Alors que sort sur YouTube le quatrième «Ftoor m3a rappeur», nous avons rencontré Soufiane Fahssi pour évoquer la genèse du projet, le rap game et son développement.
Propos recueillis par R. K. Houdaïfa
Finances News Hebdo : «Ftoor m3a rappeur». Ditesnous-en quelque chose?
Soufiane Fahssi : Maintenant qu’El Grande Toto a atteint la maturité, j’ai le sentiment qu’il est temps de passer à autre chose. Soit. Je ne savais pas quoi faire : un voyage, une virée, une journée avec un rappeur… Plusieurs concepts me sont venus à l’esprit ! Dans la foulée, l’idée de mettre sur orbite une série de vidéos prônant le rap game émerge, prend forme, puis se concrétise grâce à La Madrina, Fatima Zahra Ilyakini de son vrai nom.
F.N.H. : Un bilan ?
S. F. : Modestie mise à part, je dirais que le bilan est plus que satisfaisant. Je viens de voir mes statistiques et je peux dire que tout est au mieux dans le meilleur des mondes : plus que 46 pays ont visualisé les 4 Podcasts de «Ftoor m3a rappeur» (sourire) !
F.N.H. : Des changements dans le rap game marocain ?
S. F. : Il est indéniable que notre rap évolue dans un sens favorable. Nous avons de plus en plus de rappeurs pétris d’un indiscutable talent. Le pays peut s’en enorgueillir. Car ils en sont la fierté. Quant à sa vitalité, elle est partout tangible. Les statistiques des plateformes de streaming en apportent la preuve formelle. Les Marocains n’écoutent pratiquement que du Rap !
F.N.H. : Mais encore …
S. F. : Aujourd’hui, le rap touche un public bien plus large. Il est devenu plus commercial, plus ouvert musicalement. Depuis quelques années, les clips marocains se font par ailleurs plus ambitieux et sont devenus un véritable terrain d’expérimentations visuelles : incrustation, démultiplication, superposition, animation…Les effets spéciaux s'enchaînent sans discontinuer dans une prolifération qui finit par faire sens. Grâce à un impressionnant travail de costume, de maquillage et quelques astuces de montage, les vidéoclips sont maintenant plus léchés et mieux produits.
F.N.H. : La qualité n’accompagne pas la quantité ?
S. F. : J’admets que la qualité fait parfois défaut. Pour autant, convient-il de faire la fine bouche ? Pour ma part, je reste admiratif devant cette profusion de talents, cette inventivité et cette créativité. Autant de gages du merveilleux élan pris par le Maroc…
F.N.H. : Les newcomers se fichent de leurs aînés ?
S. F. : Les newcomers regardent l’avenir droit dans les yeux et bousculent les schémas musicaux d’un genre en constante évolution. Si l’on peut bien évidemment s’étonner que l’un des plus écoutés du rap marocain à l’heure actuelle regarde de haut ses aînés, on peut aussi se dire que cette méconnaissance n’a rien de foncièrement problématique. Le succès de tous les précurseur.euses, c’est vrai, aurait pu figer le rap dans une esthétique, l’institutionnaliser, le muséifier. C’est tout le contraire qui s’est s’opéré : à l’inverse du rock ou même du jazz, où les newcomers semblent sans cesse se référer au passé, musicalement ou en interview, le rap donne l’impression d’être continuellement tourné vers l’avenir, hostile à toute forme de léthargie.