La dette des géants étatiques prend année après année de l’ampleur. Alors qu’elle n’était que de 56 milliards de DH en 2007, elle a quasiment quintuplé en l’espace de 10 années. Cette croissance fulgurante de leur endettement pourrait hypothéquer leurs performances à l’avenir.
Les programmes d’investissements déployés par un certain nombre d’entreprises publiques ont considérablement accru leur dette. Ainsi, en 2016, plus de 80% de ces dettes sont le fait de six entités, à savoir le Groupe OCP, l’ONEE, ADM, ONCF, Masen et le Groupe TMSA, relève le Rapport sur les établissements et entreprises publics relatif au PLF 2018.
À lui seul, le groupe présidé par Mostafa Terrab cumule, à fin 2016, un endettement de 61,48 milliards de DH, en hausse de 12% comparativement à 2015.
L’ONEE, considéré comme l’établissement public le plus fragile financièrement, traîne une dette de 57,53 milliards de DH, en hausse de 3% par rapport à 2015. Au bord de l’asphyxie, l’ONEE affiche un ratio (dettes/ capitaux propres) de 301% ! Pour sa part, Autoroutes du Maroc, qui a récemment lancé une deuxième émission obligataire dans le cadre de la restructuration de sa dette, cumule 41,01 milliards de DH d’endettement. L’ONCF a vu sa dette augmenter de 10% entre 2015 et 2016, pour se situer à 26,47 milliards de DH. Concernant l’Agence marocaine pour l'énergie solaire, Masen, en douze mois, sa dette a bondi de 61% à 15,63 milliards de DH, enregistrant de fait la plus forte progression.
Par ailleurs, rapportée aux fonds propres qui s’élèvent à 523 milliards de DH à fin 2016, la dette des EEP représente 49%.
Parallèlement, plusieurs établissements publics ont réussi à baisser le niveau de leur endettement en 2016. Ainsi, des mouvements à la baisse sont enregistrés chez Crédit Agricole du Maroc, qui a réduit sa dette de 20% à 6,42 mil- liards de DH. Le Groupe TMSA allège sa dette de 1% à 11,29 milliards de DH. Les Régies de distribution, elles, ont comprimé la leur de 8% à 5,57 milliards de DH.
D’autres constats également frappants ont été relevés, notamment sur la situation de la dette extérieure des EEP. Cette dernière a atteint 54% (168,70 Mds de DH) dans la dette extérieure publique globale à fin 2016, en hausse de 1,1 point par rapport à 2015. Le stock garanti par l’Etat remonte ainsi à 68% de l’ensemble de la dette. En outre, le rapport signale que 93% de ces dettes sont concentrés au niveau de 10 EEP, avec 156,9 milliards de DH à fin juin 2016.
Stabiliser l’endettement
Face à cette situation, l’Etat ne baisse pas les bras et se fixe comme objectif de stabiliser l’endettement des EEP et d’optimiser sa structure et sa supervision.
Dans ce sens, une circulaire relative au service de la dette a été adressée, en octobre 2016, aux dirigeants des EEP, les invitant à assurer un suivi régulier des engagements et des décaissements des contrats de prêt en cours d’exécution et à respecter scrupuleusement les échéances de remboursement des prêts. Elle les informe aussi de la mise en place d’un dispositif dynamique de suivi et de surveillance au niveau du ministère de l’Economie et des Finances. Objectif : assurer la veille par rapport aux situations de remboursement des emprunts extérieurs et alerter sur tout éventuel défaut de remboursement.
En outre, le gouvernement a lancé une réflexion ayant pour objet la mise en œuvre d’une restructuration financière des cinq principaux EEP emprunteurs, visant notamment la réduction de leur dette extérieure.
Par ailleurs, une attention particulière est accordée au risque de change à travers la recherche d’une capitalisation et d’une mutualisation des efforts et des méthodes de couverture des risques de change appliquées par les EEP. Ce qui devrait permettre d’atteindre de meilleurs résultats en termes de maitrise de la dette extérieure, de gestion du service de la dette et des risques qui en découlent. ■
107 milliards de DH seront investis en 2018
En 2016, les investissements réalisés par les EEP totalisent 72,67 Mds de DH, enregistrant un taux de croissance annuel moyen de 1% sur la période 2010- 2016 et une baisse de 8,5% par rapport à une année auparavant. Ce constat est lié essentiellement à l’atteinte d’un nouveau palier des investissements depuis 2012 (77,54 Mds de DH) ainsi qu’à l’arrivée à maturité de certains projets structurants : programme autoroutier, transport ferroviaire, infrastructures portuaires et aéroportuaires...
Les prévisions de clôture de l’année 2017 seraient d’environ 80 Mds de DH, confirmant ainsi le maintien des investissements, en termes de réalisation, à un niveau élevé. Le volume d’investissements prévisionnel des EEP au titre de l’exercice 2018 s’élève à 107,57 Mds de DH, marquant une hausse de 1% par rapport aux prévisions actualisées de l’année 2017 (106,35 Mds de DH).
Y. Seddik