L’auteur, peintre et psychothérapeute, Ghizlaine Chraibi, expose à Artem Gallery à Casablanca, ses tableaux en forme de petits théâtres nocturnes, peuplés de créatures intrusives, tapies dans l’ombre.
A peine y avez-vous pénétré qu'une orgie de «visages», d’«ombres», de «présences, ancrées ou liquéfiées» vous happe. Vos yeux une fois dessillés discernent une farandole de «corps. Qui vont. Qui viennent. Des couples en devenir. Ou pas. Des corps qui attendent. Qui s’attendent. Qui s’attendent à mieux, peut-être…».
On ignore pourtant le temps (les jours et les nuits) que l’artiste passe à les coucher sur toile. Pour composer un tel théâtre de figures mystérieuses où le spectateur est progressivement saisi d'un sentiment d'irréalité. Tantôt désuètes tantôt élégantes, elles déploient un univers faussement maladroit peuplé d’orgies imaginaires. Des scènes scabreuses aussi bien que des moments tranquilles de la vie ?!
Enfourchant le langage passionné qui anime les œuvres des «figuratifs», la peintre fait éclater une véritable ivresse de la couleur. Chaude et froide, sourde et vive. Le trait assume ses maladresses. Le ton, avec ces nuances d'un certain raffinement, parait suffisamment disparate aux yeux même du visiteur.
L'exposition présentée à Artem Gallery brode sur le thème des scènes intimistes : From human to being. Elle n’est ni à plaire ni à déplaire, mais plutôt tend à montrer le monde tels que Ghizlaine Charibi le ressent. Nous, nous sommes tombés sous le charme enchanteur de cette peinture.
A elles seules, les œuvres offertes à voir ne suffiraient pas à exprimer l'ampleur du talent de l’artiste mais elles disent le plaisir contagieux d’une femme à faire naître de l'extrême banalité des éclairs d'une gravité lumineuse. La condition humaine est ainsi mise en toile par le désir, l'amour, l'émotion, et comme l'écrivait Cendrars par la difficulté, au bout du chemin, «d'être un homme avec une femme»…salut !
*A découvrir jusqu’au 30 mars 2021, chez Artem Gallery à Casablanca.
Par R.K.H