Les réformes structurelles et sectorielles constituent des gisements de croissance.
Les politiques macroéconomiques n’auraient aucun effet significatif sur la croissance au Maroc.
Par M. Diao
Au Maroc, les principales sources de la croissance sont, entre autres, la demande intérieure et l’investissement public. Sachant que les secteurs primaire et secondaire sont pourvoyeurs d’une grande valeur ajoutée.
Pour l’année en cours, la croissance devrait se caractériser par une atonie manifeste, avec un taux de 2,9% du PIB (contre 7,2% du PIB en 2021). Cette configuration conforte la pertinence du webinaire portant sur les sources de la croissance en 2022, organisé récemment par la Fondation Attijariwafa bank. «Au-delà des leviers traditionnels et des sources classiques de la croissance, il est important de savoir que les réformes structurelles et sectorielles constituent des gisements de croissance», explique Nadia Hachimi Alaoui, chargée de recherche à l’Université de Turin (Italie). Il y a lieu de souligner que pour certains économistes, il existe une forte corrélation entre le niveau de développement d’un pays et la solidité de ses institutions.
L’assertion de Nadia Hachimi Alaoui est partagée en partie par Nabil Adil, directeur de l’Institut de recherche en géopolitique et géoéconomie de l’école de management ESCA, qui a exprimé une idée pour le moins originale. «Au Maroc, les données prouvent que les politiques macroéconomiques n’ont aucun effet significatif sur la croissance. Pour preuve, le taux directeur fixé par Bank Al-Maghrib est passé de 7 à 1,5% au cours de ces dernières années, et ce sans réelle incidence sur le tissu économique», précise-t-il en substance.
Pour l’économiste, qui a rappelé le caractère déterminant du secteur agricole sur la croissance économique, l’urgence est de doter le Maroc d’un tissu productif performant et compétitif à même de générer davantage de valeur ajoutée et de postes de travail pérennes et décents. En clair, tout l’enjeu pour les pouvoirs publics serait de bâtir les conditions idoines pour l’émergence d’une quinzaine de secteurs aussi performants que les industries automobile et aéronautique. Ce qui remet en selle le débat sur la diversification économique ainsi que celle des exportations, limitées au niveau des produits sophistiqués au haut contenu technologique.
Par ailleurs, Javier Diaz Cassou, économiste senior à la Banque mondiale, a pointé du doigt le faible nombre d’entreprises créées annuellement, couplé à la mortalité aigue des PME marocaines. «La réforme de l’éducation, la promotion de l’innovation ainsi que l’observation stricte des règles de concurrence permettront de libérer la croissance au Maroc», dixit l’économiste senior de la Banque mondiale. En revanche, celui-ci a été dithyrambique sur la mise en place du Fonds Mohammed VI pour l’investissement, la réforme des établissements et entreprises publics (EEP), tout en saluant la gestion de la crise liée à la covid-19 au Maroc.
Les limites de l’Etat social
Nabil Adil est formel. L’Etat social n’est pas un mythe au Maroc, mais bien une réalité. «Le système de subvention (farine, butane), les agréments ainsi que l’existence d’un système éducatif gratuit, constituent autant de manifestations de Etat social dont les limites sont criardes aujourd’hui», explique-til. Face aux ressources publiques limitées, l’économiste s’interroge sur la soutenabilité des dépenses sociales en constante augmentation en raison de l’inflation des besoins sociaux.
En revanche, pour Nadia Hachimi Alaoui, la mise en œuvre de la génération de l’Assurance maladie obligatoire (AMO) constitue un tournant pour l’édification d’un meilleur Etat social au Maroc. Sur un autre registre, lors de cet événement, les intervenants n’ont pas manqué de souligner les limites de l’investissement, dont le taux tourne autour de 30% du PIB à l’échelle nationale (contre une moyenne mondiale de 20%). En effet, au Maroc, l’investissement porté par le public, qui représente près des 2/3 de celui-ci, est peu générateur d’emplois.
A cela, il faudrait ajouter que l’ICOR au Maroc reste toujours élevé par rapport aux pays émergents. Pour rappel, l’ICOR équivaut au nombre de points d’investissement nécessaires à la réalisation d’un point de croissance économique.