Croissance: sur quoi le Maroc peut-il compter cette année ?

Croissance: sur quoi le Maroc peut-il compter cette année ?

Sur une saison agricole au moins normale, en raison des pluies abondantes de ces dernières semaines.

En plus d’un secteur du tourisme qui démarre bien l’année et des transferts des MRE qui devraient battre un record.

 

Par A. Diouf

L’année 2022 est à oublier ! Malgré la réponse politique très ferme des autorités, apportée à travers l’octroi de subventions générales sur les produits de première nécessité et le maintien des prix réglementés préexistants, elle ne s’est pas bien terminée. Une autre sècheresse et les retombées économiques de l'invasion de l'Ukraine par la Russie ont, en effet, pesé sur l'économie nationale et déclenché des pressions inflationnistes dont ne sait exactement quand elles vont s’estomper.

Et, au final, la croissance réelle du PIB a chuté, passant de 7,9% en 2021 à 1,2% en 2022, tandis que le déficit du compte courant a augmenté de 2,3% à 4,1% du PIB. Une inflation inquiétante L’année 2023 ne commence pas non plus sous de bons auspices. C’est ce qui transparait des premiers indicateurs économiques dévoilés par le HCP, la DEPF, l’Office des changes et la TGR au titre de janvier 2023. A commencer par l’inflation, qui est à 8,9% en janvier sur une année glissante, conséquence de la hausse de l’indice des produits alimentaires de 16,8% et de celui des produits non alimentaires de 3,9%, est-il expliqué. 

Sont notamment mis en cause, les prix de l’huile, des fruits, des légumes et des viandes, à savoir ceux de denrées alimentaires irremplaçables dans le panier de la ménagère. Ils affichent des hausses de taux à deux chiffres, à quelques semaines du mois sacré de Ramadan. Autres secteurs, autres inquiétudes. Le secteur secondaire a encore du mal à reprendre du poil de la bête, à cause de la poursuite du repli conjugué des activités minières et de la construction et des effets de la modération de la demande étrangère adressée aux industries d’exportation. Entamée au 4ème trimestre 2022, la baisse de production de l’industrie extractive, résultat d'une diminution de la production de phosphates, s’est poursuivie en janvier.

S’y est ajoutée la tendance baissière des livraisons de ciment, principal baromètre de l’activité du secteur de la construction. Cette baisse, entamée à partir du mois de mars 2022, s’est poursuivie au premier mois de l’année 2023, avec un repli des ventes de ciment de 6%, pour une baisse moyenne de 15,9% entre juin et décembre 2022 et de 14,9% entre mars et avril 2022, et contre un accroissement de 8,8% à fin janvier 2022. Ce retrait a concerné l’ensemble des segments de livraison, à l’exception de celui des infrastructures qui a enregistré une hausse de 7,2%. Un déficit commercial persistant Du côté des échanges extérieurs aussi, le compte n’y est pas.

Au titre du mois de janvier 2023, les importations ont augmenté de 6,3% ou +3.216 MDH en se situant à 54.402 MDH contre 51.186 MDH à fin janvier 2022. Parallèlement, les exportations n’ont enregistré qu’une hausse de 3,6% (+1.137 MDH), pour se situer à 32.631 MDH, contre 31.494 MDH une année auparavant. Il en a ainsi résulté un déficit commercial de 21.771 MDH contre 19.692 MDH à fin janvier 2022, soit une hausse de 10,6% en une année. Par ailleurs, la situation des charges et ressources du Trésor à fin janvier 2023 fait ressortir un excédent budgétaire de 524 MDH, contre un déficit de 360 MDH un an auparavant.

Cette évolution recouvre une augmentation des recettes (+3,5 Mds de DH) plus importante que celle des dépenses (+2,6 Mds de DH). Malgré l’environnement économique globalement défavorable, certains secteurs sont sur une réelle pente ascendante. C’est le cas du tourisme, dont les performances montrent que la reprise est bel et bien là. Janvier 2023 a, en effet, enregistré 902.755 arrivées. Les nuitées consommées dans les établissements d’hébergement classés ont atteint 1,6 million de DH, en hausse de 102% par rapport à janvier 2019, année de référence. Et ces opérations ont généré 8,24 milliards de DH de recettes. Ce qui a fait dire à Fatim-Zahra Ammor, la ministre du Tourisme, de l’Artisanat et de l‘Economie sociale et solidaire, que «le niveau d’arrivées et de recettes de 2023 va largement dépasser celui de 2019, et nous nous attendons à réaliser 100 milliards de DH cette année».

Dans le même sillage, l’on s’attend aussi à d’importants envois de fonds de la part des MRE. Les transferts qu’ils ont opérés en janvier 2023 se sont établis à 9,22 milliards de DH, contre 6,3 milliards à la même période de l’année dernière, selon l’Office des changes. Et «si cette cadence se maintient, l’année en cours pourrait battre un record en matière de transferts». Ce qui soulagerait davantage les finances publiques, qui se sont déjà offerts un bol d’air avec, d’une part, la récente sortie sur le marché international de 2,5 milliards de dollars et, d’autre part, la ligne de crédit modulable (LCM) de 5 milliards de dollars sollicitée auprès du FMI, ceci après la sortie du Maroc de la liste grise du GAFI.

Côté IDE aussi, le Royaume demeure encore attractif. Le flux net a plus que triplé, passant de 637 millions de dirhams à fin janvier 2022 à 2,21 milliards de dirhams à fin janvier 2023, selon l'Office des Changes. Globalement, l’investissement devrait connaître une forte dynamique, suite à l’adoption de la loi-cadre formant charte de l’investissement et à l’opérationnalisation du Fonds Mohammed VI pour l’investissement. A côté de ces indicateurs positifs, s’ajoute le retour des pluies, ce qui augure au moins d’une saison agricole normale. «En effet, les pluies sont certes tombées de manière abondante ces dernières semaines, mais pas suffisamment longtemps pour assurer une très bonne campagne agricole», soulignent les spécialistes. Bref, dans l’hypothèse d'un retour à une saison agricole normale, conjuguée à une stabilisation des conditions économiques extérieures et à la poursuite des réformes structurelles, l'activité économique devrait rebondir en 2023 et se stabiliser autour de 3,5% à moyen terme. 

 

 

 

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