En lançant son premier réel effort discographique, «Lose My Mind», la jeune chanteuse Douaa Serhir s’apprête à conquérir nos cœurs. Elle nous l’offre en guise d’amuse-bouche d’une révélation.
Par R. K. Houdaifa
Douaa est entrée par la grande porte dans la catégorie de ces artistes dont on ne sait pas s’il faut d’abord saluer une voix, assez stupéfiante, ou bien la finesse de sa composition tendue qui se déploie savamment entre électronique et pop. En cette douce soirée de vendredi 24 septembre, la magnifique rooftop de Sigma Technologie était inondée de monde. Du beau monde, du beau linge, la fine fleur des créateurs. Les conversations allaient bon train. Elles étaient essentiellement axées sur la brillante et tendre chanteuse qui demande de percer : Douaa Serhir.
Cette jeune femme, belle et un peu mystique, perçoit nettement l’immense présence des médias. Elle en est submergée. Une sourde angoisse l’étreint, qui va s’amplifier à mesure que les minutes s’égrènent. Combien sont-ils là à attendre la projection de son clip ?
Une pluie au bas mot, alors que jusque-là elle ne s’était jamais mise à table devant un journaliste. Afin d’étouffer ce sentiment oppressant, elle file en catimini tailler une bavette avec sa mère, Mounia Daïfi, qui est aussi son manager. Puis, quoi ?! Un regard jeté à la dérobée sur l’auditoire, des visages familiers se détachent, des encouragements fusent, Douaa Serhir s’emballe… Ne lui demandez surtout pas de lever davantage le voile sur son vécu, sinon elle se fermera comme une huître.
Jardin secret oblige. On saura néanmoins qu’elle passait ses journées à écouter toutes les chansons, toutes les musiques qui se mettent à portée de son oreille friande. Du folk au rock, en passant par le blues, elle absorbe tout, le passe dans la moulinette et en tire seulement de quoi rendre sa musique essentielle.
Douaa a de quoi séduire !
Il y a ceux, assez rares, qui, dès les fulgurants premiers titres, ont trouvé illico la bonne formule. Et puis il y a ceux, beaucoup plus nombreux, qui, au fil des répétitions, tâtonnent laborieusement entre les sons, hésitent entre les genres. Cette jeune chanteuse basée aujourd’hui à Paris, et native de Kénitra, appartient à la seconde catégorie. Mais sans aucun doute les plus attachants. Enfin, si on sait se montrer. Avec ce premier véritable effort discographique, le bien-nommé et aimé Lose My Mind, Douaa fait oublier ses débuts sur les réseaux sociaux où elle s’est donnée à voir avec des reprises charmantes.
Aidée par Saïd Moussaria qui, non seulement lui a mis le pied à l’étrier, mais a aussi réalisé le clip, la jeune femme, toujours souriante, s’amuse sur ledit morceau, accueillant, et aux contours mélodieux, des vertus de l’auto-tune sans mettre au placard son timbre suave – parfois à la Amy Winehouse ou Adele – et ses aptitudes de bonne compositrice.
Les sons distordus de six-cordes en fusion s’étirent ad vitam aeternam, plaqués sur le fracas de basses entraînantes, tandis que résonne la cavalcade grandiose des beats. Ce qui laisse quand même entrevoir la possibilité d’un style plus personnel.
Privilégiant le sensible à l’arrogance, le texte exutoire pour calmer ses angoisses aux certitudes assénées, l’humain au clinquant, elle se confie pour de vrai. «I’m gonna lose my mind/ I’m gonna lose my mind/ I’m gonna lose my mind/ Till I can search find it another night.» Propos narratif, mais outrageusement sexy. Il faut entrer au cœur de cette musique bouillonnante dotée d’une classe fulgurante pour capter la profondeur de l’univers personnel de cette jeune artiste hors pair. Elle promet d’aller loin. Peut-être aussi loin que nous l’imaginons.