre les dispositions nécessaires. Il est donc essentiel de le revoir à la hausse», explique Haddaji. 

 

 

 

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